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SRI AUROBINDO

Lettres sur le Yoga

Volume 2. Section 2

4. Les bases de la sâdhanâ

II  III  IV

1115

Il n'est pas possible d'établir une base de yoga si le mental est agité. La première chose requise est le calme dans le mental. De plus, la dissolution de la conscience personnelle n'est pas le premier but du yoga; le premier but est d'ouvrir la conscience personnelle à une conscience spirituelle supérieure, et pour cela aussi, un mental calme est de première nécessité.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1116

La première chose à faire dans la sâdhanâ est d'établir dans le mental une paix et un silence stables. Autrement, vous pouvez avoir des expériences, mais rien ne sera permanent. C'est dans un mental silencieux que la vraie conscience peut s'édifier.

Un mental tranquille ne signifie pas qu'il n'y aura pas du tout de pensées ni de mouvements mentaux, mais que ceux-ci resteront à la surface et que vous sentirez votre être véritable au-dedans, séparé d'eux, observant sans se laisser entraîner, capable de les surveiller et de les juger, de rejeter tout ce qui doit être rejeté et d'accepter et de conserver tout ce qui est conscience vraie et expérience vraie.

La passivité mentale est bonne, mais veillez à n'être passif qu'à la Vérité et au contact de la divine Shakti. Si vous êtes passif aux suggestions et aux influences de la nature inférieure, vous ne serez pas capable de progresser, ou bien vous vous exposerez à des forces adverses qui peuvent vous mener très loin du vrai chemin du yoga.

Aspirez à ce que la Mère vous donne cette tranquillité et ce calme stables dans le mental et ce sens constant de l'être intérieur en vous, qui se tient en arrière de la nature extérieure et tourné vers la Lumière et la Vérité.

Les forces qui font obstacle à la sâdhanâ sont les forces de la nature inférieure mentale, vitale et physique. Derrière elles se trouvent les pouvoirs adverses des mondes mental, vital et du physique subtil. C'est seulement quand le mental et le cœur ont pris une orientation unique et se sont concentrés dans une aspiration exclusive vers le Divin que l'on peut lutter avec succès contre les pouvoirs adverses.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1117

Le premier pas est d'avoir un mental tranquille. Acquérir le silence est le pas suivant; mais la tranquillité doit être là d'abord. Et par mental tranquille, j'entends une conscience mentale au-dedans qui voit les pensées venir à elle et se mouvoir, mais qui, elle-même, ne sent pas qu'elle pense, ne s'identifie pas avec les pensées et ne les appelle pas siennes. Des pensées et des mouvements peuvent traverser le mental, comme des voyageurs apparaissent, venus d'ailleurs, et passent à travers une contrée silencieuse; le mental tranquille les observe, ou ne prend pas la peine de les observer, mais dans l'un et l'autre cas, il ne devient pas actif et ne perd pas sa tranquillité. Le silence est plus que la tranquillité. Il peut être acquis en bannissant totalement du mental intérieur les pensées, en les gardant muettes ou complètement en dehors. Mais il s'établit plus facilement par une descente d'en haut: on le sent descendre, pénétrer et occuper ou entourer la conscience personnelle qui tend alors à s'immerger dans le vaste silence impersonnel.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1118

Tranquilliser le mental de sorte qu'aucune pensée ne vienne n'est pas facile et prend généralement du temps. L'essentiel est de sentir dans le mental une tranquillité telle que si des pensées viennent, elles ne le troublent pas, ne retiennent pas son attention, ne l'obligent pas à les suivre, mais simplement le traversent et s'en vont. Le mental devient d'abord le témoin du passage de la pensée et non plus le penseur; ensuite il devient capable de ne pas observer les pensées; il les laisse passer sans les remarquer et se concentre en lui-même ou sur l'objet de son choix sans difficulté.

Deux choses principales doivent être acquises pour fonder la sâdhanâ: l'ouverture de l'être psychique et la réalisation du Moi au-dessus. Pour l'ouverture de l'être psychique, la concentration sur la Mère et l'offrande de soi à la Mère sont la voie directe. La croissance de la bhakti que vous ressentez est le premier signe du développement psychique. Le sentiment de la présence de la Mère ou de sa force ou le souvenir du soutien et de la force qu'elle vous a apportés est le suivant. Plus tard l'âme au-dedans acquiert une aspiration et une perception psychique actives et guide le mental vers les pensées justes, le vital vers les mouvements et les sentiments justes, indiquant et rejetant tout ce qui doit être écarté et orientant l'être tout entier, dans tous ses mouvements, vers le Divin seul. La paix et le silence du mental sont la première condition de la réalisation du Moi. Ensuite on commence à sentir la délivrance, la liberté, l'immensité, à vivre dans une conscience silencieuse, tranquille, que rien n'affecte, existant partout et en tout, une avec le Divin ou unie à Lui. D'autres expériences viennent chemin faisant ou peuvent venir, comme l'ouverture de la vision intérieure, le sens de la Force agissant au-dedans, divers mouvements et phénomènes de cette action, etc. On peut aussi percevoir des montées de la conscience et des descentes de la Force, de la Paix, de la Béatitude ou de la Lumière d'en haut.

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1119

Le silence est toujours une bonne chose; mais par tranquillité du mental, je ne veux pas dire un silence complet. Je veux dire un mental exempt de trouble et de perturbations, ferme, léger et content, afin de pouvoir s'ouvrir à la Force qui changera la nature. L'important est de se débarrasser de l'habitude de se laisser envahir par des pensées troublantes, des sentiments faux, des confusions d'idées, des mouvements malheureux. Tout cela trouble la nature et l'obscurcit et rend difficile la tâche de la Force; quand le mental est tranquille et en paix, la Force peut travailler plus facilement. Il devrait vous être possible de voir sans être bouleversé ni déprimé les choses qu'il faut changer en vous; le changement en serait facilité.

Les Bases du Yoga, chapitre L Traduction de la Mère.

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1120

La différence entre un mental vide et un mental calme est celle-ci: lorsque le mental est vide, il n'y a pas de pensées, pas de conception, pas d'action mentale d'aucune sorte, sauf une perception essentielle des choses sans formation d'idées; tandis que dans le mental calme, c'est la substance de l'être mental qui est immobile, si immobile que rien ne la trouble. Si des pensées ou des activités se produisent, elles ne s'élèvent pas du tout du mental, elles viennent du dehors et traversent le mental comme un vol d'oiseaux traverse le ciel dans l'air immobile. Ils passent, ne troublent rien, ne laissent pas de trace. Même si un millier d'images ou les événements les plus violents traversent le mental, son immobilité paisible demeure, comme si la texture même du mental était faite d'une substance de paix éternelle et indestructible. Un mental qui a acquis ce calme peut commencer à agir, même intensément et puissamment, mais il conservera son immobilité fondamentale, ne produisant rien de lui-même mais donnant une forme mentale à ce qu'il reçoit d'en haut, sans rien y ajouter du sien, avec calme et impartialité, et pourtant dans la joie de la Vérité et dans la puissance et la lumière heureuses de la transmission.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1121

Il n'est pas indésirable pour le mental de devenir silencieux, d'être libre de toute pensée et immobile, car c'est le plus souvent quand le mental tombe dans le silence que se produisent la complète descente d'une vaste paix venant d'en haut et, dans cette vaste tranquillité, la réalisation du Moi silencieux au-dessus du mental, partout déployé dans son immensité. Seulement dès qu'il y a paix et silence mental, le vital du mental essaie de se précipiter pour occuper la place, ou bien le mental mécanique essaie, dans le même but, de soulever sa ronde de pensées habituelles et triviales. Le sâdhak doit avoir soin de rejeter et de faire taire ces intrus afin que, au moins pendant la méditation, la paix et la quiétude du mental et du vital soient complètes. Le meilleur moyen d'y parvenir est de garder une volonté forte et silencieuse. Cette volonté est celle du Pourousha derrière le mental; quand le mental est en paix, quand il est silencieux, on peut devenir conscient du Pourousha, lui aussi silencieux et séparé de l'action de la nature.

