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Mère

Entretiens

 

Le 23 avril 1958

L'enregistrement   

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Douce Mère, quand il y a en nous un effort pour faire mieux, mais que l’on ne voit aucun progrès, on se sent découragé. Quelle est la meilleure chose à faire?

De ne pas se décourager!... Le découragement ne mène nulle part.

D’abord, la première chose à se dire, c’est que l’on est à peu près totalement incapable de savoir si l’on fait un progrès ou si l’on n’en fait pas, parce que, très souvent, ce qui nous paraît être un état de stagnation est une longue — quelquefois longue, mais en tout cas pas interminable — préparation pour un bond en avant. Il nous semble parfois piétiner pendant des semaines ou des mois, et puis tout d’un coup quelque chose qui se préparait fait son apparition, et nous voyons que c’est un changement assez considérable et sur plusieurs points à la fois.

Il faut, comme pour toute chose dans le yoga, que l’effort de progrès soit fait pour l’amour de l’effort de progrès. Il faut que la joie de l’effort, l’aspiration vers le progrès se suffisent à elles-mêmes, tout à fait indépendamment du résultat. Tout ce que l’on fait dans le yoga, il faut le faire pour la joie de le faire et non pas en vue du résultat que l’on veut obtenir... Au fond, dans la vie, toujours, en toute chose, le résultat ne nous appartient pas. Et si nous voulons être dans la vraie attitude, il faut agir, sentir, penser, faire effort, spontanément, parce que c’est cela que l’on doit faire et non en vue du résultat à obtenir.

Dès que nous pensons au résultat, nous commençons à faire un marchandage et cela enlève toute la sincérité de l’effort. Vous faites effort pour progresser parce que vous sentez en vous le besoin, le besoin impérieux, de faire effort et de progresser; et cet effort est le don que vous faites à la Conscience divine en vous, à la Conscience divine dans l’Univers, c’est votre façon d’exprimer votre gratitude, d’offrir votre personne; et que cela ait pour résultat un progrès ou non, cela n’a pas d’importance. Vous progresserez quand il sera décidé que le temps est venu de progresser, et non parce que vous le désirez.

Si vous désirez un progrès, si vous faites un effort pour vous maîtriser par exemple, pour surmonter certains défauts, certaines faiblesses, certaines imperfections, et que vous vous attendiez à avoir un résultat plus ou moins immédiat à votre effort, votre effort perd toute sincérité, cela devient un marchandage. Vous dites: «Tiens! je vais faire un effort, mais c’est parce que je veux ça en échange de mon effort.» Vous n’êtes plus spontané, vous n’êtes plus naturel.

Alors, il y a deux choses à retenir. D’abord, nous sommes incapables de juger quel doit être le résultat. Si nous faisons confiance au Divin, si nous disions... si nous disons: «Eh bien, je vais donner tout, tout, tout ce que je peux donner, d’effort, de concentration, et c’est Lui qui jugera de ce qui doit être donné en échange... ou même si quelque chose doit être donné en échange, et je ne sais pas, moi, quel doit être le résultat.» Est-ce que, avant d’avoir transformé quelque chose en nous, nous sommes bien sûrs de la direction, du sens, de la forme que doit prendre cette transformation? Pas du tout. C’est donc seulement une imagination que nous avons, et généralement nous limitons beaucoup, nous rendons tout à fait petit, mesquin et superficiel, relatif, le résultat à obtenir. Nous ne savons pas quel peut être vraiment le résultat, quel il doit être. Nous le savons après. Quand ça vient, quand le changement se produit, alors, si nous regardons en arrière, nous disons: «Ah! voilà, c’était à cela que je tendais!» Mais on ne le sait qu’après. Avant, on a de vagues imaginations, qui sont tout à fait superficielles et enfantines en comparaison du progrès véritable, de la transformation véritable.

Alors, nous disons, premier point: nous avons une aspiration, mais nous ne savons pas vraiment quel est le résultat vrai que nous devons obtenir. Ce n’est que le Divin qui peut savoir cela.

Et secondement, si nous disons au Divin: «Je te donne mon effort, mais tu sais, il faut qu’en échange je fasse un progrès, autrement je ne te donne rien du tout!», ça, c’est un marchandage. Voilà!

(silence)

L’acte spontané, fait parce que l’on ne peut pas faire autrement et fait comme une offrande de la bonne volonté, est le seul qui ait vraiment de la valeur.