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SRI AUROBINDO

Lettres sur le Yoga

Volume 3. Section 4

7. L'opposition des forces hostiles

II  III  IV V  VI VII  VIII

3982

Le fait a toujours été connu de tous les yogis et de tous les occultistes depuis le commencement des temps, en Europe et en Afrique comme en Inde: partout où l'on pratique le yoga ou le Yajna, les Forces hostiles se rassemblent pour le faire cesser par tous les moyens. On sait qu'il existe une nature inférieure et une nature spirituelle supérieure, on sait que chacune tire de son côté, que d'abord la nature inférieure est la plus forte, puis c'est la nature supérieure qui prend le dessus. On sait que les Forces hostiles profitent des mouvements de la nature inférieure pour tenter de détériorer, d'anéantir ou de retarder la siddhi. On le disait déjà au temps des Oupanishads ("Rude est le chemin à parcourir et tranchant comme le fil du rasoir"); le Christ l'a dit plus tard: "Dur est le chemin et étroite la porte par où l'on entre dans le royaume des cieux", et aussi: "II y a beaucoup d'appelés et peu d'élus" — précisément à cause de ces difficultés. Mais on a toujours su aussi que ceux qui sont sincères et fidèles dans leur cœur et le demeurent, et ceux qui s'en remettent au Divin, parviendront au but en dépit de toutes les difficultés, de tous les faux pas, de toutes les chutes.

*

3983

Les défauts normaux de la nature humaine sont une chose: ils sont la conséquence de la nature inférieure de l'Ignorance. L'action des forces hostiles est une intervention spéciale qui suscite de violents conflits intérieurs, des dépressions anormales, des pensées et des impulsions où l'on peut aisément reconnaître leurs suggestions, par exemple: quitter l'Ashram, abandonner le yoga, se révolter contre le Divin; suggestions de calamités et de catastrophes en apparence irrésistibles, impulsions irrationnelles et ainsi de suite. Elles ne sont pas du même ordre que les faiblesses humaines ordinaires.

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3984

La résistance normale de la Nature inférieure dans les êtres humains et l'action des Êtres hostiles sont deux choses différentes. La première est naturelle et tout le monde en est affecté; la seconde est l'intervention d'un monde non humain. Mais cette intervention peut revêtir deux formes: (1) Les êtres hostiles utilisent les forces de la Nature inférieure et font pression sur elles, les obligent à résister alors qu'autrement elles resteraient tranquilles, renforcent cette résistance ou la rendent violente alors qu'autrement elle aurait été faible ou modérée, et l'exaspèrent quand elle est violente. Par ailleurs, les Êtres hostiles, lorsqu'ils agissent sur ces forces de la Nature inférieure, font preuve d'une habileté diabolique, d'une organisation concertée et consciente qui n'apparaissent pas lorsque la résistance de ces forces est normale. (2) Ce sont parfois leurs propres forces qui envahissent l'être. Dans ce cas, il se produit souvent une possession temporaire ou du moins une influence irrésistible qui fait que les pensées, les sentiments, les actions de la personne deviennent anormaux: obnubilation du cerveau, tourbillon dans le vital, tout se passe comme si la personne n'y pouvait rien et était entraînée par une force toute-puissante. Par ailleurs, il peut y avoir, au lieu d'une possession, une forte influence; alors les symptômes sont moins marqués, mais celui qui connaît les manières d'agir de ces forces n'a aucun mal à voir ce qui s'est passé. Enfin il peut s'agir d'une simple attaque, et non d'une possession ou d'une influence; la personne est alors divisée, elle n'est pas dominée, elle résiste.

Certains ne sont jamais atteints par les forces hostiles.

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3985

C'est un mouvement naturel de la nature humaine ordinaire dans la conscience matérielle; il faut du temps pour s'en débarrasser. Nous disons évidemment que ce sont des forces de la nature inférieure, mais il ne faut pas les considérer comme hostiles; ce sont des forces ordinaires. Elles doivent être transformées, ce qui prend en général du temps et peut être fait tranquillement. Il faut se préoccuper davantage du côté positif de la sâdhanâ que de ces forces. Il n'est pas bon d'y penser sans cesse comme s'il s'agissait d'éléments hostiles ou de se troubler quand elles se manifestent et de considérer leur intervention comme une possession par un être hostile.

Les éléments véritablement hostiles sont peu nombreux et il faut les distinguer des mouvements ordinaires de la nature. Il faut repousser les premiers et agir sur les autres avec calme, sans être troublé ni découragé lorsqu'ils font leur apparition.

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3986

Les défauts de la nature ne sont rien, on peut y remédier progressivement. C'est à ces attaques extérieures, à ces suggestions et à ces incursions de forces mauvaises que le sâdhak doit se fermer complètement.

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3987

La nature inférieure est ignorante, elle est non divine; en elle-même, elle n'est pas hostile à la Lumière et à la Vérité, mais elle leur est fermée. Les forces hostiles ne sont pas seulement non divines, mais antidivines. Elles se servent de la nature inférieure, la pervertissent, l'emplissent de mouvements dévoyés, et par ce moyen influencent l'homme et essayent même d'entrer en lui et de le posséder, ou en tout cas de le gouverner complètement.

Débarrassez-vous de toute mauvaise opinion exagérée de vous-même et de l'habitude d'être déprimé par le sens du péché, de la difficulté ou de l'échec. Ces sentiments n'aident pas vraiment; au contraire, ils sont un immense obstacle et entravent le progrès. Ils appartiennent à la mentalité religieuse, non à la mentalité yoguique. Le yogi devrait considérer tous les défauts de la nature comme des mouvements de la Prakriti inférieure, communs à tous, et les rejeter avec calme, fermeté et persistance, avec une entière confiance en le Pouvoir divin, sans faiblesse ni dépression ni négligence, et sans excitation, impatience ni violence.

Les Bases du Yoga, chapitre III. Traduction de la Mère.

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3988

L'ego vital fait partie de la nature humaine ordinaire; tout le monde en a un. Il doit être purifié et transformé; l'ego doit être remplacé par l'être vital vrai dont il est une ombre déformée. Les forces de la nature inférieure sont souvent rebelles et résistent à la transformation par attachement aux mouvements habituels de l'Ignorance: désir, vanité, orgueil, luxure, opiniâtreté, etc., mais ils ne sont pas par nature hostiles. Les forces hostiles sont celles dont la seule raison d'être est de se révolter contre le Divin, contre la Lumière et la Vérité, d'agir en ennemis de l'Œuvre divine.

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3989

Les forces de l'Ignorance sont une perversion de la nature terrestre, et les Pouvoirs adverses s'en servent. Elles n'abandonnent pas leur domination sur les hommes sans livrer bataille.

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3990

Les forces hostiles ont une certaine fonction qu'elles se sont assignée: c'est de mettre à l'épreuve la condition des individus, du travail, de la terre elle-même, et leur état de préparation à la descente et à l'accomplissement spirituels. À chaque pas du voyage, elles sont là, attaquent furieusement, critiquent, suggèrent, imposent le découragement ou poussent à la révolte, soulèvent le doute et accumulent les difficultés. Certainement elles interprètent d'une façon très exagérée les droits que leur donne leur fonction, faisant même des montagnes de ce qui nous semble être une taupinière. Un petit faux pas, une faute insignifiante, les fait apparaître sur la route et dresser tout un Himalaya comme une barrière. Mais cette opposition a de tout temps été permise, non seulement pour nous mettre à l'essai ou à l'épreuve, mais pour nous contraindre à chercher une force plus grande, une connaissance de soi plus parfaite, une pureté et un pouvoir d'aspiration plus intenses, une foi que rien ne peut écraser, une descente plus puissante de la Grâce divine.

Les Bases duYoga, chapitre III. Traduction de la Mère.

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3991

Le contact avec le monde et les forces hostiles est toujours, bien évidemment, l'une des principales difficultés du sâdhak, mais la transformation du monde et des forces hostiles est une tâche trop lourde et la transformation personnelle ne peut attendre qu'elle soit achevée. Ce qu'il faut, c'est en arriver à vivre dans le Pouvoir où ces éléments perturbateurs ne peuvent pas pénétrer ou même s'ils le font, ne peuvent susciter aucun trouble, en arriver à être purifié et même revigoré par lui de sorte que plus rien dans l'être ne réagira aux éléments hostiles. Si une protection vous enveloppe, qu'une descente intérieure vous purifie et qu'en conséquence la conscience supérieure s'établit dans l'être intérieur et finit par se substituer à l'ancienne conscience ignorante jusque dans les parties les plus extérieures qui sont actives au dehors, alors le monde et les forces hostiles n'auront plus d'importance, du moins pour votre âme; car un travail plus vaste, qui dépasse l'individu, reste à accomplir pour en venir à bout; mais au stade actuel il n'est pas utile d'en faire une préoccupation majeure.

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3992

Une pression s'exerce toujours sur les forces de la nature inférieure pour les obliger à changer; les êtres hostiles sentent cette pression à travers elles, mais il semble bien qu'ils aient toute latitude de choisir entre la transformation et la destruction.

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3993

C'est exact. Dans l'état actuel des choses, le mensonge vital semble temporairement l'emporter sur la nature sattwique supérieure.

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3994

Il est tout à fait exact que le mensonge règne en ce monde; c'est la raison pour laquelle ces difficultés se manifestent. Mais vous ne devez pas vous laisser ébranler. Vous devez rester calme et fort, et marcher droit en utilisant le pouvoir de Vérité et la Force divine qui vous soutiennent pour surmonter les difficultés et redresser ce que le mensonge a distordu.

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3995

Oui, je crois. Chaque fois que quelque chose doit être accompli, il y a toujours des forces qui cherchent à intervenir. Je suppose qu'elles veulent démontrer que le cheminement en douceur et le sentier "large, sans obstacle et sans épines" n'appartient qu'au ṛtam satyam bṛhat du Véda, et que nous devons nous élever jusque-là... si nous en sommes capables.

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3996

Quel que soit le point que les forces adverses choisissent d'attaquer, si petit qu'il apparaisse au mental humain extérieur, il devient un point crucial et le concéder, c'est peut-être concéder l'une des voies d'accès à la forteresse. Même si c'est une petite poterne, cela leur suffit, du moment qu'elles peuvent entrer.

Rien n'est vraiment petit et sans importance sur le Grand Chemin. C'est surtout quand le conflit descend au niveau physique que ces distinctions cessent d'avoir la moindre valeur, car à ce niveau il n'est pas facile d'établir un barème pour ces "petites" choses qui sont d'une grande importance. À ce niveau, perdre une position mineure, c'est peut-être assurer la défaite dans la grande bataille.

Tous doivent en passer par les épreuves que vous subissez actuellement. Nous vous les aurions évitées si cela avait été possible, mais puisqu'elles vous sont imposées, nous comptons sur vous pour persévérer jusqu'à la victoire. La patience, une endurance tranquille, une calme résolution d'aller jusqu'au bout et de triompher, telles sont désormais les qualités requises; ce sont, parmi les vertus guerrières, les moins spectaculaires, mais les plus substantielles.

Et aussi la perspicacité et la vigilance. Ne fermez pas les yeux sur la difficulté qui est en vous, ne lui tournez pas le dos, mais ne la laissez pas non plus vous décourager. La victoire est certaine si nous persévérons; quel prix ne paierait-on pas, sous forme de difficulté et d'effort, pour une pareille conquête?