Être calme, stable, établi en l'esprit, dhīra, sthira, avoir cette quiétude du mental, cette séparation du Pourousha intérieur et de la Prakriti extérieure est très utile, presque indispensable. On ne peut pas être calme et fixé en l'esprit tant que l'être est soumis au tourbillon des pensées ou au tumulte des mouvements vitaux. S'en détacher, se tenir en arrière, les sentir séparés de soi est indispensable.

Pour découvrir l'individualité vraie et l'installer dans la nature, deux choses sont nécessaires: d'abord, la conscience de son propre être psychique derrière le cœur; ensuite cette séparation du Pourousha et de la Prakriti. Car le véritable individu est derrière, voilé par les activités de la nature extérieure.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1122

C'est simplement parce que vous êtes plein d'activités et de fréquentations vitales et mentales. On doit acquérir le pouvoir de tranquilliser le mental et le vital, sinon à tout moment dès le début, du moins à volonté, car le mental et le vital recouvrent l'être psychique ainsi que le moi (Âtman) et pour atteindre l'un ou l'autre, il faut entrer en eux en traversant ce voile; mais s'ils sont tout le temps actifs et que vous êtes sans cesse identifié à leurs activités, le voile sera toujours là. Vous pouvez aussi vous détacher et regarder ces activités comme si elles n'étaient pas les vôtres, mais une action mécanique de la Nature que vous observez à la manière d'un témoin indifférent. Vous pourrez alors commencer à percevoir un être intérieur qui est séparé, calme et distinct de la Nature. Ce sera peut-être le Pourousha intérieur, mental ou vital, et non le psychique, mais accéder à la conscience du manomaya puruṣa et du prāṇamaya puruṣa intérieurs est toujours un pas vers le dévoilement de l'être psychique.

Oui, il vaudrait mieux acquérir la parfaite maîtrise de la parole: c'est un pas important vers la vie intérieure et le développement d'une vraie conscience intérieure et yoguique.

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1123

Souvenez-vous d'abord que la première condition d'une sâdhanâ sans danger est la tranquillité intérieure que donne la purification de l'agitation mentale et vitale. Souvenez-vous ensuite que de sentir la présence de la Mère pendant l'action extérieure est déjà un grand pas, qui ne peut se faire sans un progrès intérieur considérable. Le besoin que vous sentez si fortement, mais que vous ne pouvez définir, est probablement une perception constante et vive de la force de la Mère travaillant en vous, descendant d'en haut et prenant possession des différents plans de votre être. C'est souvent un état qui précède le double mouvement d'ascension et de descente; cela viendra sûrement en son temps. Ces choses peuvent prendre longtemps avant de commencer visiblement, surtout quand le mental est accoutumé à être actif et n'a pas l'habitude du silence. Lorsque le voile de cette activité est là, beaucoup de travail doit se faire derrière l'écran mobile du mental, et le sâdhak croit que rien ne se passe tandis qu'en fait une grande préparation s'effectue. Si vous voulez un progrès plus rapide et plus visible, ce ne peut être qu'en amenant le psychique au premier plan, par un constant don de soi. Aspirez intensément, mais sans impatience.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1124

Restez dans la tranquillité et ne vous inquiétez pas si, pendant un certain temps, c'est une tranquillité vide; souvent la conscience est comme un récipient qui doit être vidé de son contenu mélangé ou indésirable; elle doit rester vide momentanément, jusqu'à ce qu'elle puisse s'emplir de choses nouvelles et vraies, droites et pures. Il faut seulement éviter de remplir le vase de son ancien contenu bourbeux. Dans l'intervalle, attendez, ouvrez-vous vers le haut, appelez très tranquillement et continûment, sans ardeur trop impatiente, afin que la paix pénètre le silence, et lorsque la paix sera là, demandez la joie et la présence.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1125

Le calme, même quand il semble au début être une chose négative, est si difficile à atteindre, que d'en avoir tant soit peu doit être considéré comme un grand pas en avant.

En réalité, le calme n'est pas une chose négative; il est la nature même du Sat-Pourousha et le fondement positif de la conscience divine. Quoi que l'on cherche, quoi que l'on trouve, il faut conserver le calme. Même la Connaissance, le Pouvoir, l'Ânanda, s'ils viennent et ne trouvent pas ce fondement, sont incapables de rester et doivent se retirer jusqu'à ce que la pureté et la paix divines du Sat-Pourousha soient établies d'une façon permanente.

Aspirez aux autres éléments de la divine conscience, mais avec une aspiration calme et profonde. Elle peut être ardente autant que calme, mais elle ne doit pas être impatiente, agitée ni pleine de véhémence radjasique.

C'est seulement dans un être et un mental tranquilles que la Vérité supramentale peut édifier sa vraie création.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1126

D'abord, aspirez et priez pour que la Mère vous donne la tranquillité dans le mental, la pureté, le calme et la paix, une conscience éveillée, l'intensité de la dévotion, l'énergie et la capacité spirituelle de faire face à toutes les difficultés intérieures ou extérieures et d'aller jusqu'au bout du yoga. Si la conscience s'éveille et si la dévotion et l'intensité d'aspiration sont là, il sera possible au mental, pourvu qu'il prenne la tranquillité et la paix, de croître en connaissance.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1127

Être calme, paisible et tranquille est la première condition non de la sâdhanâ, mais de la siddhi. Rares sont ceux (très rares: un, deux, trois, quatre parmi cent sâdhak) qui peuvent l'acquérir dès le début. La plupart doivent se préparer longuement avant de s'en approcher tant soit peu. Même plus tard, quand ils commencent à sentir la paix et le calme, il leur faut du temps pour les établir: ils oscillent entre la paix et les perturbations pendant assez longtemps avant que toutes les parties de la nature aient accepté la vérité et la paix. Vous n'avez donc aucune raison de croire que vous ne pouvez ni progresser ni réussir. Vous vous heurtez à une grande difficulté dans une partie de votre nature qui a pris l'habitude de s'ouvrir à certains sentiments: séparation de la Mère, attachement à la famille, et qui n'est pas disposée à s'en défaire; c'est tout. Mais tout le monde et même, parmi les sâdhak qui sont ici, ceux qui réussissent le mieux, rencontre des difficultés tout aussi obstinées dans cette partie de la nature. Il faut persévérer jusqu'à ce que la lumière y remporte la victoire.

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1128

On peut avancer même si la paix n'est pas là; la tranquillité et la concentration sont en revanche nécessaires. La paix est nécessaire pour que les états supérieurs se développent.

II

1129

Les mots: "Paix, calme, tranquillité, silence", ont chacun leur nuance de signification, mais il n'est pas facile de les définir.

La paix — śānti.

Le calme — sthiratā.

La tranquillité — acañcalatā.

Le silence — niścala-nīravatā.

La tranquillité est un état dans lequel il n'y a ni agitation ni trouble.

Le calme est un état tranquille et inébranlable qu'aucun trouble ne peut affecter; c'est un état moins négatif que la tranquillité.

La paix est un état encore plus positif; elle porte en soi le sens d'une délivrance et d'un repos stables et harmonieux.

Le silence est un état où il ne se produit pas de mouvements du mental ni du vital, ou dans lequel règne une grande immobilité qu'aucun mouvement de surface ne peut percer ni altérer.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1130

La tranquillité est plutôt négative; c'est l'absence de trouble.

