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Mère

Commentaires sur Le Dhammapada

Tape records

 

Dans les deux mondes, en ce monde-ci et en l’autre, l’être malfaisant se lamente. Il gémit et souffre en se remémorant ses mauvaises actions.

Il est tout à fait évident que lorsqu’on agit d’une façon laide et basse, on est tout naturellement malheureux; mais être malheureux parce qu’on est conscient de la laideur de ses actes, cela me paraît déjà un état très avancé, parce qu’il faut être très conscient pour être conscient du mal que l’on fait, et être conscient du mal que l’on fait c’est déjà le premier pas pour ne plus le faire.

Généralement, on est tout à fait aveugle sur la laideur de ses actes. On fait le mal par ignorance, par inconscience, par petitesse, par cette espèce de repli sur soi qui vient de l’inconscience, qui vient de l’ignorance, cet instinct de préservation obscur qui fait que l’on est prêt à sacrifier le monde tout entier à son propre bien-être; et plus on est petit, plus le sacrifice offert à sa petitesse paraît naturel.

Il faut être beaucoup plus haut dans l’échelle pour voir que ce que l’on fait est laid. Il faut avoir déjà tout au fond de soi une sorte de prescience de ce qu’est la beauté, la noblesse, la générosité, pour souffrir de ne pas les porter en soi.

Je pense que le Dhammapada parle ici de ceux qui savent déjà ce qui est beau et noble, et qui font le mal volontairement, par calcul. Pour eux, la vie devient en effet terriblement douloureuse. Faire d’une façon persistante ce que l’on sait qui ne doit pas être fait, c’est au prix de tout le repos, toute la tranquillité possible, tout le bien-être que l’on peut avoir. Celui qui ment est constamment inquiet dans la crainte que son mensonge sera découvert; celui qui a mal agi est dans l’anxiété constante à l’idée que, peut-être, il sera puni; celui qui essaye de tromper n’a pas de repos, de crainte de laisser voir qu’il trompe.

Au fond, même pour une raison purement égoïste, faire le bien, être juste, être droit, être honnête, c’est la meilleure façon d’être tranquille et paisible, et de réduire le souci au minimum. Si, en plus, on peut être désintéressé, sans calcul et sans égoïsme, alors il est possible d’être vraiment heureux.

On porte avec soi, autour de soi, en soi, l’atmosphère produite par ses actions, et si ce que vous faites est beau et harmonieux et bon, votre atmosphère est belle, harmonieuse et bonne; tandis que si vous vivez dans l’égoïsme sordide et l’intérêt sans scrupule, la mauvaise volonté sans pitié, c’est cela que vous respirez à chaque minute de votre existence, et cela, c’est la misère, c’est le malaise perpétuel, c’est la laideur désespérée d’être laide.

Et il ne faut pas croire que de quitter ce corps vous libère de cette atmosphère, au contraire, le corps est une sorte de voile d’inconscience qui diminue l’intensité de la souffrance. Si vous êtes sans la protection du corps dans la vie vitale la plus matérielle, la souffrance devient bien plus aiguë et vous n’avez plus l’occasion de changer ce qui est à changer, de corriger ce qui est à corriger, de vous ouvrir à une vie et à une conscience plus hautes et plus lumineuses, plus heureuses.

Il faut se dépêcher de faire son travail ici, car c’est ici qu’on peut le faire vraiment.

N’espérez rien de la mort. La vie est votre salut.

C’est en elle qu’il faut se transformer. C’est sur terre qu’on progresse, c’est sur terre qu’on réalise. C’est dans le corps qu’on remporte la Victoire.

27 décembre 1957