Mère
l'Agenda
Volume 6
(À propos du mantra que le disciple avait demandé à l'hôpital et qu'il n'a pas reçu.)
Le mantra... Tu as reçu mon mot?... Plusieurs fois pendant que je marche pour mon japa, je te l'ai envoyé avec insistance.
La vérité est que je veux te faire un beau cadeau. Seulement, pour que ce soit vraiment un beau cadeau, il faut que le mental n'intervienne d'aucune façon; autrement, je ne pourrai pas te passer le Pouvoir avec les mots.
C'est un Pouvoir qui grandit d'année en année.
Jusqu'à présent, je l'ai gardé pour moi exclusivement, mais quand tu m'as demandé, j'ai regardé s'il y avait quelque chose qui allait pour toi et j'ai, pour ainsi dire, reçu l'intimation de te donner le mien. Mais pour cela, tu sais... il faut que ce soit reçu dans un silence parfait pour que cette croissance de puissance, de pouvoir, ne soit pas arrêtée.
Tu dois savoir les mots parce que nous avons eu l'occasion d'en parler; mais ce n'est pas cela qui a de l'importance. J'avais dit... (Mère se retourne vers Sujata:) Toi, Sujata, tu entends, mais tu le gardes dans ton cœur silencieux, n'est-ce pas? Rien ne doit sortir.1
(À Satprem:) Approche ta chaise, reste tout près, sois bien tranquille... Je t'ai expliqué plusieurs fois le mantra, et finalement, un jour, j'ai écrit l'explication, parce que ça revenait et revenait et revenait, alors j'ai pensé que c'était pour que je le note (Mère cherche un papier). J'ai noté ceci:
Le premier mot représente...
Je mets «représente», parce que le mot est toujours une forme symbolique de quelque chose qui le dépasse infiniment. C'est l'une des choses que l'on doit sentir: c'est comme un moyen de contact. Un moyen de contact que l'on rend de plus en plus efficace, d'abord par la sincérité de la concentration, de l'aspiration, puis par l'usage, par l'emploi, en ayant soin de toujours garder le contact avec Ce qui est au-delà quand on l'emploie. Et ça fait comme une concentration, comme si le mot se chargeait de force, se chargeait de plus en plus comme une batterie, mais une batterie qui peut prendre indéfiniment. Alors j'ai mis (ce qui m'a paru plus exact): le premier mot «représente». Il représente:
l'invocation suprême...
C'est-à-dire Ce que l'on peut atteindre de plus haut dans l'aspiration et dans l'invocation – ce qui est le plus pur, le plus haut. «Le plus pur», je veux dire: être exclusivement sous l'influence du Divin. Alors j'ai mis:
l'invocation suprême l'invocation du Suprême.
Le premier mot, on invoque le Suprême dans tout ce que l'on peut atteindre et tout ce que l'on atteindra, et indéfiniment. Ce doit être un mot progressif.
Le deuxième mot représente: le don total de soi...
On invoque, puis on fait le don total de soi.
la soumission parfaite.
Soumission parfaite dans tous les états d'être. Ça vient progressivement, ça vient à travers des années de répétition, mais c'est cela que le mot doit représenter quand on le dit: le don total de soi à... ce Suprême, qui dépasse naturellement toute conception. La soumission parfaite, c'est-à-dire la soumission spontanée, qui ne demande ni effort ni rien – une soumission qui doit être tout à fait spontanée. Ça aussi, c'est quelque chose qui s'atteint petit à petit; c'est pourquoi j'ai dit que le mantra est progressif, en ce sens qu'il se perfectionne de plus en plus.
Le troisième mot représente: l'aspiration...
Ce n'est pas exactement ce que l'on demande, mais c'est...
Vraiment, il n'y a que le mot aspiration. C'est infiniment plus qu'espérer: il y a la certitude que ce sera comme cela, mais on n'oublie jamais que c'est ÇA que l'on veut. Et j'ajoute:
ce que la manifestation...
Vraiment, c'est la manifestation physique, terrestre; pour le moment, c'est ce qui nous concerne, mais c'est le début d'autre chose. Alors, pour le moment:
ce que la manifestation doit devenir...
Cette manifestation terrestre doit devenir:
Divine.
«Divine», on met dans le mot la réflexion de tout ce que l'on a mis dans le mot «Suprême».
Mais je l'ai dit en commençant, toute activité mentale diminue le pouvoir; ce doit être l'élan de tout l'être, avec aussi peu de pensée que possible.
Ça, je peux te le donner (Mère donne sa note). Tu peux le garder.
Les trois mots, tu les connais...
(longue concentration)
ÔM......
*
* *
(Peu après, il est question des événements du 11 février pendant l'absence du disciple: l'Ashram a été attaqué par des émeutiers, plusieurs bâtiments ont été pillés et incendiés.)
Tu n'as rien à demander ni à dire?
Il s'est passé beaucoup de choses depuis un mois ou deux mois...