Le calme est une tranquillité positive qui peut exister en dépit de perturbations superficielles.

La paix est un calme qui s'est approfondi au point de devenir quelque chose de très positif, presque équivalent à un Ânanda tranquille et sans vagues.

Le silence est l'absence de tout mouvement de pensée ou de toute autre vibration d'activité.

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1131

Le calme est une tranquillité forte et positive, ferme et solide; la tranquillité ordinaire est simplement négative, c'est seulement l'absence de trouble.

La paix est une tranquillité profonde qu'aucun trouble ne peut affecter; c'est une tranquillité qui s'accompagne d'un sentiment de sécurité et de libération stables.

Dans le silence complet, ou bien il n'y a pas de pensées, ou bien les pensées viennent, mais elles sont ressenties comme des choses qui viennent du dehors et ne troublent pas le silence.

Le silence du mental, la paix et le calme dans le mental sont très voisins et l'un amène l'autre.

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1132

La tranquillité est un état dans lequel le mental, ou le vital, n'est ni troublé, ni agité, ni entraîné, ni encombré par les pensées et les sentiments. En particulier, quand l'un ou l'autre est détaché et les regarde comme un mouvement à la surface, nous disons que le mental, ou le vital, est tranquille.

Le calme est un état plus positif; ce n'est pas seulement absence d'agitation, de suractivité ou de perturbation. Quand il y a une tranquillité claire, ou vaste, ou forte, que rien ne trouble ni ne peut troubler, nous disons que le calme est établi.

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1133

Ces mots [tranquillité et immobilité] sont des termes généraux; leur sens est général et non spécifiquement yoguique. La quiétude, le calme et la paix peuvent tous être qualifiés de tranquillité; le silence s'apparente à ce que l'on entend par immobilité.

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1134

C'est le silence du mental et du vital, le mot silence signifiant ici non seulement le cessation de la pensée, mais aussi l'immobilité de la substance mentale et vitale. Il y a différents degrés de profondeur dans cette immobilité.

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1135

Le premier est le calme fondamental ordinaire de l'âdhâr individuel; le second est le calme fondamental et sans limite de la conscience cosmique; ce calme est permanent, qu'il soit séparé de tous les mouvements ou les soutienne.

C'est le calme de l'Âtman, du Moi au-dessus, silencieux, immuable et infini.

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1136

La paix est plus positive que le calme; il peut exister un calme négatif qui est simplement une absence de trouble ou de perturbation, mais la paix est toujours quelque chose de positif qui n'apporte pas seulement, comme le calme, une libération, mais aussi un certain bonheur ou Ânanda qui lui est propre.

Il y a aussi un calme positif, quelque chose qui s'oppose à tout ce qui cherche à troubler, qui n'est pas transparent et neutre comme le calme négatif, mais fort et massif.

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1137

Dans la paix, à l'immobilité ressentie s'ajoute une harmonie qui donne un sentiment de libération et de plénitude.

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1138

Shânti est la paix ou le calme, ce n'est pas l'Ânanda. L'Ânanda peut, c'est évident, être calme.

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1139

La paix est un signe de moukti. L'Ânanda se rapproche plutôt de la siddhi.

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1140

La paix n'est pas forcément grave ou sans joie: en elle, rien ne doit être grisâtre, mais l'allégresse, la joie ou le sentiment de légèreté qui accompagnent la paix doivent obligatoirement être quelque chose d'intérieur, qui existe en soi ou qui découle d'un approfondissement de l'expérience; elles ne peuvent pas, comme le rire dont vous parlez, être provoquées par une cause extérieure (quelque chose d'amusant, de réjouissant, etc.) ni en dépendre.

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1141

La joie doit être, elle aussi, profondément intérieure; alors elle n'entrera pas en conflit avec les profondeurs de la paix et de la conscience intérieure.

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1142

Elles [la paix et la patience] vont ensemble. En étant patient face à toutes sortes de tensions, vous jetez les bases de la paix.

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1143

C'est [la pureté] plutôt un état qu'une substance. La paix aide à acquérir la pureté, puisque dans la paix les influences perturbatrices disparaissent et que la pureté consiste précisément à réagir à la seule Influence divine et à n'avoir aucune affinité avec d'autres mouvements.

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1144

Être pur, c'est n'accepter aucune autre influence que la seule influence du Divin.

Lumières sur le Yoga, chapitre III. Traduction de la Mère.

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1145

La pureté, c'est l'absence de souillure ou de mélange. La Pureté divine est celle à laquelle ne se mêle aucun des mouvements ignorants et troubles de la nature inférieure. Dans le langage courant, le mot pureté est employé d'ordinaire pour désigner l'absence de passions et d'impulsions sexuelles.

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1146

L'expérience de la Pureté divine est plus vaste et plus totale que celle du psychique.

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1147

La pureté ou l'impureté dépend de la conscience; dans la conscience divine tout est pur, dans l'ignorance tout est capable d'impureté, non seulement le corps ou une partie du corps, mais aussi le mental, le vital et tout le reste. Seul le moi et l'être psychique restent toujours purs.

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1148

Un mental pur est un mental calme et dépourvu de pensées mutiles ou troublantes.

Nouvelles Lumières sur le Yoga, chapitre IV.

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1149

Un mental tranquille est un mental que rien ne trouble, qui n'est pas agité, qui ne vibre pas d'un besoin constant d'activité mentale.

Vous, vous parlez d'un mental concentré, concentré sur quelque chose ou sur un sujet. C'est tout différent.

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1150

Vous imaginez-vous qu'un mental tranquille ne peut rien rejeter et que seul le mental agité en est capable? C'est le mental tranquille qui le fait le mieux. Tranquille ne signifie pas inerte et tamasique.

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1151

C'est absurde. Ne rien faire avec le mental n'est ni la quiétude ni le silence. C'est l'inactivité qui entretient dans le mental une pensée mécanique et discursive, au lieu de le concentrer sur un objet. Voilà tout.

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1152

La paix passive n'est pas censée faire quoi que ce soit; c'est seulement par la présence de la paix complète et solide que tout trouble est repoussé à la surface ou hors de la conscience.

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1153

La paix passive ne se caractérise pas en général par son incapacité à se concentrer autrement que dans l'inaction. Elle peut être là tout en se concentrant dans l'action ou à l'arrière-plan de l'action.

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1154

C'est ce caractère tranquille et spontané qui est spécifique de l'action divine. Comme vous le dites, l'action n'est agressive que lorsqu'il y a résistance et lutte. Mais cela ne signifie pas que la force tranquille ne peut pas être intense. Elle peut être plus intense que la force agressive, mais cette intensité ne fait que renforcer l'intensité de la paix.

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1155

Oui, en effet, il y a une paix mentale, une paix vitale, une paix de la Nature physique. C'est la paix d'une conscience supérieure qui descend.

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1156

C'est la même paix, mais elle donne lieu à des sensations matérielles dans la substance matérielle et concrètes dans le mental physique et l'être nerveux, tout autant qu'à des sentiments psychologiques dans le mental et le vital ou subtils dans le corps subtil.

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1157

On peut assurément sentir la paix, la pureté et le silence dans tous les objets matériels, car le Moi divin est en tout.

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1158

C'est le Silence derrière le cosmos qui soutient tout le mouvement de l'univers.

C'est du Silence que vient la paix; quand la paix devient de plus en plus profonde, elle devient de plus en plus Silence.

Dans un sens plus extérieur, le mot silence s'applique à un état dans lequel il n'y a aucun mouvement de pensée, ni de sentiment, etc., mais au contraire une grande immobilité du mental.