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3997

Oui, c'est certain. Les hommes sont envahis sans arrêt par les forces hostiles et un grand nombre d'entre eux sont, en partie ou totalement, sous leur influence. Certains en sont possédés et d'autres (peu nombreux) sont des incarnations d'êtres hostiles. À l'heure actuelle ces forces sont très actives partout sur la terre. Évidemment, dans le monde extérieur, les hommes n'ont pas la conscience qui se développe par le yoga et qui leur permettrait soit de percevoir les attaques, soit de les repousser consciemment; en eux, le conflit entre le psychique et la force hostile se poursuit surtout derrière le voile ou s'il a lieu à la surface, le mental ne le comprend pas.

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3998

Lorsqu'une entité prend possession d'une personne, elle tente tout d'abord de la séparer de son psychique, et c'est ce qui crée le conflit. Tout dépend de l'étendue et de la durée de la possession, dans quelle proportion elle envahit l'être et si elle est constante ou non.

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3999

Ne connaissez-vous pas l'histoire de l'éléphant Brahman? Tout est le Brahman, mais dans l'action, vous devez traiter l'éléphant comme le Brahman éléphant et l'Asoura comme le Brahman Asoura; vous ne devez traiter ni l'un ni l'autre comme le Brahman pur et simple. Il faut soit éviter le Râkshasa, soit le vaincre; sinon le Râkshasa risque de dévorer l'homme, tout Brahman qu'ils soient l'un et l'autre. La réalisation du Brahman restera une réalisation intérieure statique, tant que l'on ne sera pas devenu l'instrument dynamique de la Conscience et de la Force divines; alors le problème de l'éléphant et du Râkshasa ne se posera plus, car dans chaque cas la Conscience divine saura ce qu'il faut faire et la Force divine l'exécutera. Le vaira intérieur n'est pas nécessaire, mais il n'est pas prudent d'entretenir une relation amicale avec le Râkshasa, car le Râkshasa est imperméable à ce genre de chose: il en profitera pour poursuivre ses desseins.

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4000

Voir les mouvements est une chose; les laisser entrer en vous en est une autre, très différente. On doit avoir l'expérience de bien des choses, les voir et les observer, les amener dans le champ de la conscience et connaître ce qu'elles sont. Mais il n'y a aucune raison de leur permettre d'entrer en vous et de vous posséder. Seul le Divin ou ce qui vient du Divin doit être admis à pénétrer en vous.

Dire que toute lumière est bonne est comme dire que toute eau est bonne ou même que toute eau limpide et claire est bonne: ce n'est pas vrai. On doit voir quelle est la nature de la lumière, d'où elle vient, ce qu'elle contient, avant de pouvoir affirmer que c'est la vraie Lumière. Il existe de fausses lumières et des éclats trompeurs, des lumières inférieures aussi qui appartiennent aux régions basses de l'être. Il faut donc être sur ses gardes et distinguer; le vrai discernement viendra par la croissance du sentiment psychique, par la purification du mental et l'expérience.

Les Bases du Yoga, chapitre III. Traduction de la Mère.

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4001

Le simple fait qu'une force soit intense n'implique pas qu'elle soit mauvaise; la Force divine agit souvent avec une grande intensité. Tout dépend de la nature de la force et de son action: que fait-elle, quelle semble être son intention? Si son action a pour effet de purifier ou d'ouvrir l'être, apporte la lumière ou la paix, ou prépare la transformation de la pensée, des idées, des sentiments, du caractère, en les orientant vers une conscience supérieure, alors c'est une force bénéfique. Si elle est sombre ou obscure, si elle perturbe l'être par des suggestions radjasiques ou égoïstes, ou si elle excite la nature inférieure, c'est une force adverse.

Nouvelles Lumières sur le Yoga, chapitre IV.

II

4002

Je ne vois pas comment j'ai pu dire que vous n'étiez pas fait pour le yoga, alors que les expériences que vous avez eues et que vous avez encore sont caractéristiques de ce yoga. Ni les obstacles qui se dressent dans la conscience, ni les attaques ne prouvent qu'un individu est inapte au yoga. Aucun sâdhak n'y échappe et même ceux qui sont devenus de grands siddha yogis les ont rencontrés au cours de leur sâdhanâ.

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4003

Il n'est pas exact que les Râdjayogis ou autres ne sont pas attaqués pas les forces environnantes. Qu'ils aient pour but le môksha ou la transformation, tous subissent des attaques, parce que les forces vitales ne veulent ni la libération, ni la transformation. Seulement les yogis en parlent en termes généraux: rākṣasī māyā ou attaques de kāma, krodha, lobha; ils ne se soucient pas d'en rechercher l'origine ni d'observer comment elles entrent en eux, mais le phénomène est connu de tous.

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4004

Les forces hostiles attaquent tous les sâdhak; certains en sont conscients, d'autres non. L'objectif de ces forces est soit d'influencer la personne, soit de s'en servir, soit de détériorer sa sâdhanâ ou son travail, ou tout autre motif du même genre. Elles n'ont pas pour but de mettre le sâdhak à l'épreuve, mais leur attaque peut fort bien être utilisée à cette fin par le pouvoir qui guide la sâdhanâ.

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4005

Chacun a toujours, dans sa nature, cette voix hostile et critique qui questionne, raisonne, nie même l'expérience, incite à douter de soi et du Divin. On doit reconnaître en elle la voix de l'Adversaire qui s'efforce d'entraver le progrès et ne lui accorder aucun crédit.

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4006

Aucun sâdhak n'est à l'abri d'une attaque des forces mauvaises; mais si la foi et la consécration sont complètes, on peut repousser l'attaque sans trop de difficulté.

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4007

Si la foi et la consécration sont totales dans toutes les parties de l'être, il ne peut y avoir aucune attaque. Si, au centre de l'être, il y a à tout moment une foi et une consécration puissantes, des attaques pourront se produire, mais elles n'auront aucune chance de réussir.

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4008

Deux choses font qu'il est impossible aux forces hostiles de mener à bien, même temporairement, une attaque contre le mental ou le vital: d'abord un amour, une dévotion, une confiance parfaites que rien ne peut ébranler, et en second lieu un calme et une égalité qui sont devenus, dans le vital comme dans le mental, les caractéristiques fondamentales de la nature intérieure. Alors même s'il se produit encore des suggestions contraires, même si tout va mal à l'extérieur, l'être demeure invulnérable. Que l'on adopte l'une ou l'autre voie, à mesure que croissent l'amour et la dévotion ou le calme et l'égalité, l'existence même des forces hostiles devient de moins en moins un phénomène de la vie intérieure, quoiqu'elles puissent encore subsister dans l'atmosphère extérieure.

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4009

Ceux dont la nature est très sattwique — surtout si leur consécration à la Mère est ardente — échappent à l'invasion ou aux attaques des Forces hostiles dans le mental et le vital. Cela ne signifie pas qu'ils échappent aux difficultés de la nature humaine inférieure ou de la sâdhanâ, mais les forces hostiles ne viennent pas compliquer ces difficultés en leur apportant un soutien positif. Non que ces forces ne puissent trouver en eux aucun point sur lequel exercer leur pression, mais c'est un fait qu'elles n'ont pas accès à ces points, leur nature étant, de par sa constitution, armée contre elles, en raison de la grande proportion de prakāśa et de sukha (c.f. la Guîtâ) qu'apporte le sattwa. Par ailleurs il y a dans l'être une clarté intérieure, un équilibre, une heureuse disposition qui reflète aisément la lumière du soleil, est moins sensible aux nuages et à la tempête, ne laisse aucune prise aux forces hostiles. La nature refuse de se laisser violemment agiter, troubler ou bouleverser. Les forces hostiles peuvent tout au plus attaquer le corps, justement parce que, l'être nerveux étant calme, elles ne peuvent faire porter leur attaque que sur la partie la plus matérielle.

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4010

La pureté vitale est très nécessaire, mais il n'est pas facile de la rendre invulnérable aux attaques, à moins qu'elle ne soit vaste et accompagnée d'une pureté et d'une paix spirituelles solides qui descendent dans cette immensité. L'immensité à elle seule ne suffit évidemment pas.

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4011

Les forces hostiles viennent parce qu'elles ont eu toute latitude de le faire autrefois; elles veulent donc reprendre leur action et la poursuivre. Le seul moyen de s'opposer à elles est de les rejeter entièrement et de se tourner complètement vers le Divin.

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4012

Les forces mauvaises peuvent toujours attaquer, soit aux moments où l'on est inconscient ou semi-conscient, soit en passant par le subconscient ou le physique extérieur, tant que la transformation supramentale n'est pas entièrement achevée. Mais avec l'aide de la Force, on peut les repousser aussitôt.

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4013

Les forces hostiles n'ont pas besoin d'un motif pour attaquer: elles attaquent tous ceux qu'elles peuvent, à chaque occasion qui se présente. Il faut veiller à ce que rien ne leur obéisse ni ne les laisse entrer.

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4014

Vous me demandez si la Force adverse est plus forte que la Force divine. Cela voudrait dire que l'homme n'est pas responsable de ses actes et que, quoi qu'il fasse, quelles que soient les erreurs et les chutes qui découlent de ses actions, c'est la Force divine qu'il faut blâmer. Il en est peut-être ainsi, mais dans ce cas la pratique de la sâdhana n'est ni nécessaire, ni utile. On n'a qu'à rester tranquillement assis et laisser la Force hostile ou la Force divine faire ce qu'il lui plaît! Selon cette théorie, le Démon a eu raison de dire au Christ: "Jette-toi du haut de cette montagne et que Ses anges viennent te soutenir", et le Christ a eu tort de rejeter cette suggestion et de répondre: "II est écrit: tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu (c'est-à-dire: tu ne le mettras pas à l'épreuve)!" Il aurait dû sauter, et s'il s'était écrasé en bas, la preuve aurait été faite que les forces adverses sont plus puissantes que la Force divine!

Si une Force adverse apparaît, on ne doit pas admettre ses suggestions et leur faire bon accueil, mais se tourner vers la Mère et refuser de se détourner d'elle. Que l'on soit ou non capable de s'ouvrir, on doit être loyal et fidèle. On n'a pas besoin de pratiquer le yoga pour être loyal et fidèle. Ce sont des qualités très simples que tout homme et toute femme qui aspire à la Vérité doit pouvoir acquérir.

C'est ce que tous devraient comprendre. C'est la fidélité psychique qui apporte le pouvoir de se dresser contre les Asoura, et qui permet à la Protection d'agir.

III

4015

À propos des attaques et de l'action des forces cosmiques: très souvent, ces attaques deviennent violentes lorsque le progrès s'accélère et approche, de sa phase définitive; si, en particulier, elles s'aperçoivent qu'elles ne peuvent mener à bien une agression dans l'être intérieur, elles essaient d'ébranler celui-ci par des assauts extérieurs. On doit accepter cela comme une épreuve de force, un appel à rassembler toutes ses capacités de calme et d'ouverture à la Lumière et au Pouvoir, afin de se transformer en un instrument de victoire pour le Divin contre le non-divin, pour la Lumière contre l'obscurité de ce monde en désordre. C'est dans cet esprit que vous devez faire face à ces difficultés, en attendant que les éléments supérieurs se soient suffisamment consolidés en vous pour que ces forces ne puissent plus vous attaquer.

