Mère
l'Agenda
Volume 10
Tu n'as rien à dire?...
Je suis tellement plongé dans tant de choses pratiques ou matérielles...
(Mère rit)
On a un peu l'impression d'être englouti dans la Matière... non?
Ces jours-ci, moi, j'ai eu plutôt l'impression d'être entourée d'une incompréhension totale – mais ça, j'y suis habituée! Mais c'était devenu très aigu; je recevais des questions, des reproches, enfin tout-tout... C'était comme l'esprit d'incompréhension qui se levait partout, et ça m'a fait l'effet de se lever exprès parce que c'était le moment de faire quelque chose... «Pourquoi fait-on ceci, pourquoi fait-on cela, pourquoi est-ce comme cela?...» Et la plupart du temps, basé sur des renseignements tendancieux ou des observations incorrectes.
(silence)
En dépit de cette espèce d'apparent engloutissement par les problèmes et le travail pratique, est-ce que quelque yoga se fait ou quelque chose se fait, même si nous, extérieurement, sommes tellement absorbés que nous n'avons pas l'impression de faire quelque chose?
Oh! mais maintenant, l'être tout entier (le corps a bien compris), mais l'être tout entier sait que tout vient pour vous faire avancer aussi vite que possible, tout: les obstacles, les contradictions, les incompréhensions, les occupations superflues, tout-tout-tout pour faire avancer; c'est pour toucher un point, un autre point, un autre... et vous faire progresser aussi vite que possible. Si l'on ne s'occupe pas de cette Matière, comment est-ce qu'elle va changer?
Et c'est très clair, il est tout à fait évident que toutes les objections, toutes les contradictions viennent seulement d'un mental superficiel qui ne voit que l'apparence des choses. C'est justement pour mettre en garde la conscience contre cela: qu'elle ne soit pas trompée par ces choses, qu'elle puisse voir clairement que c'est tout à fait extérieur, superficiel, et que, derrière cela, tout ce qui se fait, est comme une marche aussi rapide que possible vers... la transformation.
(long silence)
L'intelligence à son degré supérieur comprend très facilement qu'elle ne sait rien et elle est très facilement dans l'attitude requise pour progresser, mais même ceux qui ont cette intelligence, quand il s'agit de choses matérielles, ils ont instinctivement l'impression que tout ça, c'est connu, c'est su, c'est fondé sur des expériences établies; et alors là, on est vulnérable. Et c'est justement cela que l'on est en train d'apprendre au corps: c'est l'inanité de cette actuelle façon de voir et de comprendre les choses, basée sur le bon, le mauvais, le bien, le mal, le lumineux, l'obscur... toutes ces contradictions; et tout le jugement, toute la conception de la vie est basée là-dessus (la vie matérielle), et c'est pour vous apprendre l'inanité de cette base. Et je vois cela. Le travail est devenu très aigu, très persistant, comme si l'on voulait aller vite.
Il faut que même la partie pratique qui pensait avoir appris à vivre et savoir ce qu'il faut faire et comment il faut faire, il faut que ça aussi comprenne que ce n'est pas le vrai savoir et que ce n'est pas la vraie manière d'utiliser les choses extérieures.
(silence)
Il y a des choses même amusantes... Cette Conscience qui est à l'œuvre, c'est tout le temps comme si elle «taquinait» le corps; tout le temps, elle lui dit: «Tu vois, tu as cette sensation; eh bien, c'est basé sur quoi? Tu crois savoir, sais-tu vraiment ce qu'il y a derrière?», et pour toutes les petites choses de la vie de chaque minute. Et alors, le corps est comme cela (Mère ouvre de grands yeux étonnés) à se dire: «C'est vrai, je ne sais rien!» Mais sa réponse est toujours la même, il dit: «Moi, je ne prétends pas savoir: que le Seigneur fasse ce qu'il veut.» Il est comme cela. Et alors, il y a cette chose (si l'on pouvait attraper ça d'une façon permanente, ce serait bien): la non-intervention dans le travail du Seigneur (pour le dire d'une façon tout à fait simple).
