SITE DE SRI AUROBINDO ET LA MÈRE
      
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Mère

l'Agenda

Volume 7

5 octobre 1966

À propos de la situation financière, j'ai une petite histoire qui est arrivée dimanche ou lundi. Je t'ai dit que la situation était tout à fait... Pour des consciences ordinaires, elle est critique. Et il y avait un paiement à faire; je ne me souviens plus des détails matériels mais il y avait quelque chose de très urgent à payer (je pense que c'était pour les ouvriers, parce qu'ils avaient faim, ils n'avaient pas reçu leur argent), et j'avais besoin d'une certaine somme – que je n'avais pas: je n'avais rien. Alors une sorte de compassion est venue en moi pour ces gens qui n'avaient pas d'argent et je voyais que ce n'était pas bien, et je ne pouvais rien parce qu'il n'y avait rien. Alors, le soir quand je marchais (j'ai une heure de méditation et de tranquillité, de concentration), j'ai présenté tout comme cela (geste vers le Haut), et avec une attitude presque enfantine, j'ai dit au Seigneur (Il était là, n'est-ce pas, j'étais avec Lui) quelque chose qui pouvait se traduire (je ne sais pas, je ne parle pas, mais ça pouvait se traduire en mots) à peu près comme cela: «Je sais que Tu es avec moi et que Tu es derrière tout ce que je fais et partout, mais je voudrais savoir si ce que je fais, le travail que je fais, t'intéresse ou pas! (Mère rit) Et si ça t'intéresse, eh bien, il faut que j'aie cet argent.»

C'est venu comme cela, sous une forme tout à fait enfantine, mais très-très pure. Et deux jours après, quand il était nécessaire que vienne l'argent, que j'aie de l'argent, alors que tout semblait tout à fait impossible, tout d'un coup Amrita arrive en me disant: «Voilà, telle personne a envoyé un chèque de tant.» – C'était juste la somme qu'il fallait. Et cette personne, je crois que c'est la première fois qu'elle envoyait de l'argent. C'était tout à fait inattendu, absolument un miracle – un miracle pour les enfants. Juste au moment voulu, la somme voulue, et absolument inattendue. Alors vraiment j'ai ri. À ce moment-là, je me suis dit: faut-il que nous soyons bêtes! nous ne savons pas que tout arrive exactement comme ça doit arriver.

Je ne peux pas dire que je me fasse du souci (je ne m'en fais jamais), mais je me demandais... quelquefois je me demande: «Est-ce que ça va continuer ou...» Je ne suis pas très sûre de ce qui va arriver parce que... Jamais je n'essaye de savoir et je ne désire pas le savoir, mais je n'ai pas l'impression qu'«on» me le dise (je crois que c'est encore une bêtise mentale et que, quand rien n'est formulé, cela veut dire que ça va, que c'est comme cela que ça doit aller). Mais, n'est-ce pas, il y a un enfantillage qui voudrait que l'«On» dise: «Fais ça comme ça, fais ça comme ça, fais ça...» Et ça ne marche pas! Ce n'est pas comme cela!

Je ne reçois pas d'ordre: quand j'ai quelque chose à dire, je reçois absolument, exactement le mot, la phrase; mais pour agir, je ne reçois pas d'ordre, parce que... Je crois que je n'ai pas d'hésitation, je ne me demande jamais: «Est-ce qu'il faut faire ceci ou est-ce qu'il faut faire cela?» Jamais. Tout mon effort tend à vivre à la minute la minute. C'est-à-dire, à chaque minute, faire exactement ce qu'il faut faire, sans faire de plans, sans penser, sans... parce que tout cela devient mental; dès que l'on se met à penser quelque chose, ça ne va plus. Mais tout instinctivement, spontanément, je fais ce qu'il faut: ça, ça, ça... Quand il y a à répondre à quelque chose, ça vient. Et pour l'argent, c'est pareil; la seule chose que je sois amenée à faire, c'est de dire: «Telle personne a demandé tant, tel Service a besoin de tant», comme ça (pas longtemps d'avance, mais au moment où cela devient impératif). Et c'est tout. Et puis voilà. Alors je ne sais pas ce qui arrivera demain; je ne suis pas à chercher ce qui va se passer, du tout. Mais ce jour-là, c'était comme si je demandais: «Eh bien, donne-moi une preuve que ça T'intéresse.» – Poff! c'est tombé juste au moment. Alors j'ai ri, je me suis dit: «Faut-il que je sois encore un bébé!»

Et pendant deux jours, exactement au moment où j'avais quelque chose à donner, l'argent est venu. Alors j'ai dit: «Bon, ça va bien.» Mais ce n'est plus si amusant maintenant! C'était vraiment amusant.

Il y a maintenant une sorte de confiance là, derrière: eh bien, quand ce sera nécessaire, ça viendra, voilà.

L'esprit d'organisation, d'un point de vue pas tout à fait ordinaire mais humain (peut-être pas seulement humain, mais enfin), l'esprit d'organisation aime avoir toutes les choses devant lui comme un tableau et puis faire des plans, organiser, voir: ça, ça vient ici; ça, ça vient là... Tout cela est inutile. Il faut apprendre à vivre à la minute la minute, comme cela. C'est beaucoup plus confortable. Et ce qui empêche (je crois) que ce soit ainsi, c'est que c'est tout à fait contraire à l'esprit raisonnable humain et que tous les gens autour de moi s'attendent à ce que je fasse des plans et que je prenne des décisions et... Alors il y a une pression; je crois que c'est cela. Autrement, naturellement, spontanément, ce serait comme cela: le miracle à chaque minute. J'ai toujours tendance à dire: «Oh! ne vous faites pas de soucis; plus vous vous faites de soucis, plus vous rendez les choses difficiles – laissez-faire, laissez-faire.» Mais ils me regardent avec une sorte d'horreur (Mère rit): je suis «imprévoyante», voilà.

C'est ça, ma petite «histoire» – mon petit miracle. C'était comme pour me dire: «Ah! tu as envie de voir un miracle? – Tiens, le voilà, tout fait!» (Mère rit) C'est une bonne leçon.

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