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4016

Il a tout à fait raison de dire que si les attaques se sont abattues si lourdement sur vous, c'est que vous aviez décidé de pratiquer sérieusement la sâdhanâ et que vous vous approchiez, pourrait-on dire, des portes du Royaume de Lumière. Cela met toujours ces forces en rage et elles font tout ce qu'elles peuvent contre le sâdhak, suscitent ou utilisent toutes les occasions de le tirer en arrière ou, si possible, de l'éloigner définitivement du chemin par leurs suggestions, par leurs influences violentes et en exploitant les incidents de toutes sortes qui ne manquent pas de se multiplier dans de telles circonstances, afin de l'empêcher d'accéder aux portes. J'ai plus d'une fois fait allusion à ces forces dans les lettres que je vous ai adressées, mais je n'ai pas insisté, constatant que, comme la plupart de ceux dont le mental est devenu rationaliste sous l'effet d'une éducation européenne moderne, vous n'étiez pas enclin à ajouter foi à cette connaissance ou du moins à y attacher une importance quelconque. De nos jours, les gens cherchent à tout expliquer par leur raison ignorante, leur expérience de surface et les événements extérieurs. Ils ne voient pas les forces cachées et les causes intérieures familières à la tradition indienne et yoguique qui en avait eu la vision et la connaissance. Ces forces trouvent bien sûr leur point d'appui dans le sâdhak lui-même, dans les parties ignorantes de sa conscience et dans leur assentiment à ces suggestions et à ces influences; sinon elles ne pourraient pas agir, ou du moins leur action ne saurait réussir. Dans votre cas, les points d'appui principaux étaient un ego vital inférieur extrêmement sensible auquel s'ajoutent maintenant la conscience physique et ses opinions arrêtées ou coutumières, ses préjugés, ses partis pris, ses réactions habituelles, ses préférences personnelles, son attachement aux vieilles idées et aux vieilles associations d'idées, ses doutes obstinés, toutes choses qu'elle dresse comme un mur d'obstruction et d'opposition contre la lumière plus vaste. C'est cette activité du mental physique que les gens appellent intellect et raison, bien qu'elle ne soit rien de plus qu'une machine qui tourne en rond dans ses habitudes mentales, et ne s'apparente guère à la raison véritable et libre — la Bouddhi supérieure qui est capable d'illumination — et moins encore à la lumière spirituelle supérieure ou à la perception ou au sens intérieurs de la conscience psychique qui voit instantanément ce qui est vrai et juste et le distingue de ce qui est erroné et mensonger. Cette perception intérieure, vous l'aviez constamment quand tout allait bien et surtout chaque fois que la bhakti se renforçait en vous. Lorsque le sâdhak descend dans la conscience physique et quitte les régions du mental ou du vital supérieurs où il avait commencé à se tourner vers le Divin, ces éléments contraires deviennent très forts et très tenaces, et étant donné que les états ou les expériences plus encourageants que l'on a eus auparavant disparaissent derrière le voile, à tel point que l'on se demande presque si on les a jamais eus, il devient difficile d'en sortir. Comme X vous l'a déjà dit et comme je vous l'ai répété moi aussi, la seule chose à faire est alors de s'accrocher et de tenir jusqu'au bout. Dès que l'on est à tout jamais résolu à rejeter les suggestions de ces forces, si plausibles qu'elles paraissent, le trouble diminue plus ou moins rapidement; ensuite il sera surmonté et disparaîtra. Abandonner le yoga n'est pas une solution.

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4017

Vous avez raison. Les forces hostiles, leurs attaques, leurs suggestions devraient maintenant être surannées, démodées, hors de propos ici, dans notre sâdhanâ. Si quelqu'un pouvait comprendre cela et le réaliser dans sa sâdhanâ, les autres trouveraient peut-être la force de suivre le mouvement. Actuellement ces choses subsistent parce que les sâdhak s'ouvrent à elles par habitude, par désir, par attirance pour le drame vital, par peur, par une acceptation passive et une obéissance inerte. Mais leur présence ici n'a plus de véritable nécessité ni de vraie justification; quant au monde extérieur, c'est une autre affaire. La sâdhanâ pourrait fort bien et même devrait se poursuivre comme un épanouissement, une atténuation naturelle des défauts et des difficultés, une progression de plus en plus grande de la lumière, du pouvoir et de la transformation.

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4018

En disant que leur action "n'est plus nécessaire", je ne voulais pas dire qu'elle ne pouvait pas se poursuivre; je crois avoir dit expressément que si les sâdhak s'obstinaient à s'ouvrir à elle, elle continuerait. L'action des pouvoirs hostiles diffère de l'action ordinaire de la nature inférieure. Celle-ci se poursuit évidemment tant que la nature inférieure n'est pas transformée, mais elle ne se manifeste pas obligatoirement sous forme d'attaques et de bouleversements hostiles; on peut la traiter comme un mécanisme qui doit être réglé et qui peut l'être, à l'aide de la Lumière et du Pouvoir d'en haut. Quelques-uns, attaqués jadis par des pouvoirs hostiles, ont maintenant avancé au point de pouvoir appliquer cette méthode; d'autres en sont proches; certains, évidemment, l'ont toujours suivie et n'ont jamais été attaqués, du moins dans leur mental et leur vital. Mais beaucoup en sont encore très loin et par conséquent, l'action des Pouvoirs hostiles se poursuit.

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4019

J'ai écrit cela parce que la Lumière et le Pouvoir sont maintenant suffisamment descendus pour que l'on n'ait pas à subir les épreuves que les Pouvoirs hostiles sont autorisés à imposer lorsqu'on ne dispose, pour soutenir le progrès, que du mental ou des forces spirituelles ordinaires sur le plan mental. Si vous regardez de près, vous verrez que maintenant, quand ces Forces agissent, c'est d'une manière parfaitement instinctive et irrationnelle, en répétant sans cesse les mêmes mouvements, sans être soutenues par aucun pouvoir intellectuel ou vital supérieur. Leur méthode est devenue irrationnelle et mécanique, ce sont plutôt les régions inférieures du physique et le subconscient qu'elles obscurcissent. Cela signifie que leur présence n'est plus vraiment justifiée.

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4020

Les facteurs que vous énumérez ne sont pas la cause des attaques, mais ils en sont l'occasion; c'est la faiblesse des sâdhak qui permet ces attaques alors qu'elles pourraient fort bien être repoussées. Les forces hostiles sont présentes dans le monde pour entretenir l'Ignorance; elles étaient présentes dans la sâdhanâ parce qu'elles avaient le droit de mettre à l'épreuve les sâdhak, pour voir si leur faculté et leur volonté de s'accrocher au Divin et de surmonter toutes les difficultés étaient sincères. Telle était la situation tant que la Lumière supérieure n'était pas descendue dans le physique; mais maintenant elle descend, elle est suffisamment présente pour que tous puissent la recevoir de mieux en mieux afin que le chemin s'aplanisse et s'ouvre, qu'il devienne un développement progressif et ne soit plus une bataille.

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4021

Ce n'est pas la pression d'en haut qui crée les difficultés. C'est une forte résistance au changement dans les plans inférieurs, et certaines Forces en profitent pour jeter des pavés dans la mare et essayer de bouleverser le plus de gens possible. La Pression d'en haut sur ces Forces ne fait que les expulser de l'atmosphère de la personne qu'elles ont touchée, ou de l'atmosphère en général. Au bout d'un certain temps, elles sont expulsées de l'atmosphère de la personne et ne peuvent plus agir sur elle, sinon à distance avec un effet très minime. Lorsque cela pourra se faire d'une manière générale, afin qu'elles soient repoussées à une certaine distance de l'atmosphère de l'Ashram, alors tous ces ennuis cesseront.

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4022

Ils n'ont pas quitté l'Ashram à cause de la pression du yoga, mais à cause de la pression de quelque chose en eux qui nie le yoga. Si l'on suit son être psychique et l'appel du mental supérieur, la pression du yoga, si forte soit-elle, ne peut avoir de telles conséquences. Les gens parlent du yoga comme s'il contenait une force maléfique capable de produire ces résultats. C'est au contraire la résistance au yoga qui les produit.

IV

4023

Souvent le fait qu'un progrès ait été accompli réveille l'activité des forces adverses; elles veulent le plus possible en atténuer l'effet. Quand vous avez une expérience décisive comme celle-ci, vous devez rester en concentration et l'assimiler, en évitant de vous disperser et d'extérioriser si peu que ce soit votre conscience.

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4024

Très souvent, après une bonne expérience ou un progrès décisif, les êtres du monde vital essaient d'attaquer et deviennent menaçants... Ils espèrent toujours pouvoir détourner le sâdhak de son chemin par des attaques et des menaces.

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4025

C'est souvent le cas. Lorsqu'un progrès a été fait (ici, l'ouverture de la vision intérieure), les forces hostiles attaquent avec furie. Vous devez être particulièrement sur vos gardes quand vous faites un progrès, afin de repousser les attaquants avant qu'ils ne puissent pénétrer en vous.

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4026

C'est exact. Le reste est un résidu de l'attaque, d'une attaque soudaine et violente, comme il en vient souvent lorsqu'on est en plein progrès et sur le point d'atteindre le chemin direct et ouvert. Elle ne peut dévier en permanence le progrès et lorsqu'elle disparaît, on a en général une chance d'avancer plus fermement et plus rapidement vers le but. C'est ce que nous devons faire maintenant.

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4027

Naturellement, les forces hostiles sont toujours aux aguets pour dérober le maximum de ce que le sâdhak a reçu; non qu'elles en tirent un profit, mais elles l'empêchent de s'en servir pour construire la vie divine.

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4028

La lutte se poursuit sans cesse entre les forces de Lumière et les forces d'opposition; dès qu'il y a un mouvement vrai et un progrès authentique, celles-ci tentent d'arrêter le progrès ou de le retarder en le contrariant par un mouvement faux. Tantôt cette intervention réveille en vous d'anciens mouvements qui ont gardé le pouvoir de se reproduire, tantôt elles se servent de mouvements ou de pensées qui sont présents dans l'atmosphère, de paroles prononcées par les autres, pour troubler la conscience. Quand on peut établir dans le physique une paix durable et y rendre permanente l'action du Pouvoir et la consécration de l'être, alors la base devient sûre; les fluctuations de ce genre ne peuvent plus se produire, même s'il subsiste des difficultés superficielles.

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4029

Ou bien c'est la conscience supérieure qui doit descendre dans le vital et le physique, ou bien l'on doit détecter, à l'aide de la conscience psychique venant au premier plan, toutes les imperfections du vital et les rejeter.

Il y a toujours des forces hostiles qui tentent d'arrêter l'expérience ou de la détruire. Si elles viennent, c'est un signe que quelque chose dans l'être — vital ou physique — répond à leurs sollicitations ou est trop inerte pour s'y opposer.

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4030

Votre lettre est trop vague. La réaction que vous décrivez pourrait tout aussi bien être celle qui suit souvent une expérience: la force adverse pénètre en apportant un mouvement contraire. Tantôt les épreuves viennent des forces hostiles, tantôt elles sont apportées par le cours naturel des choses. Je suppose qu'elles sont nécessaires, puisqu'elles ne manquent jamais d'apparaître dans la sâdhanâ.

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4031

Il est inutile de se soumettre à des épreuves: toutes les épreuves nécessaires viennent d'elles-mêmes de la manière la plus ordinaire, par le simple fait d'utiliser une faculté et à mesure que l'on progresse; aucune autre épreuve n'est nécessaire. En dehors de celles-ci, les forces hostiles en imposent d'autres; mais leur méthode consiste soit à profiter d'un point faible sur lequel elles exercent un maximum de pression pour briser la sâdhanâ, soit à déchaîner toutes les forces adverses sur la conscience alors qu'elle est encore dans une phase de transition et qu'elle manque encore de maturité, afin d'anéantir tout ce qui a été fait. Ce n'est pas véritablement une épreuve, mais une destruction pure et simple qui se substitue à la méthode constructive. En se soumettant inutilement à des épreuves, on attire dangereusement cette pression hostile et on suscite des choses qu'il faudrait rejeter. Il est certes nécessaire d'être conscient, mais pour cela une introspection tranquille suffit; la méthode qui consiste à susciter les difficultés pour se mettre à l'épreuve est foncièrement mauvaise.

