Mère
l'Agenda
Volume 6
Douce Mère, depuis quinze jours ou trois semaines, il y a du sang qui revient.
Ils t'ont donné un traitement, tu le suis?
Oui, très scrupuleusement.
C'est embêtant.
Je n'ai pas foi en leurs traitements.
Les docteurs n'existeraient pas sans les maladies, tu comprends. Je ne dis pas que, consciemment, ils les encouragent, mais ils sont tout à fait... en termes amicaux.
C'est très subtil, mais c'est tout à fait vrai.
Je vois le même phénomène vibratoire des cellules avec la Conscience (la Conscience universelle, disons), et puis exactement la même chose vue dans une conscience médicale – si tu savais comme ça change! Ça prend un caractère, d'abord très concret (que cela n'a pas autrement) et puis très... c'est entre «fatal» et «obligatoire», je ne sais pas comment expliquer. C'est comme une sorte de Destinée rigide. Quand ils disent: «Oh! c'est une maladie» – fini. Et ce n'est pas vrai, il n'y a rien qui soit «une maladie», il n'y a pas deux cas pareils.
Alors leur atmosphère est une difficulté.
À moins que l'on ne soit en harmonie avec eux, comme cette pauvre M, par exemple. Tu sais, elle a eu l'impression qu'elle entrait dans un paradis quand elle est allée à l'hôpital de Vellore! Alors, à elle, ça lui fera beaucoup de bien, c'est harmonieux (!)
Mais comment cela peut être harmonieux!
Mon petit, les gens qui ont du vice sont en harmonie avec le vice; les gens qui sont méchants sont en harmonie avec la méchanceté.
Oui, mais elle n'est pas comme cela.
Elle est infirmière – elle est en harmonie avec les docteurs. Et ça lui a redonné du courage. Parce qu'ils ont dit qu'elle était venue à temps – juste à temps – et qu'ils la sauveraient, alors maintenant elle est pleine de confiance. J'ai reçu une lettre, elle m'a écrit une lettre: «J'ai repris courage à la vie, je suis tranquille et je suis sûre que je vais guérir, la fièvre est tombée, etc.»
Tout est relatif dans ce monde, il n'y a pas deux cas pareils, il n'y a pas deux «maladies» pareilles – il n'y a pas un absolu de bien et il n'y a pas un absolu mauvais.
Les hôpitaux m'étouffent. Je tombais de plus en plus malade là-dedans.
Oui. C'est à l'hôpital ici que ce que tu avais (c'est-à-dire un petit désordre intérieur) est devenu une maladie. C'est ici. Et à Vellore, cela s'est aggravé.
Oui, c'est vrai.
C'est comme cela. Je le sens bien, n'est-ce pas; j'ai en moi la possibilité de cinq ou six maladies fatales (je le sais par les vibrations); si j'avais le malheur, non pas d'entrer dans un hôpital (!) mais même de me confier à un docteur, j'aurais des maladies inguérissables.
Et ce n'est contre aucun docteur en particulier (eux-mêmes souffrent de l'atmosphère sans le savoir): c'est l'atmosphère médicale.
La maladie est leur raison d'être; s'il n'y avait pas de maladies, il n'y aurait pas de docteurs. Ce ne serait pas nécessaire, ce serait quelque chose d'autre; ils pourraient devenir quelque chose d'autre, mais pas docteurs; quelque chose d'autre de très utile, je ne sais pas: des savants de la construction humaine, des savants de l'utilisation de la nourriture, des savants de toutes sortes de choses qu'il est bon de savoir, mais pas «docteurs» – docteur, c'est pour guérir des maladies, par conséquent il faut qu'il y ait des maladies pour qu'il y ait des docteurs.
Et je ne suis pas très sûre qu'avant les docteurs, il y avait des maladies – il y avait des désordres, il y avait des accidents, il y avait toutes sortes de choses parce que cela existe, mais il n'y avait pas l'ÉTIQUETTE «maladie». Et plus les docteurs deviennent savants (c'est-à-dire plus ils connaissent leur métier), plus les maladies deviennent (Mère ferme son poing) solides, fixes. Et alors ils ont l'utilité de les guérir – s'il n'y avait pas de maladies, ils ne seraient pas ici.
Ils devraient être des savants de la vie... Les Chinois ont eu un petit peu cette idée. Je ne sais pas comment c'est maintenant, mais dans le temps, chaque famille avait un docteur (un docteur pouvait avoir beaucoup de familles à soigner), et le docteur n'était payé que quand tout le monde était en bonne santé – s'il y avait un malade, on cessait de le payer! (rires) Voilà.