Mais il peut y avoir dans le Silence une action qui ne le trouble en rien, tout comme l'action universelle se déroule dans le Silence cosmique.

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1159

Dans le silence passif, la conscience extérieure reste vide et en repos, ne réagit pas aux choses et aux forces extérieures.

Dans le silence actif réside une grande force qui va vers les choses et les forces extérieures sans troubler le silence.

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1160

L'être au repos après l'effort, l'agitation, etc.: l'Esprit est éternellement en repos même au cœur de l'action; la paix donne ce repos spirituel. Le tamas en est une dégradation et mène à l'inaction.

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1161

Dans le mental tout à fait silencieux il y a d'ordinaire le sens statique du Divin, sans aucun mouvement actif. Mais toutes les pensées, toutes les aspirations, tous les mouvements les plus élevés peuvent y pénétrer. Alors le silence n'est pas absolu, mais on perçoit, à l'arrière-plan, un silence fondamental qui n'est troublé par aucun mouvement.

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1162

Vous semblez toujours croire que parce que le silence est là dans la conscience, la conscience tout entière doit en être uniformément affectée. La conscience humaine n'est pas comme cela, d'une seule pièce.

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1163

Il n'est pas possible que l'état spontané de silence devienne tout de suite permanent, mais c'est lui qui doit se développer en vous jusqu'à ce que le silence intérieur soit constant, un silence qui ne peut être troublé par aucune activité extérieure, ni même par aucune tentative d'attaque ou de perturbation.

L'état que vous décrivez montre précisément cette croissance du silence intérieur. Il doit à la longue s'établir et devenir la base de toute l'expérience et de toute l'activité spirituelles. Peu importe qu'on ne sache pas ce qui se passe au-dedans, derrière le silence. Car il y a deux états dans le yoga: l'un où tout est silencieux et où il n'y a aucune pensée, aucun sentiment, aucun mouvement, même si l'on est actif extérieurement comme tout le monde; l'autre dans lequel une nouvelle conscience devient active et apporte la connaissance, la joie, l'amour, d'autres sentiments spirituels, d'autres activités intérieures, et cependant il y a en même temps un silence fondamental ou une tranquillité fondamentale. Ces deux états sont nécessaires au développement de l'être intérieur. L'état de silence absolu, fait de légèreté, de vide et de libération, prépare l'autre et le soutient quand il vient.

III

1164

Oui, une paix et une force stables qui soutiennent l'intensité et l'équilibre, dans lesquelles disparaît tout ce qui est incompatible avec la sâdhanâ, telle est la vraie base.

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1165

C'est bien entendu ainsi qu'il faut que ce soit. Il faudrait même que vous alliez jusqu'à ressentir cette paix et cette immensité comme votre vrai moi, la substance permanente de votre conscience, immuablement présente.

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1166

C'est excellent. La paix et le silence doivent s'établir profondément au-dedans, si profondément que tout ce qui vient du dehors ne fasse que survoler la surface sans troubler la stabilité du calme intérieur. Il est bon aussi que la méditation vienne d'elle-même: cela indique que la Force du yoga commence à se charger de la sâdhanâ.

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1167

Quand la paix sera pleinement établie partout dans l'être, elles [les réactions du vital inférieur] ne pourront plus l'ébranler. Elles peuvent apparaître d'abord comme des ondes à la surface, puis seulement comme des suggestions que l'on regarde ou que l'on ne se donne pas la peine de regarder, mais dans l'un et l'autre cas, elles ne pénètrent pas, n'affectent rien, ne troublent rien.

C'est difficile à expliquer, mais c'est un peu comme une montagne contre laquelle on lancerait des pierres: si la montagne était consciente partout, elle pourrait sentir le contact des pierres, mais il serait si léger et si superficiel qu'elle n'en serait pas le moins du monde affectée. À la fin, même cette réaction disparaît.

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1168

Une fois la paix ou le silence complètement établis, ils ne peuvent plus être entamés ni annulés par les mouvements de surface, si nombreux soient-ils. Ils peuvent supporter tous les mouvements de l'univers et pourtant rester inchangés.

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1169

Bien entendu. Il est très habituel de sentir une paix stable dans l'être intérieur, même si la surface est troublée. En fait, c'est l'état habituel du yogi avant qu'il ait atteint la samatā absolue dans tout l'être.

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1170

Même quand règnent la paix et l'immensité, ceux-ci [les mouvements de l'ego dans le physique vital] peuvent flotter à la surface et essayer d'entrer; mais alors ils n'occupent pas la conscience, ils ne font que l'effleurer. C'est ce que les yogis d'autrefois considéraient comme un résidu mécanique de Prakriti, une habitude aveugle qui continue à se poursuivre après la libération essentielle du moi. Ils en faisaient peu de cas, comme d'une chose sans importance, mais ce point de vue n'est pas défendable dans notre sâdhanâ, puisqu'elle a pour objectif non seulement de libérer le Pourousha, mais aussi de transformer complètement la Prakriti.

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1171

Oui, c'est le mouvement vers l'intérieur qui est juste. Vivre au-dedans, dans la paix et le silence, est la première nécessité. J'ai parlé d'immensité parce que dans l'immensité du silence et de la paix (que les yogis reconnaissent comme la réalisation du moi à la fois individuel et universel) se trouve la base de l'harmonisation entre l'intérieur et l'extérieur. Cela viendra.

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1172

C'est en général dans l'être intérieur que la paix est profonde ou vaste. D'ordinaire les parties extérieures ne parviennent qu'à une tranquillité plus ou moins grande; elles ne reçoivent la paix profonde que lorsqu'elles en sont inondées par l'être intérieur.

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1173

Oui, c'est certain: la paix s'établit d'abord dans l'être intérieur; elle est spirituelle et psychique, mais elle inonde l'être extérieur; quand elle est présente dans l'activité, cela signifie soit que le mental, le vital, le physique, d'ordinaire agités, ont été submergés par le flot de la paix intérieure, soit, à un stade plus avancé, qu'ils ont été en partie ou tout entiers changés en pensées, forces, émotions, sensations qui portent dans leur substance même l'essence du silence et de la paix intérieurs.

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1174

Le progrès spirituel interne ne dépend pas tant des conditions extérieures que de la manière dont nous réagissons du dedans à leur contact — tel a toujours été le verdict ultime de l'expérience spirituelle. C'est pourquoi nous insistons sur la nécessité de prendre la bonne attitude et de persister à la garder, d'obtenir un état intérieur qui ne dépende pas des circonstances extérieures — un état d'égalité et de calme, sinon tout de suite de bonheur intérieur —, sur la nécessité d'aller de plus en plus profond et de regarder du dedans au dehors, au lieu de vivre dans le mental de surface, toujours à la merci des chocs et des coups de la vie. C'est seulement dans cet état intérieur que l'on peut être plus puissant que la vie et ses forces perturbatrices, et que l'on peut espérer vaincre.

Rester tranquille au-dedans, ferme dans sa volonté d'aller jusqu'au bout, refusant d'être troublé ou découragé par les difficultés ou les fluctuations, est l'une des premières choses à apprendre sur le Chemin. Faire autrement, c'est encourager l'instabilité de la conscience: cette difficulté dont vous vous plaignez, de garder l'expérience. C'est seulement si, au dedans, vous demeurez calme et résolu, que les lignes d'expérience peuvent se développer avec une certaine régularité, bien qu'elles ne soient jamais sans périodes d'interruption et de fluctuation; mais si ces périodes sont convenablement utilisées, elles peuvent devenir des temps d'assimilation et servir à épuiser la difficulté, au lieu d'être des démentis de la sâdhanâ.