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4032

La Manifestation divine procède par le calme et l'harmonie, non par des bouleversements catastrophiques. Ceux-ci sont le signe d'un conflit, généralement entre des forces vitales contraires, mais dans tous les cas, d'un conflit sur le plan inférieur.

Vous pensez trop aux forces adverses. Ce genre de préoccupation cause beaucoup de tourments inutiles. Fixez votre mental sur le côté positif. Ouvrez-vous au pouvoir de la Mère; concentrez-vous sur sa protection; appelez la lumière, le calme, la paix, la pureté et la croissance en la conscience et en la connaissance divines.

L'idée d'épreuve n'est pas non plus une idée saine et ne doit pas être poussée trop loin. Les épreuves sont infligées, non par le Divin, mais par les forces des plans inférieurs — mental, vital et physique — et tolérées par le Divin parce qu'elles font partie de l'éducation de l'âme et l'aident à se connaître elle-même, à connaître ses pouvoirs et les limitations qu'elle doit dépasser. La Mère ne vous met pas à l'épreuve à chaque instant; au contraire, elle vous aide à chaque moment à vous élever au-dessus de la nécessité des épreuves et des difficultés, nécessité qui appartient à la conscience inférieure. Être toujours conscient de cette aide sera votre meilleure sauvegarde contre toutes les attaques, qu'elles viennent des forces adverses ou de votre propre nature inférieure.

Les Bases du Yoga. chapitre III. Traduction de la Mère.

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4033

Si l'on sait profiter de l'expérience, même les Forces hostiles et leurs attaques peuvent être utiles; ce qui ne signifie évidemment pas que l'on doive susciter les attaques. Ces Forces hostiles pressent tant qu'elles peuvent sur un point faible de notre nature et si nous sommes vigilants, nous pouvons voir cette faiblesse et la rejeter. Seulement la méthode d'attaque de ces Forces est trop violente et catastrophique et risque de détruire aussi ce que l'on a de bon en soi: foi, paix, etc.; on doit donc veiller à préserver cela de toutes les attaques.

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4034

Lorsque les pouvoirs hostiles ne peuvent interrompre le yoga par des moyens positifs — tentations ou crises vitales — ils ne demandent pas mieux que de le faire par des moyens négatifs: d'abord en jetant le sâdhak dans la dépression, puis en l'incitant à refuser à la fois la vie ordinaire et la sâdhanâ.

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4035

Les attaques indirectes n'ont pas ce caractère d'invasion violente et d'obscurcissement par les forces hostiles; elles procèdent par suggestions voilées, moitié vraies, moitié fausses, en essayant de présenter le mensonge sous les atours de la Vérité divine ou de mêler adroitement la conscience inférieure à la conscience supérieure. Elles tentent de détourner le sâdhak de son chemin par la ruse plutôt que de le vaincre par la force.

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4036

Lorsque les forces ou les êtres du vital projettent une influence, elles lui donnent certaines formes de pensée et d'action qu'elles implantent dans le mental et le vital des individus pour les faire sentir, penser, agir et parler d'une manière particulière. Quiconque s'ouvre à l'influence de ces forces agit selon cette formation, en la modifiant peut-être par son propre tempérament vital.

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4037

Le nombre d'êtres vitaux qui s'attachent à un individu n'est pas fixe — mais parfois certains êtres vitaux particuliers s'attachent à un individu, s'il les accepte.

V

4038

Les attaques sont incessantes et ces temps-ci elles se sont abattues sur bien des sâdhak. Mais si la foi est puissante et fondée sur la Mère, et si l'aspiration est ardente, aucune attaque ne pourra laisser de traces durables.

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4039

Il y a habituellement deux manières de faire face aux attaques: les rejeter par des moyens dynamiques, ou rester indifférent et les laisser passer.

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4040

Cet état qui essaie de s'abattre sur vous et de vous saisir n'appartient pas à votre vrai moi; c'est une influence étrangère. Si vous y cédiez, si vous l'exprimiez, ce ne serait pas une preuve de sincérité, mais l'expression de quelque chose de faux par rapport à votre être intérieur, quelque chose qui, à mesure que vous progresserez, vous deviendra de plus en plus étranger. Rejetez cet état chaque fois qu'il vient, même si vous en ressentez fortement le contact; ouvrez votre mental et votre âme à la Mère, gardez votre volonté et votre foi, et vous le verrez reculer. Même s'il s'obstine à revenir, soyez aussi obstiné et même plus obstiné à le combattre et ferme dans votre rejet; cela le découragera et l'épuisera; à la fin, il s'affaiblira, il ne sera plus que l'ombre de lui-même et disparaîtra.

Soyez toujours fidèle à votre vrai moi; c'est cela, la vraie sincérité. Persévérez et triomphez.

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4041

Les forces inférieures espèrent vous lasser par leur persévérance, ou pénétrer en vous par pure obstination... ou tout au moins retarder la réalisation par leurs attaques. C'est leur méthode. Si elles parviennent à ébranler la foi, la paix et la samatâ, elles se considèrent comme largement récompensées.

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4042

La seule erreur serait de vous laisser déborder par les forces adverses. Si vous conservez votre fermeté intérieure, vous pourrez repousser l'attaque, ou elle s'épuisera et passera. Dans de telles circonstances, il faut être comme une falaise: attaquée, par la mer déchaînée.

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4043

Ce n'est pas être sincère que de n'exprimer que ce que 168 forces adverses vous suggèrent ou ce que vous ressentez quand vous êtes dans une mauvaise passe, que vous êtes plein d'obscurité, et que votre vision est faussée. Quand vous êtes dans la Vérité, c'est exactement le contraire que vous sentez et ce n'est pas de l'insincérité que de se cramponner à cet état et de chercher à le faire revenir. C'est seulement lorsque vous l'aurez fait revenir que la Vérité pourra grandir en vous.

La douleur dans la poitrine provient seulement d'une résistance vitale; elle persiste parce que vous vous identifiez à cette résistance. C'est seulement par la tranquillité et l'ouverture à la Mère que ces ennuis peuvent disparaître. Il n'y a pas d'autre moyen de progresser.

Si vous n'avez plus la tranquillité, vous pouvez toujours commencer par y aspirer; une aspiration sincère la fera revenir.

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4044

Je ne vois pas quelles raisons peuvent être assez subtiles pour justifier ou même paraître justifier quelque chose qui s'oppose à la sâdhanâ et essaie de la détruire. Tout obstacle au progrès spirituel ne peut être qu'un mensonge, quelles que soient les raisons qu'il donne pour se faire valoir. La meilleure chose à faire est de ne pas prêter l'oreille à ses raisons.

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4045

D'après votre dernière lettre, il est clair que ce n'est pas votre propre volonté qui vous pousse à partir, mais quelque chose qui s'est emparé de votre mental, l'emprise d'une certaine Force qui utilise un ancien mouvement du mental et du vital extérieurs pour vous y pousser. Raison de plus pour rejeter cette impulsion, puisqu'elle est contraire au vrai sentiment de l'âme et du cœur. C'est un piètre orgueil que celui qui dit: "Je suis de ceux qui se rompent, mais ne plient Pas"; il dissimule le fait que c'est devant les forces et les impulsions ignorantes et obscures que l'on plie. Le résultat en est, comme vous le constatez vous-même à la fin de votre lettre, que l'on s'incline devant les forces inférieures de la nature, mais que l'on refuse de s'incliner devant le Divin.

Si votre sâdhanâ doit être un conflit entre la Volonté supérieure et les vieilles forces de la nature qui apportent la souffrance et les tourments intérieurs, nous ne voulons pas que vous pratiquiez une sâdhanâ de ce genre. Ce n'est pas l'esprit de notre yoga. Ce que nous voulons, c'est que vous retrouviez votre tranquillité et qu'en elle, vous poursuiviez votre chemin. Il est toujours préférable d'avoir une base de tranquillité et de laisser la Force divine agir en vous fermement et calmement; il n'est pas nécessaire, pour avancer, de déployer un énorme effort personnel dans le bouleversement et la lutte. Retrouvez cette tranquillité; ouvrez-vous de nouveau comme autrefois — vous retrouviez alors le sommeil ou la santé en un jour ou deux, et vous vous développiez intérieurement sans ennuis excessifs — et laissez le Pouvoir et la Grâce de la Mère vous conduire.

Je ferai tout pour vous aider et vous tirer d'affaire, mais ce qui s'est fermé en vous doit se rouvrir pour que l'aide agisse aussi rapidement qu'autrefois. Sinon elle pourra toujours vous tirer d'affaire, mais s'il existe une forte obstruction qui doit être détruite, il y faudra du temps. Je crois qu'un renversement d'attitude mentale changerait tout; cela a déjà été le cas.

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4046

Vous devriez comprendre que ces incidents sont des attaques qui vous viennent d'une Force adverse à laquelle votre nature a répondu, en raison du désir vital et de l'ego vital — de ce que vous appelez l'égoïsme. Quand cela arrive, vous devez comprendre que c'est une attaque et la repousser au lieu de la laisser entrer; et pour cela, vous devez toujours écarter de vous le désir, l'égoïsme et tout ce qui en découle: jalousie, exigence, colère, etc. Inutile d'invoquer les bonnes raisons qu'elles ont d'apparaître: même si toutes les raisons invoquées étaient justes, elles ne justifieraient pas le fait que vous vous y laissiez aller, car rien, dans un sâdhak, ne justifie cela. Il est inutile de comprendre: il n'y a rien à comprendre, si ce n'est qu'avec ou sans raison, le désir, l'égoïsme, la jalousie, l'exigence, la colère n'ont aucune place dans la vie spirituelle.

Si vous vous en tenez à votre résolution, tout ira bien; et la connaissance juste viendra non du mental et de ses raisonnements, mais de l'âme et de sa vraie vision des choses.

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4047

Oui, la difficulté est qu'il y a toujours, dans la nature, une partie qui donne prise à l'attaque. Elle continue à se laisser faire, elle y prend plaisir ou, même si elle veut s'en libérer, elle est trop habituée à recevoir les sentiments, les pensées, les suggestions du passé et à y réagir; elle ne sait pas encore comment ne pas y réagir. L'être mental doit d'abord prendre du recul, refuser d'accepter, dire: "Cela ne m'appartient plus." Même si l'être vital est consentant, une partie de la nature peut alors être libre, observer l'attaque et la faire cesser. Puis cette partie libérée doit imposer la même volonté de détachement au vital, afin qu'au bout d'un certain temps, il sente lui aussi, quand vient l'attaque, qu'elle lui est étrangère, ne lui appartient pas: comme si un inconnu était entré dans la pièce et cherchait à imposer ses idées ou sa volonté aux occupants. Ensuite il devient plus facile de s'en débarrasser complètement. La Force de la Mère est évidemment à l'œuvre, mais ce consentement du mental et du vital permet d'obtenir rapidement et facilement un résultat; sans lui, il faut du temps et davantage d'effort et de lutte.

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4048

Si, en présence d'une attaque ou d'une obstruction, on pelle la Mère ou on pense à elle, le succès n'est pas forcément immédiat; même la volonté de se débarrasser de l'attaque ou de l'obstruction peut ne pas être aussitôt efficace, mais il faut persévérer jusqu'à ce que l'on obtienne un résultat, et si l'on persévère, le résultat ne peut manquer de se produire.