*
* *
Peu après, le disciple classe d'«anciens» Agenda.
Qu'est-ce que c'est? des vieux?
C'est de 1964 (l'année dernière).
Ce doit être de l'histoire ancienne. Ça ne paraît pas vieilli, non?
Non, pas du tout!
(Mère rit)
Pas du tout, du tout. Non-non!
Moi, j'ai l'impression que c'est d'un passé lointain.
Pas du tout.
Tu sais, tous les problèmes que le mental humain a discutés et résolus, enfin tout ce qui est à la base des religions, philosophies, yoga, etc., les grandes idées sur le comment et le pourquoi – idées universelles –, tout cela qui était résolu depuis fort longtemps... ça revient ici (Mère désigne son corps). Ça revient avec l'intensité, l'acuité de quelque chose de tout à fait nouveau et de tout à fait inconnu: pourquoi la vie? pourquoi cette création? quel est le sens de tout cela? Et avec une connaissance intime et douloureuse de toutes les misères de la Matière, de toutes les stupidités de la Matière, de toutes les obscurités, de tout cela – pourquoi tout cela? pourquoi tout ça? Et puis, pas content: à quoi ça sert?
C'est admirable.
Et la réponse vient, mais alors vient avec une solidité, une certitude extraordinaires – c'est extraordinaire. Pourquoi la création... pourquoi la création? Et la réponse n'est pas du tout des phrases comme dans les philosophies (Dieu merci! il n'y a rien de tout cela): c'est juste des vibrations.
Et alors, tout d'un coup, dans tout ce chaos, cette lutte, cette friction, cette souffrance, et cette ignorance et cette obscurité et cet effort et ceci, cela (oh! bien pire que quand cela se passe dans le mental: c'est là [dans le corps] et c'est une question de, oui, de vie et de mort dans le vrai sens, c'est-à-dire d'existence ou de non-existence, de conscience ou d'inconscience totale... et puis ce que ça coûte pour savoir quelque chose!), et puis, tout à coup, rien qu'une goutte... ce n'est même pas une goutte (ce n'est pas liquide!), ce n'est même pas un éclair, c'est... oui, c'est une vibration, c'est une autre vibration: lumineuse, tellement merveilleusement douce, paisible, puissante, absolue. C'est comme quelque chose qui s'allume (geste comme un éclatement ou une pulsation lumineuse). Et puis il n'y a plus besoin de discussion ni d'explication ni de rien: on a compris – c'est pour devenir conscient de ça, c'est pour vivre ça.
C'est arrivé ce matin.
Ça a commencé hier et ça s'est développé.
Ça, mon petit... Ah! comme les explications sont pauvres – pauvres, incomplètes, sans force convaincante. Mais juste ça, une vibration de ça, et alors on comprend tout.
Et j'ai l'impression, très forte impression (pour le moment je n'ai pas encore de preuves) que c'est d'une contagion absolue. Tu comprends. Alors c'est fini d'avoir à expliquer, d'avoir à lutter, d'avoir à... ouf! – c'est contagieux.
Apporter ça et le garder. Le tenir, savoir le tenir. C'est fantastique! Et alors ce n'est plus qu'une question de réceptivité, c'est tout. Et la réceptivité doit être à la mesure de la bonne volonté (pour le moment, c'est ce que dit la vieille expérience, je n'ai pas de preuves), mais la réceptivité doit être à la mesure de la bonne volonté ou de l'aspiration (mais les deux sont très semblables), de ce quelque chose qui veut autre chose. Les gens qui sont très contents, très satisfaits et... (ça, c'est une illustration intéressante) et qui ont réalisé une harmonie dans la vie (il y a des gens qui ont réalisé une harmonie dans cette vie: tout paraît si harmonieux, si confortable, et tout ce qu'ils font, ils le réussissent, tout ce qui leur arrive est...), ceux-là, je crois qu'ils ont encore beaucoup de choses à faire avant de pouvoir recevoir.
Ça (cette vibration), cela n'a rien à voir, rien à voir avec tout ce chemin, ce long-long-long chemin que l'on a parcouru pour se préparer, et à quels coups! oh!... Ça (geste, comme un éclatement lumineux), et puis tout le reste n'importe plus.
Mais ce n'est pas mental. Pour le moment, ça n'a rien à voir avec la pensée.
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