Une atmosphère spirituelle est plus importante que les conditions extérieures; si l'on peut obtenu — cela et aussi créer son propre air spirituel pour y respirer et y vivre, c'est la vraie condition du progrès.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1175

Vous devriez comprendre que si une atmosphère tranquille est désirable, la vraie tranquillité est au-dedans et nulle autre ne vous donnera l'état que vous désirez.

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1176

Aspirez, concentrez-vous dans l'esprit qui convient et, quelles que soient vois difficultés, vous êtes certain d'atteindre le but que vous vous proposez.

C'est dams la paix qui est derrière et dans ce "quelque chose de plus; vrai" en vous que vous devez apprendre à vivre, et c'est cela que vous devez sentir être vous-même. Vous devez considérer le reste comme n'étant pas votre vrai moi, mais seulement un flux de mouvements superficiels qui changent et se répètent et sont sûrs de disparaître à mesure que le vrai moi émerge.

La paix est le véritable remède; se distraire par un dur travail ne donne qu'un soulagement temporaire, bien qu'une certaine somme de travail soit nécessaire pour le bon équilibre des différentes parties de l'être. Sentir la paix au-dessus et autour de votre tête est le premier pas. Il faut entrer en contact avec telle et elle doit descendre en vous, remplir votre mental, votre vie, votre corps, et vous entourer de telle sorte que vous viviez en elle; car cette paix est le vrai signe de la présence du Divin avec vous, et une fois que vous l'avez, tout le reste commence à venir.

La vérité 'dans les paroles et la pensée est très importante. Plus vous pourrez sentir que le mensonge ne fait pas partie de vous-même, mais vous vient du dehors, plus il vous sera facile de le refuser et de le rejeter.

Persévérez, et ce qui est encore tordu sera redressé, et vous connaîtrez et sentirez constamment la vérité de la présence du Divin; ainsi votre foi sera justifiée par l'expérience directe.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1177

La lumière et la paix, lorsqu'elles sont pleinement établies dans la conscience vitale et physique, forment pour la nature tout entière la base du mouvement juste.

Rester au-dedans, au-dessus et intangible, plein de la conscience intérieure et de l'expérience intérieure, tout en écoutant, au moyen de la conscience de surface, ce que disent les uns ou les autres si c'est nécessaire, mais sans que cette conscience en soit elle-même troublée ni même tirée au-dehors ou envahie, telle est la condition parfaite pour la sâdhanâ.

Nouvelles Lumières sur le Yoga, chapitre in.

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1178

Ce que vous m'écrivez au sujet de votre état paraît dans l'ensemble correct. Il y a assurément dans l'être intérieur un plus grand calme et une liberté qui auparavant n'y étaient pas. C'est ce qui vous donne l'égalité que vous y ressentez et la capacité d'échapper aux ennuis plus graves. Quand on a cette base de calme intérieur, on peut venir à bout des difficultés et des imperfections de la surface sans être bouleversé, déprimé, etc. La faculté de se mêler aux autres sans être envahi en est aussi la conséquence.

Aucune règle générale ne peut être formulée en réponse à votre deuxième question, mais votre attitude est juste en ce qui vous concerne, car vous n'avez à développer aucune faculté particulière: vous avez à l'arrière-plan une attitude de sincérité générale profonde qui pénètre et anime tout. D'autres, qui ressentent le besoin de se développer sur un point particulier, en font la demande précise et reçoivent ce qu'il faut.

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1179

Le silence est celui de la conscience intérieure et dans ce silence que n'affectent pas les choses extérieures, la vraie activité de la conscience peut apparaître sans troubler le silence: perceptions, volonté, sentiments, action de vérité. En lui on peut aussi sentir plus aisément le travail de la Mère. La chaleur est sans doute celle d'Agni, le feu de la purification et de la tapasyâ; on le sent souvent ainsi pendant que se fait le travail intérieur.

Votre sentiment à l'égard des relations avec les gens est tout à fait juste. C'est la manière psychique de voir ces choses.

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1180

J'ai relu le message du yogi que vous citez dans votre lettre, mais sorti du contexte on ne peut pas en tirer grand'chose ni rien de très précis. Deux assertions sont assez claires:

"Dans le silence est la sagesse": c'est dans le silence intérieur du mental que peut venir la vraie connaissance; car l'activité ordinaire du mental ne fait que fabriquer des idées et des représentations de surface qui ne sont pas la vraie connaissance. La parole est en général l'expression de la nature superficielle; par conséquent, se projeter exagérément au-dehors en parlant ainsi gaspille l'énergie et empêche d'écouter ce qui se passe à l'intérieur et qui apporte le verbe de la vraie connaissance... "En écoutant vous obtiendrez ce à quoi vous pensez" signifie sans doute que dans le silence viendront les vraies formations de pensée qui peuvent s'accomplir ou se réaliser. La pensée peut être une force qui se réalise, mais la pensée ordinaire de surface n'est pas de cette espèce; il y a en elle plus de gaspillage d'énergie que dans n'importe quelle autre activité. Seule la pensée qui vient dans un mental tranquille ou silencieux contient un pouvoir.

"Parlez moins et obtenez du pouvoir" a essentiellement le même sens; on acquiert non seulement une connaissance plus vraie, mais un pouvoir plus grand dans la tranquillité et le silence d'un mental qui, au lieu de bouillonner à la surface, peut entrer dans ses propres profondeurs et écouter ce qui descend d'une conscience supérieure.

C'est probablement ce que cela veut dire; ce sont des choses connues de tous ceux qui ont quelque expérience du yoga.

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1181

La paix libère de toute dépendance à l'égard des contacts extérieurs; elle apporte ce que la Guîtâ appelé l'ātmarati. Mais dans les premiers temps il est difficile de la conserver intacte quand on est en contact avec les autres parce que la conscience a l'habitude de se ruer au-dehors en paroles ou en échanges extérieurs ou encore de descendre au niveau normal. Il faut par conséquent être très prudent jusqu'à ce qu'elle soit stabilisée; lorsqu'elle l'est, d'ordinaire elle se défend elle-même, car tous les contacts extérieurs deviennent superficiels pour une conscience pleine de la paix d'en haut.

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1182

Vous êtes parvenu à la conscience intérieure silencieuse, mais une perturbation peut la voiler; la prochaine étape consiste à étendre de proche en proche cette base de calme et de silence à la conscience extérieure... Alors le jeu des forces ordinaires ne se produira plus qu'à la surface et vous pourrez en venir à bout plus facilement.

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1183

C'est ce qu'il faut faire: garder la paix de la conscience supérieure; alors, même s'il y a des perturbations vitales, elles ne se produiront qu'à la surface. La base persistera jusqu'à ce que la Force libère le vrai vital.

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1184

Si vous obtenez la paix, il devient facile de nettoyer le vital. Si vous nettoyez et nettoyez sans rien faire d'autre, vous avancerez très lentement, car le vital redevient sale et doit être nettoyé cent fois. La paix, c'est quelque chose qui est propre par nature, donc l'acquérir est une manière positive de parvenir à vos fins. Chercher seulement la saleté et nettoyer est la manière négative.

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1185

Comment pourriez-vous avoir la paix et la tranquillité alors que vous êtes tout le temps en train de penser à des "forces inférieures", à des "attaques", à des "possessions", etc.? Quand vous pourrez considérer les choses avec naturel et tranquillité, vous pourrez avoir la tranquillité et la paix, pas avant.