Durant ces attaques, on ne voit que le côté négatif des choses, parce que l'attaque ou l'obstruction essaie en tout premier lieu de voiler l'intelligence du mental. Si elle n'y arrive pas, il lui est difficile à ce moment-là de s'imposer complètement. Car si le mental reste alerte et s'accroche à la vérité, l'attaque ne peut que bouleverser le vital et bien que cela puisse être fort pénible, l'attitude juste du mental agit comme un correctif; le retour à l'équilibre en est facilité et le vital revient plus vite à son état normal. Si le vital garde son équilibre, l'attaque n'affecte que la conscience physique et seulement par ses suggestions; elle est bien plus superficielle, ou même ne fait que susciter temporairement une agitation, un malaise ou une maladie dans le corps, alors que le reste de la conscience n'en est pas affecté. Il est par conséquent très important de s'accoutumer à garder l'attitude mentale juste, même pendant une attaque, si forte soit-elle. Dans ce cas, ce qui aide le plus, c'est de garder Sa foi: la foi que le Divin est toujours là, la foi qui me fait dire: "J'arriverai jusqu'à lui quelles que soient les épreuves par lesquelles il me faudra passer." Cela permet de voir aussi les autres choses sous leur vrai jour.

Par ego tamasique, on désigne l'ego qui est faible, se déprécie, se décourage, ne croit à rien. L'ego radjasique est gonflé d'orgueil et d'amour-propre et cherche obstinément à s'imposer à chaque pas ou partout où il le peut; l'ego tamasique, au contraire, ne cesse d'exprimer des sentiments comme ceux-ci: "Je suis faible, je suis misérable, je n'ai aucune capacité, le Divin ne m'aime pas, ne m'a pas choisi, je ne vaux rien, je suis incapable; que peut le Divin pour moi?" Ou encore: "C'est toujours sur moi que s'acharnent le malheur et la souffrance, de tous je suis le moins aimé, tous progressent, je reste seul en arrière, je suis délaissé de toutes parts, il ne me reste plus que la fuite, la mort ou la catastrophe", etc., etc.; tels sont, exprimés en partie et pêle-mêle, les sentiments de l'ego tamasique. Parfois l'Ahankâr radjasique et l'Ahankâr tamasique se combinent pour s'étayer subtilement l'un l'autre. Dans un cas comme dans l'autre, c'est le "je" qui se joue un drame et obscurcit la vraie vision. La vraie vision spirituelle ou psychique est celle-ci: "Quoi que je puisse être, mon âme est un enfant du Divin qui doit tôt ou tard parvenir au Divin. Je suis imparfait, mais je recherche la perfection du Divin en moi, et cette perfection, ce n'est pas moi, mais la Grâce divine qui l'accomplira; si je suis persévérant, la Grâce divine elle-même fera tout." Le "je" doit prendre la place qui lui revient, celle d'une petite parcelle et d'un instrument du Divin, d'un quelque chose qui n'est rien sans le Divin mais qui, à l'aide de la Grâce, peut devenir tout ce que le Divin veut qu'il soit.

L'aide de la Mère est toujours là, mais vous n'en êtes pas conscient, sauf lorsque le psychique est actif et que la conscience n'est pas obscurcie. Le fait que les suggestions apparaissent ne prouve pas que l'aide n'est pas là. Tous reçoivent des suggestions, même les plus grands sâdhak ou les Avatars: le Bouddha et le Christ en ont reçu. Des obstacles, il y en a: ils font partie de la Nature et doivent être surmontés. Il faut arriver à ne pas écouter les suggestions, à ne pas les considérer comme la vérité ou comme émanant de sa propre pensée, à les voir pour ce qu'elles sont et à se tenir à distance. Il faut considérer les obstacles comme des pièces défectueuses dans le mécanisme de la nature humaine qui doivent être changées; il ne faut pas les considérer comme de mauvaises actions ou des péchés qui vous feraient désespérer de vous-même et de la sâdhanâ.

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4049

Mais quand les suggestions viennent, il est sûrement possible de déterminer, par leur caractère même, ce qu'elles sont, et leur nature montre qu'elles ne peuvent venir que de Forces vitales mauvaises. Il n'y a rien à en dire, sinon que vous devez les rejeter immédiatement et refuser de les laisser entrer dans votre mental et votre vital, c'est-à-dire que vous ne devez pas les accepter ni leur permettre de vous influencer. Très peu de gens ont la perception occulte et directe des Forces qui sont derrière la suggestion, du moins tant que la conscience cosmique n'est pas entièrement ouverte; lorsqu'elle l'est, il devient plus facile de la percevoir directement. Mais la compréhension mentale peut aussi s'avérer efficace.

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4050

Ne laissez pas ces suggestions prendre le dessus. Si vous tenez ces pouvoirs en échec chaque fois qu'ils vous attaquent, vous accumulez davantage de force pour progresser. Ils vous attaquent en vous suggérant une fausse interprétation, dans l'espoir de prolonger un peu, si vous l'acceptez, leur pouvoir de vous envahir de nouveau. Ne les laissez pas prendre le dessus, si brièvement que ce soit.

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4051

Il suffit que vous restiez en contact avec la Force et que vous rejetiez la confusion chaque fois qu'elle vous assaille. Le reste sera fait par la Force divine elle-même, car nul n'est vraiment assez fort pour se transformer, c'est la Force divine qui le fait, lorsqu'on l'appelle.

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4052

Oui, le Pouvoir, l'aide qu'il apporte et son action sur l'être intérieur sont et seront toujours avec vous. Dans les attaques les plus fortes, dans les heures les plus sombres, il était voilé et caché, mais jamais absent: il ne s'était pas retiré et ne le fera jamais.

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4053

Toutes ces difficultés trouvent naturellement leur origine dans les espérances de toutes sortes que nourrit le vital. Quand on veut s'en débarrasser, le vital résiste et refuse de s'en séparer; cela ne représenterait rien de plus qu'un travail de transformation, d'ajustement, de réaménagement qui pourrait prendre du temps, mais n'engendrerait pas de conflits ou de bouleversements sérieux. Car dès l'instant où le mental et la volonté intérieure seraient bien décidés à se débarrasser de ces mouvements, la volonté du vital supérieur se rangerait à leurs côtés et le reste de l'être serait incapable de résister indéfiniment ou violemment à la pression de la volonté supérieure de l'être, bien qu'il soit plus obstinément opposé au changement parce qu'il est fait d'habitudes, qu'il est soutenu par le subconscient et non dirigé par la raison ou la connaissance; sa force de résistance diminuerait et les réactions habituelles s'estomperaient ou disparaîtraient. Mais la prolongation de la difficulté et son acuité tiennent au fait qu'il y a, dans la Nature, des Forces qui ne sont pas personnelles ou individuelles, mais universelles, qui se nourrissent de ces mouvements et Ont longtemps dominé, grâce à eux, la nature individuelle. Elles ne veulent pas perdre leur empire et par conséquent, lorsque ces mouvements sont expulsés, elles les renvoient sur le sâdhak en vagues puissantes ou avec une grande violence. Ou elles créent dans le vital une grande dépression, un grand découragement, un grand désespoir — c'est leur arme favorite — parce qu'il est en train de perdre son ancienne capacité à ressentir le désir et n'est pas encore assuré d'avoir quelque chose pour la remplacer, c'est-à-dire un état ou un sentiment psychique ou spirituel, sûr et continu. Tout l'effort de ces Forces vise à empêcher cela. Elles créent donc ces bouleversements et le vital les accepte parce qu'il a l'habitude d'obéir aux Forces inférieures. Elles introduisent en même temps dans le mental des suggestions qui l'incitent à accepter, lui aussi, le trouble, le découragement et la dépression. C'est de cela que je voulais parler en disant qu'il s'agit d'attaques venant de l'extérieur qui doivent être rejetées. Si l'on ne peut pas les rejeter complètement, on doit cependant essayer de garder consciente une partie du mental qui refusera d'accepter les suggestions et de se laisser gagner par la dépression et le trouble, qui dira avec fermeté: "Je sais ce que c'est, et je sais que cela passera, que je pourrai reprendre mon chemin vers le but que rien ne peut m'empêcher d'atteindre, puisque telle est et sera toujours la volonté de mon âme." Vous devez parvenir à un point où vous serez à tout moment capable de le faire; alors le pouvoir perturbateur des Forces commencera à diminuer et à disparaître. Notre Force est là avec vous et ne manquera pas de vous soutenir et de vous revigorer. L'idée que nous sommes indifférents vous est évidemment suggérée pour contribuer à la dépression et la fortifier. Considérez-la comme telle et ne l'acceptez pas comme une vérité ou une pensée émanant de vous-même; car il est impossible que ce soit vrai. Que vous réussissiez à atteindre la paix et la lumière est notre souci autant que le vôtre, et même plus.

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4054

Il y a presque toujours dans l'être certaines parties qui refusent de fournir l'effort exigé d'elles, ou s'en sentent incapables. En général, le psychique, le mental et le vital supérieur s'unissent pour pratiquer le yoga, car si ces trois parties de l'être ne sont pas unies, le yoga ne progressera guère au-delà de quelques expériences de temps en temps. Mais le vital inférieur contient presque toujours quelque chose de récalcitrant, et le physique est dans l'ensemble trop obscur. Si le sâdhak était laissé à lui-même, il ne serait pas trop difficile de remédier à cela, mais c'est là qu'intervient l'hostilité des forces universelles (inférieures); elles veulent conserver leur empire sur l'être. Il en résulte une résistance exacerbée du vital inférieur et une obstruction exagérée (inertie, résistance passive) dans le physique qui accepte alors les suggestions de suicide, de dépression ou de désespoir.

VI

4055

[Les attaques des forces hostiles contre l'être extérieur:] On les ressent comme des suggestions, ou comme un contact à la surface du mental, du vital, du physique, ou encore comme des mouvements dans l'atmosphère (dans la conscience environnante personnelle ou générale), mais pour l'être intérieur elles sont comme des rafales ou des tempêtes au-dehors. S'il leur arrivait d'entrer dans la maison, elles seraient bientôt expulsées; portes et fenêtres claqueraient derrière elles; rien à l'intérieur ne les accepte ni ne les tolère.

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4056

C'était sans doute une indication sur l'origine et la localisation de la suggestion ou de l'influence. On sent très concrètement pénétrer, plus ou moins violemment, les pensées, les vibrations ou la pression émanant d'une force mauvaise, lorsque la conscience est ouverte. Quand elle ne l'est pas, elles entrent sans qu'on s'en aperçoive et on ne sent que le résultat.

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4057

Dans le mental supérieur et au-dessus, rien n'est soumis à l'action des forces hostiles. Car là tout appartient à la conscience spirituelle, plus ou moins complètement, avec plus ou moins de lumière et de pouvoir.

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4058

Les forces vitales peuvent attaquer le mental et le font. Nombreux sont ceux qui en reçoivent des suggestions par l'intermédiaire du cerveau; il est donc tout à fait possible que vous ayez senti celle-ci venir d'en haut, à travers la tête. Cela ne signifie pas qu'elle soit venue des régions supérieures au mental (mental supérieur, intuition ou surmental). Un raisonnement correct n'est rien de plus qu'une argumentation cohérente basée sur un certain point de vue: il ne saurait ni justifier un accès de colère, ni indiquer que celui-ci n'est pas d'origine adverse.

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4059

Vous étiez en train de faire descendre la vraie conscience dans le vital, mais comme l'ancienne difficulté est revenue dans le physique, l'attaque vitale se renouvelle. Vous saurez que la libération est complète lorsque votre vital pourra invariablement affronter cette attaque sans bouleversement ni cris, en repoussant la force d'attaque par une calme force intérieure de rejet.

