SITE DE SRI AUROBINDO ET LA MÈRE
      
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Mère

l'Agenda

Volume 8

20 septembre 1967

Quelqu'un s'est mis en tête de faire une brochure pour le 21 février de l'année prochaine (quatre-vingt-dix ans de Mère), alors on m'a envoyé cette brochure et on veut que j'écrive un message sur la première page. Et dans cette brochure, on a sollicité (!) l'opinion de tous les gens en vue: il y a Indira Gandhi, le président de l'Inde, et patati et patata; et chacun dit ce que l'on dit toujours à des millions d'exemplaires: «Grande personnalité, ceci, cela...» Toutes les imbécillités habituelles. Alors j'ai écrit cela:

There is no other consciousness than the Supreme Consciousness.

There is no other will than the Supreme Will.

There is no other life than the Supreme Life.

There is no other personality than the Supreme Personality, the One and the All.1

 

Toutes les platitudes que l'on fait toujours, ils recommencent à les faire!

Je me suis dit que cela leur servirait de leçon.

*
*   *

Peu après

J'avais beaucoup de choses à dire, mais je ne me souviens plus.

Seulement une constatation, qui est vraiment très intéressante, c'est que tout le monde a dit la même chose, tous ceux qui ont eu l'Expérience ont dit la même chose... seulement chacun à sa manière, alors ça a l'air d'être quelque chose de différent. C'était si clair hier, et encore toute la matinée, de bonne heure ce matin: comme ceci, comme cela, celui-là ici, celui-là là (Mère montre différentes facettes), les philosophes, les créateurs de religion, les sages de tous les pays, ils ont toujours dit la même chose. Par exemple, l'enseignement du Bouddha et l'enseignement, mettons chrétien, cela a l'air d'être tellement différent, et c'est toujours la même chose. C'est-à-dire qu'il y a UN état (quand on attrape cet état), il y a UN état où l'on est conscient de la Conscience divine (pas «conscience de»: «conscience par» ou «conscience avec», je ne sais pas comment expliquer... c'est la Conscience divine qui est consciente, c'est-à-dire la Conscience dans son essence), et là, il n'y a plus de problèmes, plus de complications, plus d'explications, plus rien – tout est aussi clair que possible. Et alors, chacun a essayé d'expliquer cela, et naturellement c'est devenu confus, incomplet, incorrect, et puis ça s'oppose – et tout parle de la même chose!

C'est venu hier à propos d'un garçon qui m'a transmis la lettre d'un de ses camarades où celui-ci disait l'ineptie habituelle: «Je ne crois pas en Dieu parce que je ne peux pas le voir.» La petite stupidité habituelle. Et à ce propos-là, j'ai vu (j'ai regardé comme cela; pendant longtemps j'ai regardé) et j'ai vu que celui qui nie, celui qui affirme, celui... tout ça, tout ça, c'est (comment dire?) des modulations sur un même thème, même quand cela paraît dire le contraire.

Et hier c'était intéressant, parce que c'était la même constatation pour ceux qui sont matérialistes et qui sentent que la seule vérité est la vérité «concrète», celle qui, selon eux, se voit, s'entend, se touche... Et c'est la même chose, c'est le même état – le même état reflété dans des miroirs différents. Mais la différence des miroirs n'est pas une différence essentielle et radicale, c'est seulement... (geste montrant des facettes qui bougent), oui, c'est cela que certains ont appelé le «jeu», mais ce n'est même pas un jeu; on pourrait presque dire: c'est une différence de position.

Tout ce que l'on en dit, ce n'est rien, cela fait partie de cet énorme bavardage qui essaye d'exprimer ce «quelque chose» qui ne peut pas être exprimé. Mais quand on est DEDANS, c'est tellement clair, tellement évident – simple, sans problème. Et le monde n'est plus un problème.

Même cette différence, qui paraît une différence assez essentielle, entre ceux qui considèrent la Manifestation comme divine et essentielle, et ceux qui considèrent que pour atteindre le Divin essentiel, il faut sortir de la Manifestation (parce que c'est une «erreur» – n'est-ce pas, une erreur qui a été commise dans la Conscience), même ces deux-là, c'est la même chose! – Mais comment le dire? Quand on le dit, ça a l'air idiot, et pourtant là-haut c'est vrai. C'est vrai; c'est vrai et c'est plein. C'est plein, ce n'est pas creux – tout ici sonne creux-creux-creux; le creux de l'insuffisance. Mais là-haut...

C'est presque comme le kaléidoscope: on tourne et ça fait une autre image, on tourne et ça fait une autre image, on tourne... et c'est pourtant toujours la même chose!

