SITE DE SRI AUROBINDO ET LA MÈRE
      
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Mère

l'Agenda

Volume 5

4 mars 1964

Alors, comment ça va?

Et toi?

Des expériences...

Je n'ai rien à dire. C'est à la fois trop et trop peu – trop de choses, de détails, d'innombrables petites observations, d'innombrables petits changements, mais rien de sensationnel, rien qui fasse un «beau tableau», non. Mais d'abord, je t'avais demandé de me dire si tu avais vu quelque chose.

J'ai vu quelque chose, mais je ne crois pas que ce soit bien intéressant, ni collectif. C'était comme si je me trouvais dans un énorme avion, très puissant, qui réussissait à décoller (d'ailleurs, ce décollage me donnait une sensation très plaisante), il décollait mais il volait en rase-motte, c'était dangereux. D'abord, l'espace était quand même libre devant nous, mais c'était très bas, on frôlait les arbres; puis, tout d'un coup, il y avait des tas de constructions qui sont venues se mettre dans le passage, et il y avait en particulier une énorme tour, comme une tour d'église, d'une couleur très noire. Je ne sais pas comment cela se fait, mais l'avion (ou la force) est rentré là-dedans – c'est assez bizarre –, et là-dedans, c'était tout à fait obscur; il y avait seulement une sorte de trouée dans un mur, et derrière ce trou, une tache de ciel bleu. C'est invraisemblable, mais l'avion a essayé de passer par là, et au moment où nous allions passer, cette espèce de lucarne était couverte par un verre très épais qui empêchait de passer; alors je me souviens qu'avec un instrument pointu, je cassais toute cette vitre pour pouvoir passer. On a passé, mais c'était trop petit, l'ouverture était trop étroite pour laisser passer cet énorme avion. Après, c'est très confus; je me souviens seulement que dans un endroit caché, il y avait comme un énorme ciboire d'or, qui était très beau – c'était caché. Mais tout le reste est très confus.

Ah! mais c'est intéressant...

(silence)

Moi, je n'ai eu qu'une chose: le matin du 29, je me suis réveillée (pas «réveillée», enfin levée) dans la conscience de ce que les rishis védiques appelaient la «conscience droite», celle qui vient directement du Seigneur – la Conscience-de-Vérité, au fond. C'était absolument tranquille et calme, mais avec une sorte de super-sensation de bien-être absolu. Bien-être, sécurité – oui, une sécurité –, une paix indescriptible, sans le contraste des opposés. Et ça a duré à peu près trois heures, d'une façon continue, établie, sans effort (je ne faisais aucun effort pour le garder). Et j'avais seulement la perception certaine que c'était ce qu'ils appelaient la conscience de vérité et d'immortalité, avec une perception (une observation plutôt) assez claire, assez précise, de la façon dont cela devient le «crookedness» (tu connais leur mot).

Je n'avais pas essayé d'avoir cette expérience, je n'y avais jamais pensé ni rien – c'est venu comme une chose massive, et c'est resté. Mais j'avais l'impression que c'était individuel: je n'ai pas eu l'impression que c'était quelque chose qui descendait sur la terre. J'ai eu l'impression que c'était quelque chose qui m'était donné, qui était donné à ce corps; c'est pour cela que je n'y ai pas attaché beaucoup d'importance. L'impression que c'était une grâce faite à ce corps. Et ce n'est parti – ce n'est pas parti, mais ça a été voilé petit à petit et très lentement par... n'est-ce pas, ce chaos de travail, qui n'a jamais été aussi chaotique et précipité à la fois.1 Pendant à peu près deux semaines, ça a été effroyable. On n'en est pas encore sorti. Ça a voilé, POUR MOI, l'état. Mais je sentais bien que c'était une chose DONNÉE à ce corps.

Pour la méditation du 29, je me suis aperçue (j'ai regardé), je me suis aperçue que depuis à peu près deux jours avant, l'atmosphère était pleine de scintillements d'étoiles blanches, comme de la poudre – un poudroiement d'étoiles blanches.2 Et j'ai vu que c'était comme cela depuis trois jours. Et au moment de la méditation, c'est devenu extrêmement intense. Mais ça, c'était répandu, c'était partout.

C'était comme s'il n'y avait pas autre chose que des points qui scintillaient – des points brillants comme du diamant. C'était comme du diamant qui scintillait partout-partout-partout. Et ça avait tendance à venir de haut en bas. Et ça a duré non seulement pendant des heures mais des jours; d'autres l'ont vu (pourtant, je n'ai rien dit à personne), d'autres l'ont vu et m'ont demandé ce que c'était.

Mais ça n'avait pas un caractère foudroyant ou magnifique ou étonnant ou... rien de ce genre-là, rien de spectaculaire, rien qui pouvait donner l'impression d'une «grande expérience» – très tranquille, mais très-très assuré. Très tranquille.