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4060

Toutes ces parties de l'être ont progressé, mais elles semblent encore susceptibles d'obéir aux suggestions des forces hostiles. Ces suggestions, tout le monde en reçoit, mais on ne devrait pas les laisser entrer, surtout dans le cœur, ni permettre au vital de les accepter. Elles entrent évidemment par le mental physique (c'est ce que j'entendais par "la gorge et au-dessus") et affectent le vital de surface et l'être émotif. Vous devez acquérir le pouvoir de les en expulser en niant et en rejetant constamment et fermement leurs suggestions. Tant qu'il y a en vous quelque chose qui dit "oui" ou accepte, elles ont toujours la possibilité de revenir.

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4061

Comme je vous l'ai dit. c'est par habitude que le mental physique et le vital obéissent à ces forces. Dès qu'elles touchent l'un ou l'autre, vous êtes bouleversé et vous ne vous contrôlez plus. Le moyen de s'en débarrasser est de se concentrer dans le cœur, mais la conscience doit aussi se détacher pour pouvoir se tenir à l'écart de l'attaque et s'en sentir séparée.

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4062

Si grâce à la concentration dans le cœur les attaques des forces hostiles sont devenues moins fortes ou moins fréquentes, vous devez poursuivre cette concentration jusqu'à ce que vous soyez capable d'effectuer la jonction entre la tête et le cœur, le psychique et la conscience supérieure. Tout dépend de cela. Le psychique doit être assez fort pour contraindre le vital et le physique à se donner au Divin; ou la conscience supérieure doit descendre et tout occuper de sorte que les anciens mouvements soient capables tout au plus de s'agiter à la surface, sans pouvoir pénétrer dans le calme intérieur ni même l'atteindre; ou encore, les deux ensemble, psychique et conscience supérieure, doivent occuper tout l'être. Telles sont les trois voies par lesquelles progresse le yoga. Si la concentration dans le cœur — c'est-à-dire l'éveil du psychique —, est plus efficace contre les attaques, c'est elle que vous devez pratiquer.

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4063

Si même durant ces attaques et en dépit des souffrances et de l'obscurité, vous pouvez sentir cette partie de vous-même où la Paix est constante et la retrouver à tout moment, c'est un immense progrès. Ce quelque chose en vous qui ne la sent pas constamment, qui reste à mi-chemin, hésitant, doit maintenant, lui aussi, prendre la décision de se consacrer tout entier. C'est seulement une partie de votre mental physique qui ne comprend pas, qui recommence à accueillir les idées anciennes; elle doit être convertie. Peu importent la faiblesse et les incapacités; elles s'en iront quand la Paix et le Pouvoir seront complètement descendus dans le physique. Votre nouvelle naissance est certaine, vous en avez senti les premiers signes dans le psychique éveillé; le reste ne peut que suivre.

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4064

Je crois que c'est plutôt le manque de sommeil qui est cause de cela, et aussi un conflit intérieur trop intense dû à la pression constante de l'agitation vitale et au tamas physique, qui par là affaiblissent les nerfs.

L'inertie physique et tous ses symptômes viennent, comme l'agitation vitale, des forces hostiles qui vous attaquent pour interrompre l'ouverture vers le haut et l'empêcher de se produire. Les idées qui apparaissent pour justifier cette inertie sont sans valeur: il est faux que le travail manuel soit inférieur à la culture mentale; c'est l'arrogance de l'intellect qui le prétend. Les travaux exécutés pour le Divin sont tous également divins; le labeur manuel accompli pour le Divin est plus divin qu'une culture mentale ayant pour objectif le développement personnel, la notoriété ou la satisfaction intellectuelle.

L'inertie, l'engourdissement, la douleur doivent être rejetés avec la même résolution que les troubles du vital. Leur seule particularité, en ce qui vous concerne, est la violence persistante de l'attaque, comme c'était le cas pour le vital; autrement c'est ce que les autres ressentent aussi; mais chaque fois ils rejettent tout cela, font appel à la Mère et sont libérés, peu après si l'attaque est violente, aussitôt si elle est plus bénigne.

Lorsqu'on est temporairement incapable d'accomplir un effort physique, on peut se reposer, mais uniquement dans le but de recouvrer l'énergie physique. L'idée d'abandonner le travail physique pour se cultiver mentalement est une invention de l'ego mental.

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4065

L'inertie donne aux forces hostiles l'occasion et le pouvoir d'agir.

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4066

Les attaques dont vous parlez peuvent survenir n'importe où. Ce sont des forces vitales contraires qui attaquent les centres nerveux et l'être nerveux. Le fait que cette attaque vous empêchait de venir ici et qu'elle a commencé à céder lorsque vous vous êtes plongé dans l'atmosphère et les idées du livre "Le yoga et son objectif"1 est caractéristique de son origine. Quant aux autres symptômes, ils s'étaient accumulés dans l'être nerveux jusqu'à porter l'agitation à son paroxysme et sont très fréquents dans les cas de ce genre. Le désir de s'enfuir quelque part est un symptôme très courant. L'hystérie aussi vient d'une attaque émanant de forces similaires, mais elle n'en est que l'une des formes; l'attaque ne revêt pas forcément l'apparence d'une maladie. Les médecins la considèrent comme une forme de ce qu'ils appellent neurasthénie, faiblesse des nerfs; mais cela ne fait que localiser le phénomène sans en expliquer la vraie nature ni la véritable cause. Dans les deux cas, ici comme là-bas, les forces tentaient d'entraver votre vie spirituelle en créant une infirmité et un état de trouble dans la partie physico-vitale de l'être. Quoi qu'il en soit, le fait est que vous n'avez pas pu partir d'ici, et que nous avons pu éliminer la chose entièrement et sur-le-champ, dès que ce sentiment de chagrin à l'idée de partir a provoqué en vous une ouverture: tout cela démontre que la vie spirituelle est plus forte et plus profonde en vous, même lorsqu'elle est voilée, que les forces hostiles à leur paroxysme. Et c'est le principal.

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4067

Ce qui subsiste en vous est la capacité de répondre à ces suggestions, à cause de l'empreinte laissée sur le physique et surtout sur le physique subconscient par les habitudes passées. Je vous ai expliqué comment cela se passe: ces mouvements, lorsqu'ils sont rejetés par le mental et le vital, descendent dans le subconscient ou vont dans la conscience environnante, et de là peuvent revenir s'ils sont poussés par les forces hostiles. C'est par ces deux moyens que les forces hostiles essaient de recouvrer leur emprise. Les mouvements qui émergent du subconscient n'ont pas tant d'importance, si ce n'est qu'ils persistent longtemps; ils viennent en rêve, ou par fragments dans la conscience de veille. Mais quand “ ils viennent de la conscience environnante, l'attaque peut être violente et c'est évidemment ce qui vous arrive en ce moment.

Je crois que ce qui renforce ces attaques et tend à vous déséquilibrer, c'est, quelque part en vous, un sentiment d'impatience devant le fait que les choses n'avancent pas, qu'il n'y a pas de progrès décisif, et que ces mouvements ne sont pas encore définitivement éliminés. Ce qui peut apparaître comme une pause n'est pas nécessairement d'origine adverse; ce peut être une étape préparatoire à un nouveau progrès plus décisif; c'est fréquent dans la sâdhanâ; mais vous devez veiller à conserver l'avance que vous avez prise malgré les attaques. Le prochain progrès devrait être la descente du calme et de la paix spirituels complets et l'ouverture de la conscience dans l'immensité. En attendant, restez ferme et ne laissez aucune de ces attaques ébranler la base de votre sâdhanâ.

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4068

La conscience extérieure peut être envahie par des éléments sortant du subconscient ou venant du dehors et y répondre, parce qu'une habitude acquise réveille une vibration, mais cela ne signifie pas que la volonté du vital ou du mental physique y soit favorable. Si ces éléments contenaient quelque chose qui normalement favorise le sexe ou la violence, vous pourriez alors parier d'impuretés. Mais si tel était le cas, vous ne seriez pas seulement attaqué de temps en temps: le combat contre la colère et le désir serait quotidien.

Si l'on devait attendre la pureté absolue, celle que les attaques de ce genre ne peuvent toucher, avant de commencer à réaliser le Divin, nul n'en serait jamais capable. C'est à mesure que la réalisation progresse que la transformation fondamentale se fait.

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4069

Ces attaques ne devraient pas vous décourager. Tant que la base n'est pas complètement établie dans le physique, il y a toujours des moments où les mouvements anciens semblent revivre. Mais tant qu'il ne s'agit que d'une force extérieure qui fait irruption, baratte le subconscient et ne dure pas, cela ne signifie pas qu'aucun progrès n'a été fait. Nous avons affaire à la conscience humaine dans toute sa complexité, dans ses parties cachées autant qu'à sa surface, et cette conscience est faite de couches superposées où des résidus d'anciennes réactions peuvent encore rester tapis, mais chaque victoire renforce la maîtrise et rapproche de la complète purification.

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4070

Vous n'avez pas à être bouleversé au sujet de cet incident: il vous suffit de prendre note des mouvements comme celui-ci et de veiller à ce qu'ils ne trouvent plus de raison de se produire en vous. C'est probablement le contact avec le monde extérieur qui a réveillé en vous certaines tendances assoupies depuis longtemps. Quand la conscience s'abaisse, diminue ou se détériore dans l'une de ses parties, l'Adversaire — ou le Censeur — qui est toujours à l'affût presse tant qu'il peut partout où un point faible se dissimule à notre vue, et soudain un mouvement faux jaillit avec une force inattendue. Devenez conscient et rejetez la possibilité que cela se renouvelle; c'est tout ce qu'il y a à faire.

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4071

Ces forces [d'inertie, de dépression, etc.] se promènent dans l'atmosphère et vous sautent dessus à l'improviste. Il est souvent difficile de voir exactement d'où elles viennent; souvent aussi, elles viennent sans la moindre raison ou sans que rien en soi-même ne les y invite. Il suffit de se secouer pour s'en débarrasser, comme d'un objet matériel qui serait tombé sur vous.

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4072

Les choses se passent de la même manière pour tout le monde tant que l'on n'a pas atteint la siddhi positive de la transformation, grâce à laquelle il devient contraire à la nature même de l'instrument de répondre à ces vibrations, parce qu'elles lui sont devenues étrangères. Tant qu'on n'en est pas là, tout dépend de la vigilance de la conscience et de sa volonté. Le fait que la réaction se répète n'augmente pas la difficulté; cela ne fait que retarder le moment où les forces envahissantes seront expulsées.

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4073

Le mécanisme qui déclenche la réaction est le même chez tout le monde. Ce n'est pas par un choc, mais par quelque chose qui élargit ou élève l'être qu'il peut sortir de son ornière.

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4074

Mieux vaut ne pas se préoccuper des forces hostiles. Entretenez en vous une aspiration forte et sincère, appelez le Divin en toute occasion et à tout moment pour qu'il vous soutienne, et dans tout ce que vous sentez, restez ouvert à notre influence. C'est le chemin le plus facile pour atteindre le Divin. Si vous commencez à vous préoccuper des forces hostiles, vous ne ferez que le rendre plus difficile.

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4075

C'est ainsi qu'il faut considérer les suggestions hostiles: sans y prêter intérêt, avec indifférence. Ainsi on supprime la nécessité de lutter sans cesse — qui est en elle-même une forme d'intérêt — et pour ces suggestions c'est tout aussi dissuasif, sinon plus.

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4076

C'est tout à fait vrai. En parlant de ses expériences, on leur fait perdre une partie de leur pouvoir. De même, à trop penser aux Pouvoirs hostiles, on attire leur atmosphère. Il faut les reconnaître quand ils viennent et les repousser, mais trop penser à eux, les craindre, les attendre ou les guetter est une erreur.