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1186

Le conflit vital et la dépression sont sans doute l'effet d'un désir trop impatient dans votre effort précédent et d'une tension pour obtenir un résultat. Ainsi, quand une chute s'est produite dans la conscience, c'est un vital désolé, déçu et perplexe qui est venu à la surface, ouvrant largement la porte aux suggestions de doute, de désespoir et d'inertie envoyées par le côté adverse de la Nature. Vous devez avancer vers une base ferme de calme et d'égalité dans le vital et dans le physique autant que dans la conscience mentale; qu'il y ait une pleine descente de Pouvoir et d'Ânanda, mais dans un âdhâr solide, capable de les contenir; c'est la complète égalité qui donne cette capacité et cette robustesse.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1187

L'échec est dû non à un manque de capacité, mais à un manque de stabilité, à une agitation du vital et une sorte d'ardeur hâtive qui n'a ni souci du détail, ni persévérance. Vous avez besoin du silence intérieur et de la puissance de la force solide qui peut agir à travers ce silence intérieur et qui fait du vital son instrument sans lui permettre d'imposer ses conditions à l'action par ses défauts.

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1188

Il faut la faire descendre [la paix] d'abord dans le cœur et l'ombilic. Cela donne une sorte de stabilité intérieure, même si cette stabilité n'est pas absolue. Il n'y a pas d'autre méthode que l'aspiration, une volonté forte et tranquille et un rejet de tout ce qui n'est pas orienté vers le Divin dans les parties où vous appelez la paix: dans ce cas, le vital émotif et supérieur.

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1189

Le mouvement d'universalité ne peut pas à lui seul empêcher le vital d'apporter le trouble: c'est la soumission complète et la descente complète de la paix dans tout l'être, jusqu'au niveau le plus matériel, qui peuvent le faire.

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1190

Le mental et le vital sont toujours davantage ouverts aux forces universelles que le matériel. Mais ils peuvent être plus agités que le matériel tant qu'ils ne sont pas assujettis à la paix d'En Haut.

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1191

Le calme est descendu en vous et a établi le contact entre vous et l'En-Haut, et si vous maintenez fermement ce contact vous conserverez le calme. Mais pour être débarrassé de ces troubles du vital, vous devez faire descendre le Pouvoir et la Volonté qui eux aussi sont là, au-dessus, ou du moins rester en contact avec eux, de sorte qu'ils agiront, chaque fois que vous les appellerez, contre les forces de l'Ignorance.

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1192

L'égalité d'âme et la paix en toutes circonstances, dans toutes les parties de l'être, constituent la première fondation de l'état yoguique. Selon les tendances de la nature, la Lumière (qui apporte la Connaissance), la Force (qui apporte la puissance et le dynamisme sous de nombreuses formes) ou l'Ânanda (qui apporte l'amour et la joie d'exister) peut venir ensuite. Mais la paix est la condition première sans laquelle rien d'autre ne peut être stable.

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1193

Il est vrai que c'est en utilisant ce qu'il y a de plus fort en lui qu'un sâdhak peut le plus aisément s'ouvrir au Divin. Mais... la paix est nécessaire à tous: sans la paix, sans une pureté de plus en plus grande, même si l'on s'ouvre, on ne peut pas recevoir parfaitement tout ce qui descend par l'ouverture. La lumière aussi est nécessaire à tous: sans la lumière on ne peut tirer un plein profit de tout ce qui descend.

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1194

Quand le mental est silencieux, c'est la paix, et dans la paix tout ce qui est divin peut venir. Quand le mental n'est pas là, il y a le Moi qui est plus grand que le mental.

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1195

Le silence et la paix font eux-mêmes partie de la conscience supérieure; le reste vient dans ce silence et cette paix.

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1196

Ce sont les vishnouïtes qui sentent que la paix du Védânta ne suffit pas, que l'amour et la joie du Divin sont plus précieux. Mais à moins que l'une et les deux autres ne viennent ensemble, le sentiment d'amour et de joie est éphémère même s'il est intense; il peut aussi fort bien devenir mélangé, s'orienter dans une mauvaise direction ou se transformer en quelque chose qui n'est pas la vraie chose du tout. On doit acquérir la paix et la pureté qui formeront la base de la conscience, autrement le jeu divin n'a aucun terrain solide où s'appuyer.

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1197

Enfin vous avez le vrai fondement de la sâdhanâ. Ce calme, cette paix et cette soumission forment l'atmosphère appropriée pour que tout le reste arrive: connaissance, force, Ânanda. Laissez cet état s'établir complètement.

Il ne persiste pas pendant que vous travaillez parce qu'il est encore confiné au mental proprement dit, qui vient seulement de recevoir le don du silence. Quand la nouvelle conscience sera pleinement formée et aura pris totalement possession de la nature vitale et de l'être physique (le vital jusqu'ici n'est que touché ou dominé parle silence, il n'est pas possédé par lui), alors ce défaut disparaîtra.

La tranquille conscience de paix que vous avez maintenant dans le mental doit devenir non seulement calme, mais vaste. Vous devez la sentir partout, vous sentir en elle et sentir tout en elle. Ceci aidera aussi à amener une base de calme dans l'action.

Plus votre conscience deviendra vaste, plus vous serez capable de recevoir d'en haut. La Shakti pourra descendre et apporter dans l'organisme la force et la lumière autant que la paix. Ce que vous sentez d'étroit et de limité en vous est le mental physique; il peut s'élargir seulement si la lumière et cette conscience plus vaste descendent et prennent possession de la nature.

L'inertie physique dont vous souffrez ne diminuera et ne disparaîtra probablement que quand l'énergie d'en haut descendra dans l'organisme.

Restez tranquille, ouvrez-vous et demandez à la divine Shakti de confirmer le calme et la paix, d'élargir la conscience et d'apporter en elle autant de lumière et de pouvoir que la conscience peut à présent en recevoir et en assimiler.

Ayez soin de ne pas être trop impatient, car cela pourrait troubler de nouveau la tranquillité et l'équilibre qui ont déjà pu s'établir dans la nature vitale.

Ayez confiance dans le résultat final et donnez au Pouvoir le temps de faire son œuvre.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1198

Faute d'aspiration, gardez au moins présente à l'esprit l'idée qu'il est nécessaire (1) que le silence et la paix deviennent une immensité que vous pourrez réaliser comme le Moi; (2) que la conscience silencieuse s'étende aussi vers le haut, afin que vous puissiez sentir sa source au-dessus de vous; (3) que la paix, le silence, etc., doivent être présents à tout moment. Tout cela ne doit pas nécessairement venir à la fois, mais si vous concevez mentalement ce qui doit être, toute chute vers un état d'inertie pourra être évitée.

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1199

Le calme et l'ampleur sont le fondement de la conscience yoguique et la meilleure condition de la croissance et de l'expérience internes. Si un vaste calme peut être établi dans la conscience physique, occupant et remplissant le corps lui-même et toutes ses cellules, ceci peut devenir la base de sa transformation; en fait, sans cette ampleur et ce calme, la transformation n'est guère possible.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1200

C'est la conscience fondamentale juste que vous avez maintenant acquise. Le tamas et les autres mouvements de la nature universelle inférieure essaieront d'entrer, c'est inévitable, mais si vous avez le calme de l'être intérieur, grâce auquel vous les ressentez comme quelque chose d'extérieur à l'être, et la lumière du psychique qui les dévoile et les rejette aussitôt, c'est que vous avez la vraie conscience qui est votre sauvegarde pendant que la transformation positive se prépare ou s'opère.

La transformation vient par la descente de la Force, de la Lumière, de la Connaissance, de l'Ânanda, etc. d'au-dessus. Vous avez donc raison de sentir que vous devez vous ouvrir, dans une aspiration ou une invocation tranquille, à la descente de la Lumière d'en haut. Mais l'aspiration qui accompagne ce calme et cette immensité ne doit en rien les troubler et vous devez vous attendre à ce que le résultat ne soit pas immédiat: il peut être rapide, mais il peut aussi prendre un certain temps.