Le soir de l'attaque, le onze vers sept heures du soir, un peu après, j'ai eu pour la première fois, d'une façon concrète, totale, la conscience physique – physique – de la terre. C'était un ÉTAT de conscience qui m'était donné, l'état de conscience de la terre. La conscience physique du corps n'existait plus: c'était la conscience physique de la terre. Et cette conscience physique de la terre était concentrée, son attention était concentrée sur ce petit point de Pondichéry. Tout petit point de Pondichéry. Et alors, c'était vu comme de... pas positivement de très haut mais comme une toute petite chose (geste microscopique), mais avec une exactitude de détail, du moindre élément. Et cette conscience physique de la terre était la conscience de la vérité physique de la terre – la Conscience-de-Vérité physique de la terre; c'est-à-dire exactement, la qualité de vibration de la Vérité dans la conscience physique de la terre.
Et la vision, la perception (c'était comme une perception, n'est-ce pas) n'était pas positivement de très loin parce que ça avait l'exactitude du microscope, mais c'était... (comment dire?) un objet d'observation. À ce moment-là, il y avait tous les incendies qui s'allumaient, puis le bombardement de centaines de moellons (pas des pierres: des moellons) sur toutes les fenêtres, les portes (toutes nos fenêtres, toutes les portes sont défoncées), c'est-à-dire un vacarme infernal: une bande de plusieurs centaines de gens, tous saouls, qui hurlaient, et des cris de tous les côtés. Alors ce bombardement de pierres et ces flammes qui montaient jusqu'au ciel – tout le ciel était rouge –, c'était vu (j'étais simplement assise à ma table; quand l'attaque a commencé, j'étais en train de dîner, et un peu avant que cela n'ait commencé, cette expérience est arrivée, cette conscience: je n'étais plus ce corps, j'étais la terre – la conscience-de-vérité physique de la terre exactement – avec une paix! une im-mo-bi-li-té! que l'on ne connaît pas physiquement)... et tout cela apparaissait comme un Mensonge absolu, sans aucun élément de vérité derrière. Mais en même temps, j'avais une perception microscopique (mais absolument précise et exacte) de tous les points de mensonge dans l'atmosphère de l'ashram, qui établissaient le contact.
Ce qui fait que cette conscience qui était là, si elle avait été collective, si collectivement on avait pu la recevoir, rien N'aurait touché: les pierres seraient lancées, on ne serait pas touché. C'est cela. Par exemple, il y a une pierre (un moellon) qui a été envoyée et qui a touché ma fenêtre; elle est tombée sur le toit là (faisant même une fuite d'eau que l'on a dû colmater), et j'ai vu... à cette minute-là, j'ai vu exactement dans la conscience des gens présents la vibration de Mensonge qui avait permis que la pierre touche là; et ça, en même temps, simultanément (ça ne peut pas se dire, mais simultanément), partout, sur toute la ville, et spécialement sur l'Ashram ici, je voyais tous les points, exactement la vibration de Mensonge en chacun ou en chaque chose, qui permettait le contact.
L'expérience a commencé un peu après sept heures, sept heures dix, et elle a duré jusqu'à une heure du matin.
À une heure du matin, j'ai eu un autre travail à faire, parce qu'un de nos garçons, T (c'est une graine de héros, ce garçon-là), presque seul a sauvé la clinique, mais ça lui a coûté un enfoncement du crâne. Sur le moment, on croyait que c'était fini. On m'a apporté la nouvelle, et j'ai vu quand la nouvelle est entrée, j'ai tout d'un coup senti que l'autre expérience s'en allait, et puis je devenais la Mère universelle avec toute la puissance de la Mère universelle. Et alors, ce T est devenu tout petit comme ça (geste minuscule, au creux de la main) et je le tenais dans mes mains – mais il était tout lumineux, tout lumineux – et je le berçais dans mes mains en lui disant: «Mon petit, mon tout petit, mon cher petit...», comme cela, et ça a duré plusieurs heures.
Je pense que c'est cela qui l'a sauvé. Parce que le crâne a été cassé, il s'est enfoncé; ça s'est arrêté juste à temps pour ne pas endommager le cerveau – le morceau enfoncé était dedans, on a dû opérer, couper, enlever. Ça s'est arrêté juste à temps. Et je sais que c'est cela qui l'a sauvé.
Mais l'autre expérience avait duré de sept heures à une heure du matin, jusqu'à ce que ce travail-là soit devenu nécessaire. Et PAS UNE PENSÉE dans la tête, pas une pensée – rien, un Silence total. Ça a duré comme cela jusque dans la matinée du lendemain.
Après, est revenue ma conscience ordinaire que tu connais, mais avec une perception devenue très claire des mouvements: des mouvements d'atmosphère, des formations de pensée, des possibilités vitales... Tout cela est devenu très clair.