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4077

La pire chose que l'on puisse faire pour la sâdhanâ est d'entrer dans un état morbide et de penser sans arrêt aux "forces inférieures" et aux "attaques". Si la sâdhanâ s'arrête pendant quelque temps, laissez-la donc s'arrêter: restez tranquille, poursuivez des activités ordinaires, reposez-vous quand vous en avez besoin; attendez que la conscience physique soit prête. Ma propre sâdhanâ, alors qu'elle était bien plus avancée que la vôtre, s'arrêtait parfois pendant six mois d'affilée. Je n'en faisais pas un drame, je restais tranquille jusqu'à la fin de cette période de vide ou d'inertie.

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4078

Oui,les forces adverses profitent de toutes les perturbations de ce genre, qui ouvrent pour ainsi dire une voie à leur action. La peur est la dernière chose à ressentir devant elles, car elle les enhardit et les rend agressives.

De plus la peur, comme vous le dites à juste titre, appelle l'objet de la peur; on doit par conséquent la rejeter entièrement.

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4079

C'est très intéressant, car c'est conforme à ce que dit et répète la Mère: ressentir de la compassion ou une émotion vaguement philanthropique envers ceux qui sont possédés par des forces vitales est très dangereux, car on risque par là de s'attirer une attaque sous une forme ou une autre. Il faut faire le nécessaire, mais s'abstenir de toute faiblesse de ce genre.

VII

4080

Un "simple accident", cela n'existe pas. Les accidents sont dus à une inconscience, même très légère, dans le physique, dont profitent ces petits êtres du plan vital physique qui sont plus malicieux que consciemment hostiles.

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4081

Ce n'est pas une Shakti mauvaise qui entre en vous et provoque cela de l'intérieur; ce sont de petites forces de l'extérieur qui s'amusent à créer de menus accidents de ce genre, en profitant d'une inattention, d'un oubli, etc.

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4082

Pour les accidents, vous avez raison. C'est surtout l'inconscience du mental physique qui fait que ces accidents ou interventions de forces malveillantes surviennent facilement.

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4083

C'est exact. Ces accidents n'arrivent que pour vous troubler. Vous ne devez pas vous laisser troubler.

Oui, les forces hostiles savent que la Paix est la base, et que si elle règne absolument, tout le reste viendra. C'est pourquoi tous les moyens leur sont bons pour l'empêcher de s'établir.

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4084

Oui, c'était une attaque; les forces hostiles prennent souvent la forme d'une personne ou d'une autre pour s'assurer, grâce au lien physique que l'on a avec elle, une emprise plus concrète sur la conscience physique.

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4085

Il arrive parfois que les forces hostiles, en se servant d'une formation soigneusement construite comme celle-ci et en utilisant comme instrument une tierce personne dont elles dirigent les mouvements, parviennent à tromper la vigilance de la conscience et à provoquer un accident comme celui-ci. C'est par le subconscient qu'elles y arrivent, car le subconscient n'a pas encore accumulé en quantité suffisante la force d'en haut qui, elle, aurait pu repousser la bicyclette qui survenait et la détourner de son chemin; il n'a pas encore acquis non plus la sûreté instinctive qui aurait pressenti le mouvement du cycliste et fait exactement ce qu'il fallait pour l'éviter. Mais quand la protection est là, de tels accidents, même graves, n'ont en général que des conséquences mineures.

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4086

On a souvent remarqué que lorsqu'un accident a eu lieu dans un endroit particulier, d'autres accidents ont tendance à se produire au même endroit pendant quelque temps. C'était le cas dans un lieu proche de Villianour, il y a quelques années. Les suicides ont aussi tendance à se reproduire à un endroit déterminé. C'est une sorte de formation puissante qui reste sur place; il n'est pas nécessaire qu'un être vital (un esprit) soit chargé de cette formation.

VIII

4087

Je dois dire, cependant, que ce n'est ni la volonté ardente de s'unir au Divin, ni la Force divine qui rend les gens fous; c'est leur manière d'agir lorsqu'ils prétendent s'être unis au Divin ou posséder la Force divine. Pour être plus précis, jamais je n'ai rencontré un seul cas d'effondrement dans le yoga (je ne parle pas d'une simple difficulté ou d'un échec négatif), un cas désastreux et dramatique, où n'apparaissait pas l'une au moins des trois causes suivantes. D'abord une aberration sexuelle (je ne parle pas de la simple sexualité qui peut être très forte dans la nature sans mener à l'effondrement) ou une tentative de sexualiser l'expérience spirituelle sur une base animale ou grossièrement matérielle; ensuite une ambition, un orgueil ou une vanité exagérés qui essaient de s'emparer de la force ou de l'expérience spirituelle pour s'en glorifier, ce qui aboutit à la mégalomanie; troisièmement, un vital déséquilibré et un système nerveux faible, enclin à se laisser guider par ses propres imaginations et ses impulsions déréglées, sans qu'il y ait de volonté mentale véritable ou de volonté mentale assez forte pour le calmer ou le réfréner, de sorte qu'il est à la merci des imaginations et des suggestions du monde vital adverse lorsqu'est franchie la frontière de la zone intermédiaire dont j'ai parlé dans un récent message.2 Les effondrements étaient tous dus à ces trois causes et surtout aux deux premières. Seuls trois ou quatre d'entre eux se sont terminés par la folie, et dans ces cas-ci l'aberration sexuelle était invariablement présente; une chute violente qui fait que le chemin est abandonné en est généralement la conséquence. X ne fait pas exception à la règle. Ce n'est pas parce qu'il recherchait ardemment l'union avec le Divin qu'il est devenu fou, mais parce qu'il a abusé de ce qui descendait aux fins d'une sexualité mystique et pour satisfaire son orgueil de mégalomane, en dépit de mes avertissements insistants et réitérés.

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4088

Il y a d'habitude derrière cela une prédisposition héréditaire ou natale (due à certaines circonstances de la naissance) ou basée sur un équilibre nerveux déficient. Souvent le vital contient un excès d'ambition, de désir ou d'un autre violent Ripou. Mais ceux-ci, même s'ils déforment ou brisent la sâdhanâ en l'ouvrant à des Forces indésirables, ne peuvent conduire à la folie (mégalomanie, érotomanie ou ce que l'on appelle folie mystique) à moins qu'il n'y ait une tare ou un manque d'équilibre nerveux. Sauf dans le cas où une faiblesse de ce genre crée un terrain favorable, l'angoisse ou une tension excessive en méditation ne saurait pas non plus engendrer la folie. Dans certains cas, la possession par des êtres des mondes vitaux, sans aucune prédisposition de ce genre, est possible, mais la guérison est alors plus facile. Il y a cependant des gens qui détruisent leur équilibre nerveux par des pratiques pernicieuses; là, la folie n'a vraiment rien à voir avec la sâdhanâ.

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4089

La gratitude est un sentiment psychique et tout ce qui est psychique aide l'âme à s'épanouir. Du point de vue spirituel, l'émotion n'a rien de mauvais. Seulement il ne faudrait pas qu'elle devienne un lien qui vous asservisse sur le chemin.

Il est tout à fait impossible que la descente de la Grâce divine provoque une nausée et un accès de nervosité; c'est une contradiction dans les termes. Lorsqu'on a "tiré" la Force ou que l'on s'est trop tendu à l'attendre, on a parfois un mal de tête ou une sensation analogue; si l'on tire trop la Force, on peut aussi avoir des vertiges, mais il suffit de rester tranquille et tout s'arrange soit parce qu'on a assimilé ce qui est descendu, soit autrement. Il n'y a jamais aucun contrecoup néfaste ou gênant.

L'idée que X est devenu fou à cause d'une Force divine est une aberration et une superstition irrationnelle. Les gens deviennent fous parce qu'ils ont une prédisposition physique due à l'hérédité ou à une cause organique, à une maladie secrète comme la syphilis, la crise étant souvent déclenchée par un facteur psychologique (ambition tournant à la mégalomanie, hypochondrie, mélancolie, etc.) Tout cela arrive dans la vie quotidienne et pas seulement dans le yoga: les mêmes causes ont ici les mêmes effets. Seulement il peut aussi arriver que l'on soit envahi par une Force étrangère qui engendre le déséquilibre, mais ce n'est pas la Force divine qui vous envahit, c'est une Force vitale. La Force divine ne peut, par sa descente, causer la folie, pas plus que l'apoplexie ou n'importe quelle autre maladie physique. Si l'on n'a aucune prédisposition, on peut subir toutes sortes d'attaques de la plus extrême violence, venant des forces, vitales ou autres, ou des mouvements de la nature inférieure individuelle, mais il n'y aura pas de folie.

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4090

Il est impossible qu'une descente produise des nausées, des vomissements, etc. En tirant trop de force, on peut provoquer un mal de tête ou un vertige qui disparaissent si l'on reste tranquille un instant pour assimiler au lieu de tirer. Il est impossible qu'une descente entraîne une poussée de tension artérielle, la folie, l'apoplexie, une crise cardiaque ou n'importe quelle autre maladie.

La maladie ne surgit pas par la descente de la Force, pas plus qu'une tare héréditaire ou la folie. Elles viennent d'elles-mêmes, comme chez X qui n'a jamais eu la moindre parcelle de descente ou de Force nulle part. C'est seulement après qu'il a perdu la tête que nous avons envoyé la Force (non sous la forme de descente, mais pour le soulager) pour qu'il conserve autant que possible son équilibre et sa santé.

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4091

Un Ânanda trop intense, si on le laisse se manifester avant que la pureté et la paix se soient établies dans la nature, peut fort bien déranger l'organisme; j'ignore cependant si cela a jamais eu pour conséquence la folie. En tout cas, c'est un fait que, normalement, l'Ânanda ne vient (j'entends dans le cours naturel de la sâdhanâ et non parce qu'on le tire) que sporadiquement tant qu'une base de paix et de pureté ne s'est pas encore formée. Il est sans doute bon qu'il en soit ainsi.

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4092

Ceux qui sombrent dans la folie ont perdu le vrai contact et se sont mis en relation avec des forces mauvaises. La cause en est soit une impureté ou un désir non spirituel que le chercheur portait en lui en abordant le chemin, soit une insincérité, un égoïsme, une attitude fausse, soit encore une faiblesse qui rend le système cérébral ou nerveux incapable de supporter le Pouvoir qu'il a appelé en lui.

Pour éviter ces dangers, il faut se laisser guider par quelqu'un qui a atteint la maîtrise dans le chemin. Seulement on doit se laisser guider complètement et sincèrement; on ne doit pas permettre à son propre mental, à ses idées et à ses fantaisies d'intervenir. Il va sans dire que l'on doit avoir pour guide un véritable instructeur et non un débutant ou un imposteur.

Nouvelles Lumières sur le yoga, chapitre III.

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4093

L'épilepsie n'est pas une possession, c'est une attaque ou tout au plus une emprise temporaire. La folie est toujours un signe de possession. L'hérédité crée une prédisposition. Il est impossible qu'une Force ou un Être du vital envahisse quelqu'un ou en prenne possession à moins qu'il n'y ait une porte ouverte pour le laisser entrer. La porte peut être un assentiment ou une affinité dans le vital, ou un défaut physique dans l'être.

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4094

L'épilepsie est le signe d'une attaque vitale, même si elle a une cause physique; la force qui attaque, ne parvenant pas à troubler le mental et le vital proprement dits, s'abat sur le corps et se sert d'une cause physique (latente ou en cours de développement) comme base de son action. Car tout ce qui se manifeste dans le physique doit avoir un support ou un moyen physiques pour s'exprimer.