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1201

L'expérience de la sensation d'un "bloc solide" indique la descente d'une force et d'une paix solides dans l'être extérieur, mais surtout dans le vital physique. C'est cela qui est toujours le fondement, la base stable sur laquelle tout le reste (Ânanda, lumière, connaissance, bhakti) peut ensuite des cendre, s'appuyer et agir en sécurité. L'engourdissement était présent dans l'autre expérience parce que le mouvement était tourné vers le dedans; tandis qu'ici, la Yoga-Shakti se meut vers le dehors, dans la nature extérieure pleinement éveillée, premier pas pour établir le yoga et ses expériences. C'est pourquoi il n'y a pas cet engourdissement qui était le signe que la conscience tendait à se retirer des parties extérieures.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1202

Être plein de paix, le cœur tranquille, ni troublé par le chagrin, ni exalté par la joie, voilà qui est très bon. L'Ânanda, quant à lui, peut non seulement venir avec son intensité la plus absolue, mais persister plus longtemps quand le mental est en paix et le cœur délivré de la joie et du chagrin ordinaires. Si le mental et le cœur sont agités, instables, inquiets, un certain genre d'Ânanda peut apparaître, mais il est mêlé d'exaltation vitale et ne peut demeurer. Il faut d'abord établir la paix et le calme dans la conscience; alors sur cette base solide, l'Ânanda peut s'étendre et s'intégrer à son tour d'une façon permanente à la conscience et à la nature.

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1203

Une grande vague (ou mer) de calme et la constante conscience d'une vaste et lumineuse Réalité, tel est précisément le caractère de la réalisation fondamentale de la Vérité suprême quand elle touche pour la première fois le mental et l'âme. On ne peut pas demander une meilleure base; c'est comme un roc sur lequel le reste peut être bâti. Cela signifie certainement, non seulement une présence, mais la

Il n'est pas nécessaire de définir cette Présence, et l'on ne devrait même pas tenter de s'en faire une image car elle est infinie dans sa nature. Tout ce qu'elle doit manifester d'elle-même ou extérioriser, elle le fera inévitablement par son propre pouvoir, pourvu qu'il y ait une acceptation continue.

Il est tout à fait vrai que c'est une grâce qui est envoyée et la seule manière de répondre à une telle grâce est de l'accepter avec gratitude et de laisser le Pouvoir qui a touché la conscience développer dans l'être ce qui doit y être développé en se gardant ouvert à lui. La transformation totale de la nature ne peut pas se faire en un instant; elle prend nécessairement longtemps et procède par étapes; l'expérience actuelle est seulement une initiation, une base pour la nouvelle conscience dans laquelle cette transformation deviendra possible. La spontanéité automatique de l'expérience suffit à montrer que ce n'est pas une fabrication du mental, de la volonté ni des émotions; elle vient d'une Vérité qui est au-delà d'eux.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1204

Si vous conservez l'immensité et le calme, et aussi dans le cœur l'amour pour la Mère, alors tout ira bien, ça" c'est la double fondation du yoga: la descente de la conscience supérieure avec sa paix, sa liberté et sa sérénité venues d'en haut, et l'ouverture du psychique grâce à qui tous les efforts ou tous les mouvements spontanés sont toujours tournés vers le vrai but.

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1205

La tranquillité et le silence que vous ressentez et le sentiment de bonheur qui les accompagne sont en vérité la base même de la réussite dans la sâdhanâ. Quand on a cela, on peut être assuré que la sâdhanâ s'implante sur une base ferme. Vous avez raison aussi de penser que si cette tranquillité est pleinement établie, tout ce qui se dissimule en vous sortira. Il est également vrai que cette paix donne un bonheur bien plus grand que tout ce que peuvent apporter les objets extérieurs: c'est sans comparaison. Devenir indifférent à l'attrait des objets extérieurs est l'une des premières règles du yoga, car cette absence d'attachement libère l'être intérieur en le faisant entrer dans la paix et la vraie conscience. C'est seulement lorsqu'on voit le Divin en toutes choses que les objets acquièrent une valeur pour le yoga; toutefois, ils ont alors une valeur non pour eux-mêmes et comme des objets de désir, mais pour le Divin au-dedans et comme des outils du travail et de la manifestation du Divin.

IV

1206

L'égalité consiste à demeurer impassible au-dedans en toutes circonstances.

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1207

L'égalité est le principal soutien de la vraie conscience spirituelle; c'est d'elle qu'un sâdhak dévie quand il se laisse emporter dans ses sentiments, ses paroles ou ses actes par un mouvement vital. Égalité n'est pas synonyme de patience, bien qu'une égalité fermement établie augmente sans aucun doute considérablement, et même de manière illimitée, le pouvoir d'endurance et de patience de chacun.

Posséder l'égalité, c'est avoir un mental et un vital tranquilles et immuables; c'est n'être ni touché ni dérangé par ce qui vous arrive, ce que l'on vous dit ou vous fait, mais regarder toutes ces choses en face, sans aucune des déformations qu'engendre le sentiment personnel, et essayer de comprendre ce qui est derrière elles, pourquoi elles se produisent, ce que vous pouvez en apprendre; ce qui, en vous-même, est l'objet de leurs assauts et quel profit, quel progrès intérieur vous pouvez en tirer; c'est avoir la maîtrise des mouvements vitaux: colère, susceptibilité, orgueil, mais aussi désir et le reste; c'est ne pas les laisser s'emparer de l'être émotionnel, ni troubler la paix intérieure; ne pas parler, ne pas agir précipitamment sous leur impulsion, ne parler, n'agir que mû par un calme équilibre intérieur de l'esprit. L'entière et parfaite possession de cette égalité n'est pas facile à acquérir, mais il faut sans relâche essayer de fonder de plus en plus sur elle l'état intérieur et les mouvements extérieurs.

Posséder l'égalité, c'est aussi autre chose: c'est avoir une vision égale des hommes et de leur nature, de leurs actes et des forces qui les font mouvoir; l'égalité aide à voir les hommes sous leur vrai jour, en écartant du mental tout sentiment personnel dans le regard et le jugement, et même en éliminant tout parti pris mental. Le sentiment personnel déforme toujours et fait que l'on voit, dans les actions des hommes, non seulement les actions elles-mêmes, mais aussi derrière elles des choses qui, le plus souvent, n'y sont pas. Il en résulte des malentendus et des erreurs de jugement qui auraient pu être évités; des choses de peu de conséquence prennent des proportions démesurées. J'ai constaté que dans la vie, plus de la moitié des événements fâcheux de ce genre ont cette origine. Mais dans la vie ordinaire, le sentiment personnel, la susceptibilité font partie intégrante de la nature humaine et sont peut-être nécessaires pour que l'on puisse se défendre, bien qu'à mon avis là aussi, une attitude forte, vaste et égale envers les hommes et les choses serait une bien meilleure ligne de défense. Mais pour un sâdhak, surmonter ce sentiment et cette susceptibilité et vivre au contraire dans le calme puissant de l'esprit est une partie essentielle du progrès.

La première condition du progrès intérieur est de reconnaître tout ce qui est ou a été un mouvement faux dans une partie quelconque de la nature: idée fausse, sentiment faux, parole fausse, action fausse; et par faux on entend ce qui s'éloigne de la vérité, de la conscience supérieure, du moi supérieur, de la voie du Divin. Ce mouvement faux une fois identifié, il est reconnu, on ne jette pas dessus un voile complaisant, on ne s'en défend pas et on l'offre au Divin pour que la Lumière et la Grâce descendent et le remplacent par le mouvement juste de la vraie Conscience.