Et alors, c'est le corps maintenant qui a l'Expérience. Dans un certain état, dans l'état qui correspond à Ça, à cet état essentiel, tout est harmonieux, d'une paix vivante, souriante, heureuse; et dès qu'il y a... un rien, n'est-ce pas, un rien: simplement l'entrée dans l'atmosphère de quelque chose qui est en désaccord – un rien –, ça se sent comme quelque chose d'extrêmement aigu et douloureux; mais d'une façon qui ne ressemble pas à la douleur de l'Ignorance, ça ressemble plutôt... on pourrait appeler cela un malaise, mais ce n'est même pas cela... C'est ce que chacun a expliqué à sa manière: les uns disent «tomber de la Vérité dans le Mensonge», les autres «tomber de la Lumière dans l'Obscurité», les autres «tomber de l'Ananda dans la souffrance», les autres... Chacun a mis son explication, mais c'est quelque chose... Moi, je n'ai pas de mots pour cela, mais le corps le sent, le sent d'une façon très aiguë, et il voit qu'au bout de cela, la conséquence de cela, c'est la désintégration; et tout son effort tend à rétablir cette harmonie intérieure, cet état harmonique où tout devient harmonieux, tout – et les choses dans leur apparence ne bougent pas! Et pourtant, d'une façon, elles sont merveilleuses, et d'une autre, elles sont détestables.

Et ça s'accentue de plus en plus, de minute en minute, l'opposition entre ces deux choses: un moment où tout est divin, l'autre moment où tout est détestable – et c'est la même chose.

C'est devenu très clair depuis le 15 août, depuis cette expérience du balcon.2

Mais alors, ça n'a rien à voir avec la pensée, ni même la sensation: c'est purement matériel (Mère touche la peau de ses mains), et c'est la différence entre une harmonie progressive et ininterrompue qui n'a aucune raison de cesser, qui va de plus en plus consciente, de plus en plus harmonieuse, et alors de plus en plus... on dit béatifi-que, heureux, tout cela – ce n'est pas cela! c'est «quelque chose»... quelque chose qui est tellement naturel, tellement naturel et... qui a le rythme de l'éternité. Alors c'est ÇA, et puis tout d'un coup (geste de renversement), c'est retomber dans... la même chose exactement, tout est la même chose, et tout est l'opposé!

Au point qu'il y a la perception, la perception matérielle, inexprimable parce qu'elle est à peine mentalisée, d'une Harmonie parfaite qui peut devenir, dans la conscience, une grave maladie! Des choses comme cela.

Et il y a la vision (extrêmement complexe et complète en même temps) que, par exemple, ceux qui ont essayé d'expliquer le pouvoir de l'imagination, de la pensée ou de la volonté ou de la foi, toutes ces choses, l'action directe sur la matière; la vision que chacune de ces choses a saisi un petit aspect de la Chose, mais dans la Chose, il n'y a pas de division; c'est quelque chose qui, quand c'est perçu ou conçu, se divise en un tas de petites choses, mais essentiellement c'est... (comment dire?) c'est une manière d'être, c'est un état de conscience – c'est une manière D'être, même pas un «état de conscience» parce que ça implique «être conscient de quelque chose», ce n'est pas cela: c'est une manière d'être. Et cette manière d'être, c'est ce qui, dans la conscience humaine, se traduit par: «Ah! le Divin», n'est-ce pas, par opposition. C'est une manière d'être tout A fait naturelle, spontanée – mais comment, comment Ça devient ça? Comment Ça se déforme?... Tout le temps, tout le temps (geste comme de minuscules renversements), le passage de l'un à l'autre, de l'un à l'autre, de l'un à l'autre, comme pour apprendre, apprendre comment Ça est ça (le mécanisme du passage). Cela paraît être (cela paraît être pour nous, pour toute cette pauvre conscience qui a passé à travers d'innombrables expériences malencontreuses), cela paraît être une «rechute» dans ce qui était; par conséquent ce n'est pas cela. Mais quel est le mécanisme?...

Au fond, on n'aurait la solution que si l'on trouvait le comment ou le pourquoi.

Tout le temps, tout le temps... (même geste de minuscules renversements).

Toutes les explications données ne sont que des explications. Ce n'est pas ça.

Savoir le pourquoi ou le comment, cela implique probablement le pouvoir de tout changer...

Dans ce cas, ça viendra un jour.

L'enregistrement du son fait par Satprem    

This text will be replaced

 

1 «Il n'y a pas d'autre conscience que la Conscience suprême.

Il n'y a pas d'autre volonté que la Volonté suprême.

Il n'y a pas d'autre vie que la Vie suprême.

Il n'y a pas d'autre personnalité que la Personnalité suprême, l'Un et le Tout.»

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2 La paix d'or.

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