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4095

La folie est toujours la conséquence d'une attaque vitale ou plutôt d'une possession, bien qu'elle ait souvent aussi une cause physique. L'hystérie est due à une pression venant du monde vital; elle peut donner lieu aussi à une possession temporaire. On ne peut pas en dire autant du délire ordinaire dont la cause est purement physique, sauf dans la mesure où toute maladie est une attaque des forces inférieures de la Nature; mais ces forces inférieures ne sont pas des êtres vitaux, ni ce que nous appelons spécifiquement des forces hostiles; elles jouent simplement leur rôle dans la nature et évidemment, il est possible et même probable qu'un être d'un genre ou d'un autre préside à telle ou telle maladie; au Bengale, les gens donnent un nom spécial à certains d'entre eux et les adorent comme des divinités pour les empêcher d'entrer chez eux. Mais comme je l'ai dit, il s'agit en réalité de Forces et non d'êtres hostiles du vital.

Quant à l'intérêt qu'ont les êtres vitaux à posséder les humains, les êtres du monde vital ne sont pas constitués comme les hommes; ils se délectent dans les conflits, la souffrance et la discorde; c'est leur atmosphère normale. En outre, ils veulent goûter au monde physique sans être dans l'obligation de naître, d'élaborer un être psychique et d'évoluer vers le Divin. Ils souhaitent rester ce qu'ils sont tout en continuant à se divertir avec le monde physique et le corps physique.

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4096

En général, dans ces cas d'hystérie, on ne gagne rien à ménager le malade; la fermeté est d'habitude plus payante, parce que le plus souvent quelque chose, dans la personne, veut se rendre intéressant, s'attirer la sympathie, être entouré de toutes sortes d'attentions, etc. Quant à en guérir, c'est une autre affaire; il faut éliminer la cause subjective et ce n'est pas facile.

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4097

La perte de l'équilibre produit un désordre dans la conscience; les forces adverses se servent de cette perte d'équilibre pour attaquer l'organisme et le bouleverser entièrement. C'est l'origine de l'hystérie, de la folie, du désir de mourir et de s'en aller.

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4098

[Pertes d'équilibre:] Plus facilement chez les femmes que chez les hommes, mais chez certains d'entre eux aussi. La perte d'équilibre a pour cause une incapacité à maîtriser les mouvements du vital par la raison, et une instabilité du vital lui-même qui le fait osciller d'un sentiment à un autre, d'une impulsion à une autre, sans ordre ni harmonie.

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4099

Je voudrais faire observer que X ne me paraît pas fou: il ne présente aucun signe de dérangement du mental pensant dû à une lésion, un accident ou une maladie. Il a une idée fixe et ce que l'on appelle la manie de la persécution, mais ce n'est pas dû à la folie; certains en sont atteints, qui ont par ailleurs une intelligence perspicace et parfaitement ordonnée. D'après sa photographie, il semblerait que X a en lui un élément médiumnique et qu'il est, par malchance, entré en contact avec des pouvoirs du plan vital qui ont pu introduire des suggestions dans cette partie de la conscience que nous appelons le mental vital; il est en conséquence incapable de voir les choses sous leur vrai jour et tourmenté par les suggestions qui ont creusé leurs sillons dans son mental vital sous la forme d'idées habituelles qui le tyrannisent et qu'il est incapable d'adopter comme de refuser. C'est malheureusement une maladie de la conscience qu'il est très difficile de guérir, parce que le patient lui-même ne coopère nullement, attaché qu'il est à son idée fixe, et même quand l'influence est retirée, il la rappelle à lui. Nous pourrions certes lui dire qu'il n'est pas fou et que Dieu ne l'a pas maudit, mais il se pourrait bien que cela ne suffise pas à le guérir.

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4100

Je vous écris aujourd'hui au sujet de votre fils X et de sa maladie (si l'on peut appeler cela ainsi). J'exposerai d'abord en termes généraux la nature de la maladie et le cours qu'elle suit habituellement, c'est-à-dire son cours normal lorsqu'aucune force psychique ou spirituelle n'est mise en œuvre pour l'éliminer. Ensuite j'indiquerai les deux méthodes possibles pour la guérir.

Je crois qu'il vaut mieux que j'envisage ici le pire et non seulement le meilleur, car il est nécessaire que vous sachiez toute la vérité pour avoir le courage d'y faire face. Dans les cas comme celui-ci, il ne s'agit pas d'une maladie véritablement physique, mais d'une tentative de possession par un être du monde vital, et les crises et autres symptômes physiques sont des signes non de la maladie elle-même, mais de la lutte de l'être naturel contre la pression de l'influence hostile. Un cas de ce genre, chez un enfant de cet âge, indique qu'une accumulation de facteurs, dans l'hérédité physique, crée une occasion ou une prédisposition dont profite l'envahisseur vital. C'est, en particulier, la conscience physique et physico-vitale qui contient les germes ou les matériaux de cette prédisposition. Or, la constitution de l'être physique change sans cesse et tous les sept ans, elle est entièrement renouvelée. Si l'on détecte des symptômes de cette prédisposition de la nature et que les parents utilisent leur bonne influence et l'éducation pour les extirper, et si cette action est assez efficace pour qu'aucun germe de la maladie n'apparaisse plus au bout des sept premières années, en général il n'y a plus de danger. Si, au contraire, ces symptômes apparaissent vers la septième année, les sept années suivantes sont critiques et d'ordinaire la question est réglée, dans un sens ou dans l'autre, avant la quatorzième année.

Normalement, la situation peut évoluer dans trois directions. La difficulté, lorsqu'on a affaire à un enfant aussi jeune, est que le mental n'est pas développé et ne peut en rien contribuer à la guérison. Mais à mesure que le mental se développera durant la deuxième période de sept ans, s'il n'est pas anormalement faible — ce que je ne crois pas, dans le cas présent — il pourra réagir de plus en plus contre l'influence. Bien guidé et soumis à une bonne influence, il est fort possible qu'il réussisse à rejeter tout à fait l'intrusion hostile et sa pression. Dans ce cas, les crises et les autres signes du conflit physique passeront, l'enfant se défera de ses tendances morales et vitales bizarres et deviendra, mentalement, moralement et physiquement, un être sain et normal.

La deuxième possibilité est que la lutte entre l'être naturel et l'intrus ne tourne pas d'une manière décisive à l'avantage du psychique, c'est-à-dire que l'intrus ne pourra ni prendre complètement possession de l'être naturel, ni être rejeté complètement. Dans ce cas, tout peut arriver: mental et santé dévastés, mort corporelle ou nature dérangée, divisée et à tout jamais anormale.

La troisième possibilité, et la pire, est que l'intrus réussisse à prendre entièrement possession de l'être naturel. Dans ce cas, les crises et autres symptômes violents disparaîtront, l'enfant semblera physiquement guéri et en bonne santé, mais il sera devenu un être anormal et des plus dangereux, incarnant une force vitale mauvaise avec tous ses penchants redoutables, et doué de pouvoirs anormaux pour les satisfaire.

Dans le cas de X il n'y a pas encore de possession au plein sens du terme, mais une pression et une influence très fortes que révèlent les habitudes bizarres dont vous m'avez parlé. Ces habitudes sont suggérées et dictées par l'intrus et n'appartiennent pas à l'enfant lui-même. L'intrépidité et le sentiment de sécurité qu'il manifeste dans son état anormal proviennent de la même source. Mais les crises montrent qu'il n'y a pas encore de possession. Elles indiquent un conflit ainsi qu'une emprise temporaire qui disparaît pour revenir. X est évidemment dans la première phase de la période critique. J'ai décrit le cours normalement suivi par la maladie, mais il n'est pas indispensable d'en passer par là et d'en encourir les dangers. D'autres moyens peuvent lui venir en aide et le guérir complètement.

Le premier de ces moyens, et le plus facile, est de le soigner par l'hypnose. Avec cette méthode, si elle est correctement appliquée, la guérison est absolument certaine. Mais il faut tout d'abord qu'elle soit pratiquée par une personne qui n'est pas elle-même sous l'influence de pouvoirs maléfiques, comme le sont certains hypnotiseurs. Car de toute évidence, les choses ne pourraient alors qu'empirer. De plus, il faut que cette personne ait subi la formation nécessaire et sache parfaitement ce qu'elle fait; car une erreur pourrait être désastreuse. La meilleure solution serait que quelqu'un comme vous, qui a une relation naturelle avec l'enfant et exerce déjà une influence sur lui, prenne les choses en main après avoir acquis la pratique et la connaissance nécessaires.

L'autre remède fait appel au pouvoir et à l'influence spirituels. Si certains moyens psycho-spirituels pouvaient être utilisés, ce remède serait aussi sûr et efficace que l'autre. Mais comme personne, là-bas, n'a la connaissance appropriée, ce n'est pas possible. L'influence spirituelle peut être opérante, à elle seule, mais son action serait probablement lente. En général elle doit être transmise par une personne sur place, et vous seriez évidemment vous-même l'instrument approprié. Vous devez garder présente à l'esprit l'idée que je vous envoie du pouvoir à cette fin, vous y rendre réceptif et en même temps faire de votre volonté et de l'influence naturelle que vous avez sur l'enfant un véhicule direct pour ce pouvoir. La volonté doit être tranquille, calme et confiante, tendue vers son but, mais sans attachement; elle ne doit pas se laisser ébranler par la résistance, si forte soit-elle, ni alarmer ou décourager par les manifestations de la maladie. Votre attitude envers l'enfant doit être faite d'affection calme, ferme et protectrice, sans faiblesse ni troubles émotifs. La première chose à acquérir est une influence suffisante pour repousser l'attaque quand elle se produit et, si elle trouve à s'agripper, pour en atténuer peu à peu la force et apaiser la violence de sa manifestation. D'après votre lettre, je vois que vous avez déjà pu commencer à établir une telle influence. Mais celle-ci doit pouvoir travailler à distance autant qu'en sa présence. De plus vous devez acquérir le pouvoir de laisser une protection autour de lui quand vous vous absentez. Ensuite, vous devez être capable de lui communiquer, constamment entretenue, une suggestion qui inhibera peu à peu les habitudes bizarres et indésirables dont vous parlez dans votre lettre. Je puis ajouter que contre cela, les moyens extérieurs de coercition sont inefficaces. Ils ne feraient sans doute que rendre ces pulsions plus violentes. La volonté, la suggestion et l'influence doivent être silencieuses. Si vous vous apercevez que la maîtrise augmente et que ces habitudes diminuent, vous comprendrez que la guérison est en bonne voie. Il faudra sans doute du temps pour qu'elle soit complète, parce que ces êtres vitaux sont très tenaces, très obstinés, et reviennent toujours à l'attaque. La seule chose qui pourrait accélérer la guérison serait que l'enfant lui-même cultive mentalement une volonté de changer, ce qui ferait que l'influence hostile n'aurait plus prise sur lui. C'est parce que quelque chose, en lui, trouve amusante et agréable la force qui accompagne l'influence hostile, que ces phénomènes peuvent se répéter et persister. Ce quelque chose rappelle l'envahisseur, même quand, au centre de l'être, sa présence a été rejetée. J'essaierai, bien sûr, d'agir sur lui directement autant que par votre intermédiaire, mais si l'on a sur place quelqu'un qui peut servir d'instrument, l'action en est considérablement renforcée; cela lui est même parfois indispensable.

 

1 The Yoga and its Object: court ouvrage de Sri Aurobindo publié à Chandernagor en 1921.

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2 Cf. volume IV, pages 281-90.

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