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1208

Sans égalité, samatā, il ne peut y avoir aucun fondement ferme de la sâdhanâ. Quelque déplaisantes que soient les circonstances, quelque désagréable que soit la conduite d'autrui, vous devez apprendre à tout recevoir avec un calme parfait et sans réaction troublante. Ces choses sont la pierre de touche de l'égalité. Il est facile d'être calme et égal quand tout va bien et que les gens et les circonstances sont agréables; quand ils sont l'opposé, la perfection du calme, de la paix et de l'égalité est éprouvée, fortifiée, perfectionnée.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1209

Il est très bon que vous ayez eu cette expérience car cette sorte de conscience pleine d'égalité (samatā) est exactement ce qu'il faut acquérir; elle est la base même sur laquelle peut s'édifier une conscience yoguique solide et emplie de la Mère. Si l'on peut la rendre stable, alors la plupart des ennuis et des difficultés de la sâdhanâ disparaissent, tous les changements nécessaires peuvent se poursuivre tranquillement, sans les perturbations et les bouleversements qui interrompent et retardent le progrès. En elle peut se développer aussi une compréhension juste et claire des gens et des choses, de la manière d'agir avec eux sans friction, ce qui facilite beaucoup le travail et l'action. Si cette conscience est déjà venue, elle reviendra et grandira, c'est certain.

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1210

Écouter les paroles ou les conseils d'autrui est inutile. Il faut apprendre à n'être affecté ni par les unes, ni par les autres. Une certaine samatā est à cet égard nécessaire à l'acquisition d'un ferme équilibre. La seule chose qui importe est la réalisation du Divin.

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1211

Elle [la vraie activité des sens] consiste à enregistrer l'apparence vraie ou divine des choses et à leur renvoyer la réaction d'un Ânanda égal, sans aversion ni désir.

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1212

Complete samatā takes long to establish and it is dependent on three things – the soul's self-giving to the Divine by an inner surrender, the descent of the spiritual calm and peace from above and the steady, long and persistent rejection of all egoistic, rajasic and other feelings that contradict samatā.

La première chose à faire est la consécration et l'offrande complètes du cœur; l'accroissement du calme spirituel et de la soumission est la condition du rejet efficace de l'ego, du rajoguṇa, etc.

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1213

Quand la paix de la conscience supérieure descend, elle apporte toujours avec elle cette tendance à l'égalité, samatā, parce que sans samatā la paix est toujours exposée aux attaques des vagues de la nature inférieure.

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1214

L'égalité est une partie très importante de notre yoga. Il est nécessaire de la garder dans la douleur et la souffrance, c'est-à-dire d'endurer avec fermeté et calme, de ne pas être agité, troublé, déprimé ni découragé, et d'avancer avec une foi inébranlable en la Volonté divine. Mais l'égalité ne veut pas dire une acceptation inerte. Si, par exemple vous échouez momentanément dans quelque tentative de la sâdhanâ, vous devez garder l'égalité sans vous inquiéter ni vous décourager; mais il ne faut pas accepter l'insuccès comme une indication de la Volonté divine et abandonner la tentative. Au contraire, vous devez découvrir la raison et le sens de l'insuccès et avancer plein de foi vers la victoire. De même pour la maladie: ne soyez pas inquiet, troublé ni agité; mais vous ne devez pas accepter la maladie comme une expression de la Volonté divine; au contraire, considérez-la comme une imperfection du corps dont il faut vous débarrasser comme vous essayez de vous débarrasser des imperfections vitales et des erreurs mentales.

Les Bases du Yoga, chapitre I. Traduction de la Mère.

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1215

La samatâ yoguique est l'égalité de l'âme, l'équanimité fondée sur le sentiment du Moi unique, du Divin unique partout: voir l'Un en dépit de toutes les différences, de tous les degrés, de toutes les disparités dans la manifestation. Le principe mental d'égalité essaie d'ignorer ou bien d'anéantir les différences, les degrés ou les disparités, il agit comme si tout y était égal, ou essaie de le rendre tel. C'est comme Hridaya, le neveu de Râmakrishna, qui lorsqu'il eut reçu le contact de Râmakrishna, se mit à crier: "Râmakrishna, vous êtes le Brahman et moi aussi je suis le Brahman; il n'y a pas de différence entre nous"; si bien que Râmakrishna, voyant qu'il refusait de se calmer, dut lui retirer le pouvoir. Ou comme le disciple qui refusait d'écouter le cornac et se tenait devant l'éléphant en disant: "Je suis le Brahman", jusqu'à ce que l'éléphant le soulève avec sa trompe et l'écarté de son chemin. Quand il se plaignit à son gourou, celui-ci lui dit: "Oui, mais pourquoi n'avez-vous pas écouté le Brahman cornac? C'est pour cela que le Brahman éléphant a dû vous soulever et vous mettre à l'abri du danger." Dans la manifestation, la Vérité a deux faces et vous ne pouvez ignorer ni l'une, ni l'autre.

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1216

Nul doute que la haine et les jurons ne sont pas l'attitude qui convient. Il est vrai aussi que regarder toutes les choses et tous les hommes avec une vision calme et claire, n'être pas affecté, être impartial dans ses jugements est l'attitude qui convient dans le yoga. Un état de samatā parfaite peut s'établir où l'on considère tous les hommes comme égaux, les amis comme les ennemis, et où l'on n'est troublé ni par les actions des hommes, ni par les événements. La question est de savoir si rien de plus n'est exigé de nous. S'il en est ainsi, l'attitude générale sera alors une indifférence neutre à l'égard de toutes choses. Mais la Guîtâ, qui préconise fortement une samatā parfaite et absolue, poursuit en disant: "Combats, détruis l'adversaire, conquiers." Si l'on ne nous demande aucune action générale d'aucune sorte, aucune loyauté à la Vérité par opposition au Mensonge si ce n'est dans la sâdhanâ personnelle, aucune volonté tendue vers le triomphe de la Vérité, alors la samatā Krishna, qui préconisait tant la samatā, blâme son attitude avec force et insiste tout autant pour qu'il combatte l'adversaire. "Aie la samatā, dit-il, et, voyant clairement la Vérité, combats." Par conséquent, prendre parti pour la Vérité et refuser de céder quoi que ce soit au Mensonge agresseur, être d'une loyauté à toute épreuve, ne jamais fléchir devant les êtres hostiles et les attaquants, n'est pas incompatible avec l'égalité. Le sentiment personnel et égoïste doit être rejeté, la haine et la mauvaise volonté vitale doivent être rejetées. Mais la loyauté et le refus de composer avec les assaillants et les êtres hostiles, de jouer avec leurs idées et leurs exigences en disant: "Après tout, nous pouvons concéder ce qu'ils nous demandent," ou de les accepter comme nos compagnons et de considérer qu'ils sont des nôtres, tout cela est d'une grande importance. Si l'attaque menaçait physiquement le travail, les I chefs ou les exécutants du travail, on le verrait tout de suite. Mais parce que l'attaque est d'un genre plus subtil, l'attitude passive peut-elle être juste? La bataille spirituelle se livre à l'intérieur et à l'extérieur; par la neutralité et le compromis, ou même par la passivité, on risque de laisser passer les forces ennemies et de leur permettre d'écraser la Vérité et ses enfants. En adoptant ce point de vue, vous verrez que si l'égalité spirituelle intérieure est juste, la loyauté active, une ferme prise de position est juste aussi; les deux ne peuvent pas être incompatibles.

J'ai bien entendu traité cette question en termes généraux, en laissant de côté tous les cas particuliers ou les questions personnelles. C'est un principe d'action qu'il faut considérer dans sa lumière et ses proportions justes.

Sur russe

À l'anglais

in German