Et la conscience absolument certaine, parce qu'il y a d'autres détails... Trois jours avant, Kâli était dans une fureur parce que les choses n'étaient pas comme elles devaient l'être sur la terre, et spécialement parmi les gens qui ont mission de préparer le monde nouveau. Elle était... elle était vraiment en fureur. Et elle voyait toutes les erreurs partout, et ça faisait une vibration tellement puissante dans l'atmosphère, comme si elle voulait commencer sa Danse; et moi, je lui disais: «Calme-toi, calme-toi...» (la journée du onze au matin, elle était ici et elle insistait sur ceci, sur cela, sur les erreurs dans le gouvernement, dans la ville, dans l'Ashram, dans ceci, dans cela – elle voyait tout), j'essayais de la calmer, mais vraiment je ne réussissais pas. Finalement, quand j'ai vu qu'il n'y avait pas moyen, j'ai dit au Seigneur: «Je Te prie, occupe-toi d'elle et fais ce qu'il faut» – je me suis déchargée de la responsabilité, je la Lui ai passée. Et alors, le soir même, l'attaque a commencé, et j'ai vu que c'était elle qui dansait. Alors j'ai pensé: vraiment, nous avions quelque chose à apprendre! Moi, j'ai vu, j'ai eu cette expérience et je SAIS maintenant (je le sais d'une façon certaine, absolue et inoubliable) quelle est la vibration de Vérité dans le Physique, quel état doit avoir le Physique pour répondre à la Vérité – pour ÊTRE la Vérité. Maintenant, je sais. Ce qui fait que j'ai appris ma leçon aussi. Mais tout le monde a appris quelque chose et j'espère qu'on ne l'oubliera pas.
Et ce matin (c'est assez intéressant), j'ai reçu une lettre de R me disant: «Ce soir-là, j'ai eu une expérience extraordinaire, mais maintenant ça commence à me paraître une impossibilité, quelque chose d'irréel...» Exactement au moment où l'expérience est venue sur moi (n'est-ce pas, quand il a reçu la nouvelle de l'attaque, la première réaction était la réaction de peur humaine, les mains qui deviennent froides, etc., mais il s'est assis, il s'est raidi, il m'a appelée), et alors il a senti venir d'en haut une Paix, quelque chose qu'il n'avait jamais senti avant, qui a envahi tout son être, qui l'a tenu tout entier et qui a duré pendant... je ne sais pas, je crois qu'il a dit jusqu'à onze heures du soir – ça a duré longtemps. Il avait connu un petit peu de ça de temps en temps, mais jamais ce n'avait été comme cela: c'était descendu en lui, ça l'avait pris tout entier. Et il dit: «Je pouvais bouger: c'était LÀ, ça ne bougeait pas, c'était en moi.» Alors j'ai pensé: «Enfin! quelqu'un a senti! au moins, il y en a un qui a senti.»
Mais à ce moment-là, je voyais si clairement dans les gens, ceux dont la vibration répondait aux vibrations de Mensonge: cette espèce de mouvement qui fait comme une trépidation dans la Matière. Donc, je connais les gens. Mais je dois dire qu'autour de moi, il y a quelqu'un, une personne qui avait la vraie vibration physique (je le savais depuis longtemps, mais là, j'ai eu une preuve concrète: c'est P), et personne ne peut le comprendre, personne ne peut le savoir, mais je le savais: physiquement, pas une réponse, comme ça (geste immuable). Alors je lui ai dit de s'occuper de la défense et de tout organiser.
Personne ne peut savoir, le mental ne peut pas comprendre ces choses-là (moi, je le savais depuis tant-tant d'années), parce que les gens ne voient que les choses extérieures, la forme extérieure, les mouvements extérieurs, les réactions extérieures, mais ils ne voient pas la possibilité intérieure. Enfin, c'est très bien, je lui ai dit immédiatement de s'occuper de la défense (d'ailleurs, il ne m'avait pas demandé, il avait commencé à s'en occuper), j'ai dit à tout le monde: «Faites ce qu'il vous dit de faire.» Il a tout organisé. N'est-ce pas, c'est quelque chose qui est comme cela (geste poings fermés, inébranlable), qui ne BOUGE PAS PHYSIQUEMENT. Mentalement, ce n'est rien, c'est facile.
C'est comme un aimant physique des vraies vibrations physiques. Ça ne passe pas par le mental ni par l'intelligence ni même par le vital: c'est, physiquement, une sorte d'aimant qui attire la Vérité physique.
*
* *
Au moment de partir, à propos de la maladie du disciple:
Ça, tu sais, la vraie Vibration aurait tout guéri. Seulement voilà...
Eh bien, justement, la seule façon de réagir contre tout ça, c'est d'attirer cette Paix. Maintenant, je la tiens. Si tu te branches...
Donne-moi ta main...
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1 Depuis notre maladie, Sujata nous accompagnait chez Mère car nous étions incapable de porter le magnétophone. Dorénavant et jusqu'à la fin, Sujata participera à toutes les entrevues.