Une fois que ça a été fini, après le balcon,3 quand je suis revenue du balcon, spontanément j'ai dit: «Eh bien, c'est bon, ce sera pour dans quatre ans.»4

Quelque chose en moi attendait... je ne sais quoi, qui ne s'est pas produit – peut-être quelque chose qui aurait fait du grabuge!

C'était très tranquille, très paisible – très tranquille, surtout très tranquille, et rien de merveilleux, de miraculeux, rien de tout cela. Alors j'ai dit: «Bon, on attendra quatre ans, ce sera pour dans quatre ans», mais je ne sais pas quoi... le quelque chose que j'attendais, qui ne s'est pas produit.

Mais la vie extérieure, matérielle, était devenue très difficile – il y avait 3.000 personnes de plus qui venaient du dehors. Alors ça a créé une sorte de confusion dans l'atmosphère, qui n'est pas finie.

(silence)

J'ai entendu dire par certaines personnes qu'un grand nombre de petits miracles s'étaient produits, mais je n'ai pas écouté, ça ne m'intéresse pas (on me raconte et je pense à autre chose). C'est possible: l'atmosphère était très chargée. Il est possible que dans la conscience des gens, ça se traduise par des petits phénomènes – un tas de petits phénomènes qu'ils appellent «miraculeux», qui pour moi sont d'une simplicité enfantine et élémentaire: c'est «comme ça».

(silence)

Ta vision... évidemment, ce sont les constructions mentales qui barrent la route de l'envol – c'est évident. Mais ce n'est pas une expérience individuelle: c'est une chose collective.

C'était très noir, et c'était une église... comme une tour d'église. Mais ce ciboire d'or, qu'est-ce que c'est? Il était très joli, d'ailleurs; c'était beau, mais caché.

Mais c'est vrai, c'est comme cela, n'est-ce pas.

Ce doit être la réalisation supramentale, qui est cachée, qui est encore enfouie sous l'Inconscience.

Au moment où j'ai vu ce ciboire d'or, c'est très confus mais il y avait quelqu'un avec moi (je ne sais pas qui, je ne le voyais pas) et je lui ai dit: «Mais vous avez vu, ce beau ciboire!» Il m'a répondu «Non», et je savais qu'il avait vu, puis j'ai compris que s'il disait qu'il avait vu, quelque chose de mauvais se produirait,5 les gens viendraient ou je ne sais quoi, enfin il ne fallait pas que l'on sache qu'il avait vu aussi.

Il ne fallait pas que l'on sache que c'était là.6

(long silence puis méditation)

L'impression que les cellules du corps sont constamment soumises à une espèce de pilonnage – ça n'arrête pas, nuit et jour. Depuis que je t'en ai parlé l'autre fois, c'est tout le temps comme cela.

Ça semble être un travail sans fin.

(long silence)

Aujourd'hui, le docteur s'en va en Amérique se faire opérer du cerveau.7 Ce n'est pas du tout une affaire sûre, c'est trop nouveau, il y a encore trop d'éléments inconnus.

Il y a eu tout un ensemble de choses vraiment très intéressantes avec lui, mais c'est comme un travail microscopique, alors ça ne peut pas se dire... Par exemple, la façon dont les aura sont mélangées, les vibrations, c'est très intéressant.

J'espère qu'il va s'en tirer?

Il m'a dit qu'il n'avait pas peur.

Mais au fond, c'est tout à fait une aventure vers l'inconnu, parce que rien ne dit que l'on ne guérisse pas une chose aux dépens d'une autre... Tu comprends, quand on se met à intervenir dans le cerveau!

Il est évident qu'un jour viendra où ces interventions seront d'un usage courant, mais pour le moment il y a encore beaucoup d'inconnues.

Mais parce que nous avons vécu constamment ensemble, il y avait tout un mélange d'atmosphères (la sienne et celle de Mère) et quand il a voulu tirer ça... (parce qu'il ne sait pas encore rester partout à la fois – il n'y a pas beaucoup de gens qui savent le faire, alors ils tirent leur atmosphère et ça fait une sorte de dislocation de beaucoup de choses et...) Il ne se l'avoue pas à lui-même, mais il est très bouleversé.

C'est une aventure.

L'enregistrement du son fait par Satprem    

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1 Trois mille visiteurs sont venus pour les 21 et 29 février.

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2 Ceci nous rappelle la «pluie d'étoiles blanches» vue par Sujata, conversation du 29 janvier.

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3 Le soir du 29, Mère est apparue au balcon.

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4 Pour le troisième anniversaire de la Manifestation supramentale.

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5 Peut-être y a-t-il un rapprochement à faire avec ce «quelque chose qui ferait du grabuge», dont parlait Mère.

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6 Il existe un enregistrement de cette conversation. La suite n'a pas été conservée.

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7 Il s'agit d'enfoncer une «aiguille» dans un endroit très déterminé du cerveau afin d'y détruire un ensemble de cellules contagieuses.

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