(silence)
Il y a une démonstration par le fait – par l'expérience de chaque minute –, que quand on fait les choses avec cette espèce de sensation d'une sagesse acquise, ou d'une connaissance acquise, d'une expérience qui a été vécue, etc., à quel point c'est... on peut dire «mensonger» (c'est trompeur en tout cas), et qu'il y a quelque chose D'AUTRE qui est derrière, et qui se sert de ça (comme elle se sert de tout), mais qui n'est pas lié ni du tout dépendant de cette connaissance, ni de ce que nous appelons l'«expérience de la vie», ni de rien de tout cela. Ça a une vision beaucoup plus directe et beaucoup plus profonde et beaucoup plus «lointaine», c'est-à-dire qu'elle voit beaucoup plus loin, beaucoup plus large et en avant – ce que toute expérience extérieure ne donne pas... Mais ça, c'est un développement modeste, sans éclats, qui ne peut pas «faire montre» de quelque chose: c'est une toute petite chose de chaque minute – chaque minute, chaque seconde, chaque chose. Comme si, tout le temps, il y avait quelque chose qui vous montrait la façon ordinaire de vivre, de voir et de faire, et puis... la vraie façon. Les deux comme cela. Pour toutes les choses.
C'est au point que l'attitude vis-à-vis de certaines vibrations vous donne un bien-être total, ou peut vous rendre tout à fait malade! Et c'est la même vibration. Des choses comme cela, qui sont ahurissantes. Et à chaque minute, c'est comme cela – à chaque minute, pour chaque chose.
Hier, j'ai entendu la musique de Sunil (et ça a été tellement intéressant à cause de cela). Elle est très bien sa musique, et alors cette Conscience m'a montré comment... N'est-ce pas, la conscience ici prend une certaine attitude, et alors elle a toute la joie et l'harmonie; et la chose reste la même, mais alors... (Mère fait un geste de légère bascule à gauche) un tout petit changement dans l'attitude de la conscience, et ça devient presque insupportable! Des expériences comme cela, tout le temps, tout le temps... pour montrer vraiment qu'il n'y a qu 'UNE CHOSE qui ait de l'importance, c'est l'attitude de la conscience: la vieille attitude de l'être individuel (Mère fait un geste de contraction sur soi), ou ça (geste d'expansion). Ce doit être probablement (pour le mettre en mots que nous comprenions), la présence de l'ego et l'abolition de l'ego. C'est cela.
Et alors, comme je l'ai dit, pour toutes les activités les plus ordinaires de la vie, il y a la démonstration que si la présence de l'ego est tolérée (pour vous faire comprendre ce que c'est sûrement), ça peut mener vraiment à un déséquilibre de santé, et que le seul remède, c'est la disparition de l'ego – et en même temps la disparition de tout le malaise. Pour les choses que nous considérons les plus indifférentes, les plus... Et c'est pour tout, pour tout, pour tout, tout le temps, tout le temps, tout le temps, nuit et jour.
Et alors, ça vient se compliquer de toutes les incompréhensions et tous les mécontentements qui s'expriment (geste comme un tombereau qui se déverse sur Mère), comme s'ils étaient débridés et qu'ils s'exprimaient; et alors, tout cela tombe en même temps pour... pour que l'expérience soit totale et dans tous les domaines.
C'est comme si l'on démontrait pratiquement, à chaque minute, la présence de la mort et la présence de l'immortalité, comme cela (Mère fait légèrement basculer sa main à droite ou à gauche), dans les MOINDRES choses – dans toutes les choses, les moindres et les plus grandes, et d'une façon constante; et constamment, on voit... si l'on est ici ou si on est là (même geste de bascule d'un côté ou de l'autre). À chaque seconde comme si l'on était amené à choisir entre la mort et l'immortalité.
Et ça, je vois, il faut que le corps ait une préparation sérieuse et très complète pour pouvoir tenir le coup de l'expérience sans... sans vibration d'inquiétude ou de recul ou de... qu'il puisse garder sa paix et son sourire constants.
(long silence)
Il y a des choses... les plus invraisemblables.
Comme si, en toute chose, on voulait vous faire vivre la présence des opposés, pour trouver... pour trouver ce qui EST quand les opposés se joignent – au lieu de se fuir, quand ils se joignent. Ça produit un résultat. Et ça, dans la vie pratique.1
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